"Ce prix est dédié aux âmes perdues du 4 juin", a lancé l'opposant, plus de 21 ans après la sanglante répression en juin 1989 du mouvement démocratique sur la plus grande place de la capitale chinoise. Lui-même avait pris part au mouvement et tenté de jouer les médiateurs entre les autorités et les étudiants.
Liu Xiaobo, un intellectuel devenu la bête noire du régime communiste, a adressé ces propos à son épouse Liu Xia, venue lui rendre visite sous escorte policière dans sa prison du nord-est de la Chine.
Rencontre en prison
Les paroles du détenu, premier citoyen chinois à se voir décerner le Nobel de la paix, ont ensuite été diffusées par l'ONG Human Rights in China (HRIC), dont le siège est à New York. Selon HRIC, la rencontre entre les époux, dans cette prison de la province du Liaoning où Liu Xiaobo purge une peine de 11 ans de réclusion, a duré "environ une heure".
D'autres groupes de défense des libertés ont annoncé que plusieurs militants et opposants avaient été arrêtés depuis l'attribution du Nobel à Liu Xiaobo
L'ex-professeur d'université âgé de 54 ans a été condamné fin 2009 pour avoir été l'un des auteurs de la "Charte 08", un texte qui réclamait une Chine démocratique. Ses convictions l'avaient déjà conduit à subir de longues périodes de détention, notamment dans les années 1990.
Liu Xia assignée à résidence
HRIC et une autre ONG, Freedom Now, ont annoncé que, de retour à Pékin, toujours sous bonne garde, la femme de Liu Xiaobo avait été "assignée à résidence". "Des agents de la sûreté de l'Etat empêchent Liu Xia d'entrer en contact avec les médias et ses amis. On lui a dit que si elle souhaitait quitter son domicile, elle ne pourrait se déplacer que sous escorte dans un véhicule de police", a précisé HRIC.
Dans un court message apparu dimanche soir sur le service de microblogs Twitter, Liu Xia a confirmé être assignée à résidence à Pékin, sans pouvoir être jointe par téléphone. "J'ai vu Xiaobo, et je lui ai dit le 9 (octobre) dans sa prison qu'il avait remporté le prix. Je vous en dirai davantage plus tard. S'il vous plaît, tous autant que vous êtes, aidez-moi à communiquer grâce à Twitter. Merci", poursuivait le message.
La nouvelle de l'attribution du Nobel de la paix à Liu Xiaobo, couronné "pour ses efforts durables et non violents en faveur des droits de l'homme en Chine", restait par ailleurs censurée sur les principaux sites internet en Chine. Pour les journaux chinois, l'attribution du prix Nobel de la paix à Liu Xiaobo traduit l'inquiétude des pays occidentaux face à la puissance croissante de la Chine.
Selon les médias contrôlés par le gouvernement, les pays occidentaux sont plein de préjugés et ne parviennent pas à se faire à l'idée que la Chine rivalise avec eux sur les plans économique et diplomatique. "L'attribution du prix Nobel de la paix au 'dissident' Liu Xiaobo n'est rien d'autre qu'une expression supplémentaire de ces préjugés, derrière lesquels se cache la crainte extraordinaire que leur inspire l'essor de la Chine et du modèle chinois", écrit le Global Times, un journal populaire en mandarin, fer de lance des critiques contre ce prix Nobel.
ats/cab
Mesures de rétorsions de Pékin
Pékin a annulé une rencontre ministérielle prévue mercredi entre les responsables chinois et norvégien de la pêche en réaction à l'attribution à Oslo du prix Nobel de la Paix au dissident chinois Liu Xiaobo, a-t-on appris lundi auprès du gouvernement norvégien.
Selon la chaîne publique norvégienne NRK, il s'agit de la "première mesure de réaction officielle contre la Norvège après l'attribution du prix Nobel de la Paix.
Dès l'attribution du prix vendredi, l'ambassadeur de Norvège à Pékin a été convoqué par les autorités chinoises.
La Chine avait prévenu qu'elle verrait d'un mauvais oeil l'attribution par le comité Nobel norvégien du prix de la Paix à un dissident chinois comme il en était déjà question.
Le comité Nobel est indépendant du gouvernement norvégien.