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Chili: plus de la moitié des mineurs ont été secourus

L'un des mineurs embrasse ses proches sous les yeux du président Pinera, très présent tout au long de la journée.
L'un des mineurs embrasse ses proches sous les yeux du président Pinera, très présent tout au long de la journée.
A genoux ou le poing levé, les mineurs bloqués depuis plus de deux mois au Chili continuent à retrouver la lumière, accueillis en héros par leur famille et le monde entier fasciné par un sauvetage sans accroc. Plus de la moitié d'entre eux, 23 au total, ont retrouvé l'air libre.

Durant cette opération de secours sans précédent qui se poursuit devant de multiples caméras, vingt-trois mineurs ont déjà été délivrés sans le moindre problème, treuillés sur 622 m d'ascension à travers le puits de secours, dans une étroite nacelle de 53 cm de diamètre jusqu'à l'air libre.

Le premier secouru, Florencio Avalos, 31 ans, a serré dans ses bras son enfant de sept ans, Byron, puis son épouse Monica. Il donné une accolade à la première Dame Cecilia Morel, au président Sebastian Pinera, qui a salué dans le sauvetage une opération "sans comparaison dans l'histoire de l'humanité".

"Avec Dieu, avec le Diable"

Les applaudissements de Claudio Yanez, 34 ans, le 8e mineur à avoir été hissé à la surface de la terre. Les secours l'emmènent pour des examens médicaux.
Les applaudissements de Claudio Yanez, 34 ans, le 8e mineur à avoir été hissé à la surface de la terre. Les secours l'emmènent pour des examens médicaux.

Une heure plus tard était hissé Mario Sepulveda, 39 ans, qui a sauté comme un cabri, brandissant le poing en l'air et serrant dans ses bras secouristes, ministres, président. Après son épouse, Katty. Puis Sepulveda a déclenché l'hilarité en tirant d'un sac de petites roches brillantes venues du fond de la mine, qu'il a distribués aux secouristes, au président, au ministre des Mines.

"Il m'a surpris avec son sac d'"or" pour le président. Toujours le même avec ses blagues", a commenté son père. "Chi-chi-chi, le-le-le ! Viva Chile, mierda !" (Merde, vive le Chili !) " !a crié le mineur, casqué et les yeux protégés par des lunettes spéciales, après plus de deux mois de pénombre.

"J'ai été avec Dieu, et avec le Diable. Je me suis bagarré avec eux", a raconté Sepulveda peu après, aux côtés de sa femme et de ses deux enfants, dans un bref monologue à une caméra, diffusé sur la télévision publique chilienne. Le mineur a demandé qu'on ne traite pas les 33 "comme des artistes ou des journalistes, s'il vous plaît. Je veux qu'on me traite comme un mineur".

Après eux, ont émergé Juan Illanes, 52 ans, le Bolivien du groupe Carlos Mamani, 23 ans, le benjamin Jimmy Sanchez, 19 ans, puis un à un les autres mineurs du groupe, déclenchant à chaque fois les hourras de la foule.  "Au nom du gouvernement bolivien, je ne sais comment payer notre dette pour ces efforts", a déclaré de son côté Evo Morales, venu rencontrer son compatriote.

"Un très grand bonheur"

"Merde, vive le Chili!", s'est écrié surexcité Mario Sepulveda, 39 ans. Le deuxième mineur à avoir été secouru a ensuite distribué des petits bouts de roche. Comme pour son premier compagnon, l'ascension s'est déroulée sans accroc.
"Merde, vive le Chili!", s'est écrié surexcité Mario Sepulveda, 39 ans. Le deuxième mineur à avoir été secouru a ensuite distribué des petits bouts de roche. Comme pour son premier compagnon, l'ascension s'est déroulée sans accroc.

Aux abords de la mine, les familles étaient ballottées entre une intense joie et une indescriptible cohue médiatique, proche du pugilat. "C'est un très grand bonheur, je suis très content, très heureux", a déclaré le père de Florencio, Alfonso, avant d'être happé par une foule de journalistes qui a fait vaciller la tente où campe la famille depuis le 6 août, lendemain de l'éboulement qui piégea les "33" au fond de la mine San José.

Pendant les 17 premiers jours de ce qui était alors une tragédie minière, mineurs et familles ont vécu dans l'angoisse. Les "33" attendaient désespérément les secours, jusqu'à ce qu'une sonde remonte le 22 août un message griffonné sur un bout de papier, désormais célèbre: "Nous allons bien, les 33, dans le refuge".

Les premiers sortis ont donc affiché un immense sourire en émergeant de la nacelle baptisée Phénix, en référence à cette renaissance. Un par un après les premières embrassades, les mineurs ont été placés sur un brancard, puis auscultés dans un hôpital de campagne sur place.

Avalos et Sepulveda ont ensuite été transférés en hélicoptère à l'hôpital de Copiapo, à 50 km, pour 48 heures d'examens médicaux. La santé des mineurs secourus est "assez bonne", a estimé le ministre de la Santé Jaime Manalich. "Les choses vont extraordinairement bien jusque là (...) même mieux que prévu".

Les plus forts attendent

Ici on voit sa femme et son fils attendre de pouvoir saluer leur mari et père.
Ici on voit sa femme et son fils attendre de pouvoir saluer leur mari et père.

Les dix premiers mineurs ont été sortis en huit heures, soit à peu près le pronostic des autorités qui misaient sur une opération d'un jour et demi. Ensuite, les autorités ont annoncé que l'opération serait achevée un peu plus rapidement qu'annoncé.

L'ordre de remontée suit un modèle établi de sauvetage: d'abord les hommes jugés plus habiles, puis les plus "faibles" physiquement ou psychologiquement, enfin les plus "forts", capables de supporter une attente prolongée. Et le "capitaine" en dernier, en théorie le chef de quart Luis Urzua, 54 ans.

Outre 800 proches et parents, plus de 2000 journalistes ont accouru pour le "happy end" de cette saga souterraine inédite. Les présidents américain, Barack Obama, vénézuélien, Hugo Chavez, ou encore brésilien, Lula, ont envoyé des messages de soutien aux mineurs.

Le Département fédéral des affaires étrangères a dit partager la joie des mineurs et de leurs proches.

En deux mois, les "33" sont devenus des vedettes planétaires, recevant des maillots dédicacés de stars du football, des chapelets bénis par le pape, des iPod offerts par le patron d'Apple Steve Jobs, pour les aider à tenir pendant leur calvaire, qui inspire déjà des réalisateurs de cinéma.

afp/ant/boi

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Chronologie d'un sauvetage

Il aura fallu trente-trois jours de travaux pour parvenir aux 33 mineurs coincés depuis plus de deux mois au fond d'une mine du Chili.

5 août 33 mineurs sont bloqués dans la mine d'or et de cuivre de San José (800 km au nord de Santiago), après un éboulement.

12 août Le ministère des Mines estime que les probabilités de retrouver les mineurs en vie sont "faibles".

22 août Les mineurs sont découverts vivants par une sonde souterraine. Ils font remonter un message sur un bout de papier. "Nous allons bien, les 33, dans le refuge", est-il écrit. Ils paraissent en bonne santé au cours d'un premier contact visuel à l'aide d'une caméra.

23 août Ils reçoivent un premier ravitaillement via un conduit. Proche de la faillite, la compagnie San Esteban, propriétaire de la mine, doute de pouvoir verser les salaires.

25 août Les autorités annoncent que les "33" savent désormais que leur sauvetage sera long (trois à quatre mois). Premier échange de courrier entre les mineurs et leurs proches.

26 août La télévision diffuse les premières images des 33 hommes, montrant leur organisation sous terre. La justice bloque 1,8 million de dollars de revenus de la mine, afin de garantir de futures indemnités.

29 août Premiers dialogues par radio-téléphone avec les proches et message du pape.

30 août Début du percement d'un puits de secours de 30 cm de large par une Strata 950.

5 septembre Commencement d'un deuxième forage par une foreuse "T-130".

19 septembre Une foreuse pétrolière commence à creuser un troisième puits, directement au diamètre requis de 66 cm (Plan C).

25 septembre Arrivée d'une première nacelle qui doit servir à remonter les hommes.

30 septembre : Les familles de 29 des 33 mineurs déposent une demande d'indemnisation de 12 millions de dollars à l'intention des propriétaires de la mine.

9 octobre Le puits de secours atteint les mineurs au fond.

13 octobre La remontée à la surface a débuté dans la nuit de mardi à mercredi.