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USA: soldats homosexuels à nouveau muselés

Les GI's homosexuels pourront désormais afficher leur préférence sexuelle.
La justice américaine souffle depuis des mois le chaud et le froid sur ses soldats homosexuels.
Le tabou gay dans l'armée américaine a été rétabli mercredi soir temporairement par une cour d'appel fédérale, dernier rebondissement en date dans un dossier que l'administration Obama voudrait à tout prix éloigner des tribunaux pour le ramener sur le terrain politique.

Une cour d'appel de San Francisco a autorisé temporairement mercredi les autorités militaires à continuer à appliquer la loi "Don't ask, don't tell" (DADT, ne rien demander, ne rien dire), interdisant aux soldats gays de révéler leur orientation sexuelle sous peine d'exclusion.

Cette loi avait été déclarée anticonstitutionnelle par la juge fédérale Virginia Phillips, qui avait ensuite interdit aux autorités de continuer à la mettre en application. Cette interdiction avait été confirmée mardi, mais la cour d'appel fédérale, à San Francisco, a décidé de rétablir la loi temporairement, pendant la durée du processus d'appel lancé par l'administration Obama.

Cette dernière avait une nouvelle fois fait appel mercredi matin de la décision d'interdire l'application de la loi DADT, insistant sur le fait qu'il revient au Congrès, et non à la justice, d'abroger le texte.

Justice et politique se disputent le dossier

"L'administration n'est pas favorable à la loi et est profondément convaincue que le Congrès devrait l'abroger", a rappelé l'administration américaine dans sa requête. Mais, explique-t-elle, "le ministère de la Justice, comme cela a toujours été le cas, défend la constitutionnalité des lois fédérales tant que celle-ci peut être raisonnablement défendue".

Barack Obama avait promis en janvier qu'il abolirait cette loi. Accédant à sa demande, la Chambre des représentants a voté l'abrogation au mois de mai. Mais fin septembre, le Sénat a refusé d'ouvrir les débats sur la question.

Perdant patience, un groupe d'homosexuels républicains a déplacé le débat politique devant la justice et obtenu gain de cause auprès de Virginia Phillips qui a jugé la loi non constitutionnelle, puis en a interdit l'application.

Des questions de principe

Depuis, l'administration utilise tous les moyens juridiques en son pouvoir pour obtenir l'annulation d'une décision de justice allant pourtant dans son sens.

"Dans un contexte militaire, un tribunal doit faire attention à ne pas substituer ce qu'il estime préférable à ce qui l'est pour le Congrès ou sa propre évaluation de la situation à celle du pouvoir législatif", a estimé l'administration Obama.

Elle a également insisté sur le manque de "préparation" de l'armée américaine et affirme que l'"intrusion non justifiée" de la juge Phillips dans les affaires militaires "risque de porter un préjudice important et immédiat à l'armée dans ses efforts pour préparer l'abolition en bonne et due forme de la loi".

afp/jeh

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Tous d'accords, sauf l'armée

Pour Aaron Belkin, directeur du Palm Center, un groupe de réflexion en Californie, Barack Obama a certes tort de ne pas "laisser mourir" la loi sur le tabou homosexuel mais "a de bonnes raisons pour continuer à faire appel".

"70% de la population est favorable à l'abolition de la loi (...) mais il y a un conflit d'intérêt car l'armée n'en veut pas", explique le spécialiste.

Selon lui, le président américain a passé un accord avec le Pentagone pour préparer l'abrogation de la loi en amont, ce que cette injonction de la justice l'empêche de faire.

"Il y a également un argument juridique selon lequel le ministère de la Justice se doit de défendre la constitutionnalité des lois", a assuré Aaron Belkin.

Parallèlement à la bataille menée devant les tribunaux, le Pentagone avait commencé à se conformer à la décision de la juge Phillips en demandant à ses recruteurs d'examiner les demandes de candidats se présentant comme ouvertement homosexuels.