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Retraites: Nicolas Sarkozy veut passer en force

Le gouvernement a réclamé la procédure du "vote bloqué" pour accélérer la ratification du texte sur la réforme des retraites par le Sénat.
Le gouvernement a réclamé la procédure du "vote bloqué" pour accélérer la ratification du texte.
Le Sénat français devait voter vendredi la très contestée réforme des retraites. Provoquant depuis la rentrée un mouvement massif de manifestations et grèves, et générant d'importantes pénuries de carburant, celle-ci constitue la plus grande crise du mandat de Nicolas Sarkozy.

Le gouvernement comptait sur les vacances de la Toussaint, qui
commençaient vendredi soir, pour affaiblir la mobilisation contre cette
réforme. Les sénateurs devaient adopter le texte en fin de journée.

Le ministre du Travail Eric Woerth a indiqué que le vote final
par le Parlement aurait lieu la semaine prochaine après accord des deux
chambres sur un texte définitif en Commission mixte paritaire (chargée
d'établir un texte commun), qui doit se réunir lundi matin. Le gouvernement
devrait être remanié peu après.

Recours au vote bloqué

Alors que de nombreuses stations-services étaient à sec jeudi, le président Nicolas Sarkozy a tapé du poing sur la table pour accélérer les débats: il a demandé au Sénat de recourir à la procédure dite du "vote bloqué".

Misant sur un essoufflement du mouvement si le texte déjà voté par l'Assemblée nationale est adopté par le Sénat, le gouvernement a demandé aux sénateurs un "vote unique" pour accélérer l'examen des quelque 250 derniers amendements.

Cette procédure, prévue par l'article 44 de la Constitution et qui permet d'écourter les débats, devrait permettre de parvenir à l'adoption avant le week-end.

La colère du PS

Le Parti socialiste dirigé par Martine Aubry est le grand vainqueur de ce second tour. [REUTERS - � Stringer France / Reuters]
Le Parti socialiste dirigé par Martine Aubry est le grand vainqueur de ce second tour. [REUTERS - � Stringer France / Reuters]

"Le débat ne doit pas durer pour durer", a estimé le ministre du Travail, Eric Woerth. Le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, avait aussi pressé le Sénat de voter et de ne pas se "perdre en manoeuvres dilatoires"

Martine Aubry, première secrétaire du parti socialiste (PS, opposition), a de son côté dénoncé "le coup de force permanent de Nicolas Sarkozy". Cette méthode a été dénoncée comme un "coup de force" par les socialistes.

Le président du Sénat, Gérard Larcher (UMP), avait à diverses reprises dit qu'il laisserait "le débat aller à son terme" et affirmé qu'il n'aimait pas "utiliser ce type de procédure".

Deux nouvelles manifestations

Résolus à poursuivre la contestation au-delà du vote du projet par le Sénat attendu cette semaine, les syndicats ont de leur côté décidé de mener deux nouvelles journées d'action le 28 octobre (grèves et manifestations) et le 6 novembre (manifestations seules), a indiqué à l'AFP l'un des participants à une réunion intersyndicale.

"Fortes du soutien des salariés, des jeunes et d'une majorité de la population et face à une attitude intransigeante du gouvernement et du chef de l'Etat, les organisations syndicales décident de continuer et d'élargir la mobilisation", ont-ils indiqué.

Les syndicats souhaitent maintenir la mobilisation dans la rue, qui atteint depuis plusieurs semaines des niveaux élevés, voire record. Mardi, entre 1,1 et 3,5 millions de personnes (selon les sources) ont défilé pour la sixième fois depuis la rentrée.

Jeunes encore au front

A la veille des vacances de la Toussaint, des milliers de lycéens et étudiants ont encore manifesté et plus de 300 lycées étaient "perturbés" (environ 7 % des établissements) ainsi qu'une dizaine d'universités (sur 83).

Les cheminots ont manifesté ce jeudi devant le siège de l'UMP. [Reuters - � Gonzalo Fuentes / Reuters]
Les cheminots ont manifesté ce jeudi devant le siège de l'UMP. [Reuters - � Gonzalo Fuentes / Reuters]

Des incidents ont à nouveau eu lieu à Lyon, avec dégradations et jets de projectiles des jeunes sur les forces de l'ordre qui ont riposté à coups de grenades lacrymogènes. Echauffourées et bousculades sont intervenues sur l'île de Corse (sud) ou à Poitiers (centre-ouest). Des ponts ou des routes ont été bloqués.

Le président Nicolas Sarkozy a prévenu que "les casseurs n'auront pas le dernier mot". Depuis le 12 octobre, 2257 personnes ont été interpellées en France pour des violences en marge du mouvement, dont 266 jeudi, selon le ministère de l'Intérieur.

Cheminots devant l'UMP

Dans les transports, le trafic ferroviaire restait perturbé mais moins que la semaine dernière. Les liaisons au départ ou vers la Suisse étaient toutefois perturbées de manière comparable aux jours précédents. Une grosse centaine de cheminots ont manifesté près du siège de l'UMP à Paris.

La réforme des retraites disputée prévoit de reculer l'âge minimal de départ à la retraite de 60 à 62 ans.

agences/bri/os

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Les Français soutiennent la mobilisation

La pénurie de carburant et les violences en marge des manifestations de lycées ne minent le soutien au mouvement de protestation contre la réforme des retraites en France. Plus de deux Français sur trois approuvent la mobilisation, selon un sondage BVA diffusé vendredi par la télévision Canal Plus.

Quelque 69% des personnes interrogées sont pour "les grèves et les manifestations" contre le projet de loi, 29% étant d'un avis contraire (2% sans opinion), selon le sondage.

Le soutien au mouvement est quasiment unanime chez les sympathisants de gauche (92%) mais il réunit aussi un tiers (32%) de ceux de droite. La majorité (52%) approuve les grèves dans les transports en commun, en dépit de l'approche des départs de vacances de la Toussaint, mais désapprouve (52%) le blocage par les grévistes des 12 raffineries du pays qui provoque des pénuries de carburant et le ralentissement de certains secteurs de l'économie.

Opération choc de raffineurs en grève

Les grévistes de la raffinerie Total de Donges, dans le nord-ouest de la France, ont réquisitionné vendredi une station-service pour servir usagers prioritaires et quelques particuliers chanceux qui ont pu repartir sans payer leur carburant, a constaté l'AFP.

Cette opération symbolique a eu lieu à une station du groupe pétrolier Total à Trignac, juste après la reconduite de la grève (jusqu'au 29 octobre) à la raffinerie voisine de Donges, arrêtée depuis le 12 octobre dans le cadre de la contestation de la réforme des retraites.

Les grévistes entendaient ainsi protester contre la réquisition et le déblocage vendredi matin par les forces de l'ordre de la raffinerie de Grandpuits, qui dessert la région parisienne. Une intervention considérée par les syndicats comme une atteinte illégale au droit de grève.

Mais, rapidement confrontés au système de sécurité de la station-service qui bloque les pompes quand les clients partent sans payer, les manifestants ont finalement incité les automobilistes à s'acquitter de leur facture.

Vendredi, moins d'un quart des stations-service du pays étaient à sec et le retour à la normale n'est pas prévu avant plusieurs jours, selon le gouvernement.