"Il est mort subitement", a déclaré le médecin de Nestor Kirchner, confirmant que l'homme fort de l'Argentine du début du XXIe siècle avait été victime d'une crise cardiaque et qu'il n'avait pas été possible de le réanimer.
"Nous avons perdu un patriote", a déclaré pour sa part le député du parti au pouvoir et proche de Nestor Kirchner, Juan Carlos Dante Gullo. "J'espère que nous saurons comprendre ce que représente et ce qu'a représenté Nestor Kirchner", a-t-il poursuivi, ajoutant : "Notre douleur est immense".
Hospitalisé d'urgence
Nestor Kirchner avait été hospitalisé d'urgence peu après 08h00 locales (11h00 GMT) dans la journée à El Calafate, en Patagonie (2500 km au sud de Buenos Aires), où il se reposait en famille. Cristina Kirchner l'accompagnait. Député, président du parti péroniste au pouvoir et secrétaire général de l'Union des nations d'Amérique du Sud (Unasur), il avait subi en septembre une intervention pour déboucher une artère. Cette nouvelle intervention, la deuxième de ce genre en sept mois, avait fait planer le doute sur sa candidature présidentielle en 2011.
Il avait été élu en 2003, avec à peine 22% des voix obtenues au premier tour et l'ancien président Carlos Menem (1989-1999), convaincu de perdre au deuxième tour, ayant préféré se désister. Mais Nestor Kirchner s'était rapidement imposé comme le nouvel homme fort du pays grâce au rétablissement spectaculaire de l'économie du pays qui venait de vivre la pire crise de son histoire en 2001-2002.
Argentine prospère sous sa direction
Tout au long de son mandat, l'économie argentine enregistrera une croissance "à la chinoise" d'environ 8% par an, bénéficiant du prix record des matières premières (soja, blé, maïs) dont le pays est un grand exportateur.
Cette manne avait permis en 2005 à Nestor Kirchner de rembourser la dette du pays avec le Fonds monétaire international (FMI) en une seule fois (9,5 milliards de dollars). Cette institution étant extrêmement impopulaire dans le pays, accusée d'être en partie à l'origine du chaos économique et social de 2001, cette décision avait été interprétée comme une affirmation de la souveraineté retrouvée du pays et l'avait rendu très populaire.
Nestor Kirchner a su également faire des droits de l'homme son cheval de bataille, ce qui avait renforcé son "autorité morale". Il avait obtenu dès 2003 de la Cour suprême l'annulation des lois d'amnistie et la réouverture des procès des militaires pour les crimes commis sous la dictature (1976-1983). Cette autorité morale avait été néanmoins écornée par des soupçons d'enrichissement illicite.
Récemment affaibli
Le couple Kirchner a amassé, selon sa propre déclaration patrimoniale, une fortune de 55 millions de pesos (11 millions d'euros), soit une hausse supérieure à 700% depuis l'élection de Nestor Kirchner en 2003. Bien qu'élu député, Nestor Kirchner avait été très affaibli par la défaite de sa liste face à l'opposition aux législatives de juin 2009 et la perte de la majorité de son parti au Congrès.
Tout récemment, son dernier soutien, la Confédération générale du travail (CGT, péroniste), avait été déstabilisée par l'assassinat d'un jeune militant trotskiste. On soupçonne des membres de la CGT d'avoir recruté des hooligans pour tuer ce militant.
afp/mej
Des origines suisses alémaniques
Nestor Kirchner s'est imposé comme l'homme fort de l'Argentine sous sa présidence de 2003 à 2007, puis sous celle de sa femme Cristina Kirchner, qui lui a succédé depuis trois ans à la tête de l'Etat.
Né le 25 février 1950 à Rio Gallegos, dans la province de Santa Cruz (sud), cet avocat de centre-gauche était pourtant méconnu lorsqu'il a remporté l'élection présidentielle de 2003, en bénéficiant du retrait de l'ex-président Carlos Menem (1989-1999), sûr de perdre au second tour.
Fils d'un père descendant d'immigrants suisses allemands (de la région d'Interlaken) et d'une mère chilienne d'origine croate, il avait alors fait valoir son bilan favorable à la tête de cette province riche en pétrole, située aux confins de la Patagonie, dont il a été gouverneur pendant 12 ans.
A la tête du pays, Nestor Kirchner a profité du boom des exportations agricoles pour redresser une économie ravagée par la pire crise de son histoire en 2001-2002.
"Une grande perte pour l'Amérique du Sud"
Le président colombien, Juan Manuel Santos, a estimé mercredi que le décès de l'ancien président argentin Nestor Kirchner était une "grande perte" pour son pays et pour le continent sud-américain.
Nestor Kirchner, qui occupait le poste de secrétaire général de l'Union des nations sud-américaines (Unasur), avait notamment oeuvré en août 2010 en faveur d'un rapprochement entre la Colombie et le Venezuela, après la rupture fin juillet de leurs relations diplomatiques.