Un jeune manifestant a été tué par balles au Cap-Haïtien dans le nord du pays au cours d'affrontements entre les partisans du candidat à la présidence Jude Célestin, soutenu par le pouvoir, et ceux du chanteur populaire Michel Martelly, écarté du second tour, selon des médias locaux.
Mardi soir, avec trois heures de retard, le Conseil électoral a annoncé que le deuxième tour opposerait le 16 janvier l'ex-Première Dame Mirlande Manigat (31% des voix) à Jude Célestin (22%).
Partisans de Martelly en colère
Michel Martelly, arrivé troisième (21%), est le grand perdant du premier tour qui s'était tenu le 28 novembre. Sa troisième position et la faible marge qui le sépare du candidat du pouvoir passe mal chez ses partisans alors que le chanteur avait régulièrement accusé le parti au pouvoir, Inité, de fraude électorale.
Des milliers de personnes ont manifesté dès la nuit dans tout le pays dès l'annonce des résultats préliminaires. La foule en colère a notamment incendié le siège de la coalition gouvernementale sortante, accusée d'avoir truqué les résultats, ont rapporté des témoins.
Empêchés d'approcher du palais présidentiel par des unités antiémeutes, les partisans du chanteur, qui contestent ces résultats, se déplaçaient mercredi dans toute la ville. Certains brandissaient des portraits de Michel Martelly, d'autres, armés de bâtons, frappaient des poubelles ou jetaient des pierres.
Des résultats "incohérents"
Les manifestations semblaient être les plus grosses dans le pays depuis la réélection de René Préval en 2006. Ce dernier a lancé un appel au calme mercredi. "Manifestez, c'est votre droit, mais ne vous attaquez pas aux édifices publics, aux commerces et aux bien privés des gens", a-t-il déclaré sur les ondes de la Radio nationale d'Haïti.
De leur côté, les Etats-Unis se sont dits "préoccupés" mardi soir par les résultats "incohérents" de l'élection présidentielle, selon un communiqué de l'ambassade américaine à Port-au-Prince. "Comme d'autres, le gouvernement des Etats-Unis est préoccupé par l'annonce des résultats préliminaires des élections du 28 novembre par le Conseil électoral provisoire, qui sont incohérents par rapport aux résultats publiés par le Conseil national d'observation des élections", a fait savoir l'ambassade.
Un groupe d'observateurs financé par l'Union européenne avait du reste annoncé lundi que des estimations fondées sur les données recueillies dans 1500 bureaux de vote plaçaient Mirlande Manigat en tête (avec 30% des suffrages) devant Michel Martelly (25%) et Jude Célestin (20%).
Eviter un retour à la violence
De son côté, l'Organisation des Etats américains (OEA) qui mène une mission d'observation du processus électoral en Haïti, a rappelé mardi soir qu'il existait tout une série de "recours possibles" après la publication des résultats du premier tour.
Ce premier tour, marqué par des incidents et des irrégularités qui avaient obligé les autorités à annuler les élections dans 3,5% des bureaux de vote, a donné lieu à une faible participation qui s'élève à 22,87%, loin des 40% espérés par le chef de l'ONU en Haïti le jour du vote. Le deuxième tour se tiendra le 16 janvier.
Le successeur du président René Préval prendra ses fonctions le 7 février. Il prendra la tête d'une administration amputée dans un pays dévasté par le séisme dévastateur du 12 janvier et où une épidémie de choléra a fait 2120 morts depuis la mi-octobre.
Les tensions qui règnent en Haïti rappellent de mauvais souvenirs dans un pays qui a connu instabilité politique et coups d'Etat à répétition dans son histoire récente. Elles marquent une nouvelle épreuve pour une population déjà éreintée cette année par le séisme dévastateur du 12 janvier et l'épidémie de choléra qui a fait plus de 2100 morts depuis la mi-octobre.
afp/ats/sbo
L'armée népalaise dément avoir introduit le choléra en Haïti
L'armée népalaise a fermement condamné mercredi un rapport selon lequel les Casques bleus népalais de la Mission de l'ONU présents en Haïti seraient à l'origine de l'épidémie de choléra qui a fait plus de 2000 morts, affirmant qu'aucune preuve n'étaye ces accusations.
Un porte-parole de l'armée, Ramindra Chhetri, a affirmé que le rapport d'un épidémiologiste envoyé dans ce pays par la France à la demande des Haïtiens, ne contenait aucune preuve de l'implication directe des troupes népalaises. "C'est une conclusion hypothétique et nous condamnons fermement de telles allégations sans faits ni preuves solides".
Les premiers cas sont apparus autour du 15 octobre près de Mirebalais, dans le centre d'Haïti, avant de se multiplier par milliers en quelques jours.
Depuis son apparition, l'épidémie a fait plus de 2000 morts et près de 92'000 cas ont été enregistrés, selon le ministère de la Santé de ce pays déjà dévasté par le tremblement de terre du 12 janvier (plus de 250'000 morts, 1,3 million de sinistrés).