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Elections en Haïti: les manifestations font 4 morts

Un homme brandit une affiche de Michel Martelly, candidat écarté du second tour, lors de manifestations à Petion-ville. [Hector Retamal]
Un homme brandit une affiche de Michel Martelly, candidat écarté du second tour, lors de manifestations à Petion-ville. - [Hector Retamal]
Quatre personnes ont été tuées mercredi en Haïti et plusieurs blessées lors des manifestations violentes qui ont eu lieu après la proclamation des résultats du premier tour de la présidentielle. Suite aux contestations et aux tensions, le Conseil électoral haïtien a annoncé une vérification des procès-verbaux.

Trois jeunes manifestants ont été tués par balles au cours de violents affrontements qui ont éclaté dans la ville des Cayes (sud), à environ 200 km de Port-au-Prince, selon un ancien sénateur, Gabriel Fortuné. Des bureaux de la direction générale des douanes, des impôts, du ministère des Finances et du parquet, ainsi qu'une antenne du Conseil électoral provisoire ont été détruits.

Dans le nord du pays, un jeune manifestant a été tué par balles à Cap-Haïtien au cours d'affrontements entre les partisans du candidat à la présidence Jude Célestin, soutenu par le pouvoir, et ceux de Michel Martelly, écarté du second tour, selon des médias locaux.

L'éviction d'un candidat qui met le feu aux poudres

Mardi, le Conseil électoral a annoncé que le deuxième tour opposerait l'ex-Première Dame Mirlande Manigat (31% des voix) à Jude Célestin (22%). Michel Martelly, arrivé troisième (21%), est le grand perdant du scrutin. Sa troisième place et la faible marge qui le sépare du candidat du pouvoir passent mal chez ses partisans alors que Michel Martelly, un chanteur populaire, avait accusé le parti au pouvoir, Inité, de fraude électorale.

Le quartier général d'Inité a été incendié dans la matinée à Port-au-Prince. Les partisans du chanteur, parfois armés de bâton, ont circulé mercredi dans toute la ville en brandissant son portrait.

Rues de la capitale désertes en soirée

En début de soirée, la situation semblait plus calme dans les rues de la capitale, désertées par les habitants terrés chez eux. Une certaine tension restait toutefois palpable et des routes étaient encore encombrées des vestiges de barricades. Dans une allocution à la radio mercredi, Michel Martelly a dénoncé des résultats "incorrects", assuré ses partisans qu'il serait à leurs côtés "jusqu'à la victoire totale" et rejeté la "violence". Les manifestations semblent être les plus grosses dans le pays depuis la réélection du président René Préval en 2006.

Les tensions qui règnent en Haïti rappellent de mauvais souvenirs dans un pays qui a connu instabilité politique et coups d'Etat à répétition dans son histoire récente. Elles marquent une nouvelle épreuve pour une population déjà éreintée par le séisme dévastateur du 12 janvier et l'épidémie de choléra qui a fait plus de 2100 morts depuis la mi-octobre. Tous les aéroports d'Haïti, dont l'aéroport international de Port-au-Prince, ont été fermés mercredi en raison des manifestations.

La communauté internationale inquiète

Les Etats-Unis se sont dits "préoccupés" par les résultats "incohérents" de l'élection, au regard des chiffres partiels donnés lundi par des observateurs homologués par l'Union européenne qui avaient mis le candidat du pouvoir en troisième position, loin derrière Michel Martelly.

La chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, s'est déclarée "profondèment inquiète" en raison des "informations faisant état de multiples irrégularités" lors du scrutin. Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, s'est lui aussi dit "préoccupé par les allégations de fraude". De son côté Paris a appelé au calme et demandé à ce que les recours soient traités "de manière rigoureuse et transparente" par le Conseil électoral.

afp/ats/jzim

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Résultats réexaminés

Le Conseil électoral provisoire haïtien (CEP) va procéder à une vérification des procès-verbaux de l'élection présidentielle, a-t-il annoncé jeudi dans un communiqué. Les résultats du premier tour avaient été divulgués mardi soir.

"Le CEP décide d'enclencher immédiatement une procédure d'urgence et exceptionnelle de vérification au centre de tabulation des procès-verbaux liés à la présidentielle de 2010", a indiqué le conseil dans un communiqué.

"Ce mécanisme concerne les trois premiers candidats en lice", précise le conseil électoral haïtien.

Selon l'institution électorale, le processus de vérification sera exécuté en présence d'une commission mixte. Elle sera composée du CEP, des candidats à la présidence concernés, des observateurs nationaux et internationaux ainsi que des partenaires de la communauté internationale.

Dans le communiqué publié jeudi, le CEP demande aux trois candidats concernés par l'actuelle crise, Mirlande Manigat, Michel Martelly et Jude Célestin, d'appeler leurs partisans au calme. Il demande également à la police d'assurer la sécurité.

Propagation rapide du choléra

Le choléra se répand vite en Haïti, où tous les départements de l'île sont touchés, indique un rapport des Centres de contrôle des maladies (CDC) basé aux Etats-Unis.

Plus de 2120 personnes sont mortes de la maladie apparue à la mi-octobre, selon les dernières estimations.

Le 3 décembre, un total de 91'770 cas avaient été recensés dans l'île et 43'243 malades hospitalisés. Et la mort intervient dans certains cas deux heures après l'apparition de la maladie, souligne le CDC.

La République dominicaine voisine a également fait état de cas de choléra dans ses deux plus grandes villes, mais ce pays serait mieux à même de contrôler la situation ayant un meilleur accès à l'eau potable.

"L'étendue et le développement de l'épidémie de choléra, combinés au manque d'eau potable et d'infrastructure sanitaire en Haïti, montre que des mesures d'urgence sont nécessaires pour enrayer la transmission du choléra et la mortalité", estime le CDC dans son rapport.