Peu après l'annonce du résultat du vote qui évite au Cavaliere de chuter, une manifestation étudiante a dégénéré. Des manifestants qui avaient tenté en vain de rejoindre la Chambre et le Sénat ont jeté pierres, pavés et oeufs contre les policiers qui ont riposté au gaz lacrymogène et à la matraque. Ces affrontements ont fait une cinquantaine de blessés légers. (voir ci-contre).
La motion de censure a été rejetée par 314 voix contre 311 et deux abstentions, alors que le Cavaliere avait en revanche facilement remporté quelques heures plus tôt un vote de confiance à la Chambre haute par 162 voix favorables sur 308, grâce à l'appui de son allié, la Ligue du Nord.
Cette courte victoire évite au gouvernement Berlusconi de remettre sa démission au président Giorgio Napolitano mais la possibilité d'élections anticipées, au printemps, demeure. Les prochaines législatives sont prévues en 2013.
"Beaucoup plus fort"
"Je vais en Europe beaucoup plus fort", a réagi Silvio Berlusconi en évoquant un sommet européen prévu à Bruxelles, jeudi et vendredi, tout en assurant "avoir été serein, comme toujours", en dépit de l'incertitude qui pesait sur l'issue du vote. Pour le ministre de l'Intérieur, Roberto Maroni, un des poids lourds de la Ligue du Nord, le grand allié de Berlusconi, le chef du gouvernement "doit élargir sa majorité (...) sinon il vaut mieux aller aux urnes" plutôt que de gouverner avec une majorité aussi instable. Son homologue aux Affaires étrangères, Franco Frattini, proche du Cavaliere, a appelé à l'entrée des centristes de l'UDC dans le gouvernement.
Gianfranco Fini, président de la Chambre des députés, qui a rompu avec le Cavaliere depuis cet été et avait appelé ses partisans à voter la censure, a reconnu avoir échoué. "Mais il sera évident dans quelques semaines que Berlusconi ne peut pas dire qu'il a gagné du point de vue politique", a-t-il estimé, à propos de la marge de manoeuvre très étroite du gouvernement.
La réunion à la Chambre des députés a été extrêmement houleuse. Elle a même été brièvement suspendue après un début de rixe entre plusieurs élus de droite en raison de la défection de deux élues pro-Fini qui ont apporté leurs voix à Berlusconi.
Avant le vote, Italo Bocchino, chef de file des députés finiens, avait tenu un discours très sévère envers Silvio Berlusconi, l'accusant "d'avoir trahi la volonté populaire" des électeurs "en expulsant pour crime de lèse-majesté" Gianfranco Fini, son allié depuis 16 ans. "Que vous ayez une voix en plus ou en moins, vous n'êtes plus en mesure de garantir la stabilité du gouvernement", a renchéri Pier Luigi Bersani, chef du Parti démocrate, la principale force d'opposition de gauche.
Gouvernement régulièrement minorisé
Ces dernières semaines, le gouvernement a été mis en minorité à de nombreuses reprises sur des projets de loi, dont la réforme de l'université ou le fédéralisme fiscal. Et Berlusconi a d'autres projets en cours d'élaboration dont une réforme de la justice, controversée, à laquelle il est très attaché.
"Rien ne change, le gouvernement ne s'en sortira pas et la crise n'en est que plus aiguë", a pronostiqué Pier Luigi Bersani, en ajoutant qu'"il y a un pays qui veut changer, qui est fatigué", faisant allusion aux dizaines de milliers de jeunes qui manifestaient dans toute l'Italie contre un projet gouvernemental de réforme des universités.
Pour les commentateurs, le vote du Parlement marquera quoi qu'il en soit la fin d'un chapitre de l'histoire politique de la Péninsule. Pour l'éditorialiste du Corriere della Sera, Massimo Franco, "une certaine droite a pris fin aujourd'hui". Les marchés ont peu réagi à la victoire du chef du gouvernement, à l'exception du groupe de télévision Mediaset, contrôlé par Silvio Berlusconi, dont l'action a fait un bond.
afp/cab
Violentes manifs dans la rue
Lancers de pétards et de pavés, charges de la police et grenades lacrymogènes: de violents heurts ont opposé mardi à Rome des étudiants et des manifestants dénonçant la politique de Silvio Berlusconi aux forces de l'ordre qui avaient quadrillé le centre-ville pendant un vote décisif au parlement.
Au cours de ces scènes de violence, inédites dans le centre historique de la capitale, une cinquantaine de jeunes ont été interpellés. Une quarantaine de manifestants ont été blessés et 22 d'entre eux ont dû être hospitalisés pour des blessures superficielles et des contusions.
De son côté, le ministre de la Défense a fait état de 50 blessés parmi les membres des forces de l'ordre.
Des dizaines de milliers de jeunes - 100'000 selon les organisateurs - avaient commencé à défiler le matin dans le calme contre la politique gouvernementale en matière d'éducation.
A leurs côtés défilaient aussi des chômeurs et habitants de L'Aquila, ville des Abruzzes ravagée par un séisme en avril 2009 (308 morts).
Après le vote remporté au parlement par Silvio Berlusconi, des manifestants se sont déversés dans la via del Corso, artère centrale où les boutiques avaient abaissé leurs rideaux de fer.
De petits groupes se sont affrontés à la police, incendiant des voitures le long du Tibre et à proximité de la place du Peuple, ainsi que plusieurs fourgons de police. Ils s'en sont pris aussi à des autobus et la circulation a été complètement bloquée dans l'après-midi.
Le Corso était jonché de bancs publics arrachés et de pavés utilisés comme armes par les manifestants, ainsi que de poubelles en feu. A la tombée de la nuit, le calme est peu à peu revenu dans les rues de la capitale.
Des rassemblements ont également eu lieu à Milan, où des manifestants sont entrés dans le bâtiment de la Bourse aux cris de "profiteurs !", à Palerme, où des étudiants ont occupé le tarmac de l'aéroport, à Catane où 3000 ont défilé dans le centre, mais aussi à Bari, Cagliari, Gênes, Naples et Turin.