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Attentat d'Alexandrie: condamnation générale

Egypte [Ahmed Youssef]
La tension est restée vive devant l'église copte d'Alexandrie. - [Ahmed Youssef]
L'Egypte a mis en cause samedi des "mains étrangères" dans l'attentat, "probablement" commis par un kamikaze, qui a fait 21 morts et 79 blessés devant une église copte d'Alexandrie. L'acte a eu lieu deux mois après des menaces d'Al-Qaïda contre les coptes. La communauté internationale a fermement condamné cette attaque.

Le président Hosni Moubarak a condamné dans une allocution télévisée un "acte criminel odieux qui a visé la nation, Coptes et musulmans". Il a dénoncé, sans plus de précisions, "l'implication de mains étrangères" dans ce massacre.

La tension reste vive

La tension est restée vive samedi autour de l'église copte visée, dont la façade était maculée de sang. Sourds aux appels au calme, de jeunes manifestants chrétiens ont lancé tout au long de la journée pierres et bouteilles sur les forces anti-émeutes. Celles-ci ont répondu par des tirs de grenades lacrymogènes et de balles en caoutchouc. "Le coeur des Coptes est en feu", "Le sang des Coptes n'est pas bon marché", criaient-ils.

Le patriarche de l'Eglise copte, Chenouda III, a demandé que les auteurs de l'attaque soient rapidement arrêtés et jugés. Il a qualifié l'attentat d'acte "terroriste" et "lâche" "visant à déstabiliser le pays".

L'ombre d'Al-Qaïda

L'attaque s'est produite peu après minuit, devant l'église des Saints (Al-Qiddissine) de la deuxième ville d'Egypte. Des fidèles commençaient tout juste à sortir du bâtiment après une messe de Nouvel An. L'hypothèse d'une voiture piégée, initialement mentionnée par les autorités, a été écartée par le ministère de l'Intérieur. Selon lui, le massacre a "probablement" été perpétré par un kamikaze. La bombe, de fabrication locale, contenait des bouts de métal "pour atteindre le plus grand nombre" de personnes, a-t-il précisé.

Les circonstances de l'explosion, "au vu des méthodes dominant actuellement les activités terroristes au niveau mondial et régional, indiquent clairement que des éléments extérieurs ont planifié et suivi la mise en oeuvre" de l'attentat, a-t-il déclaré. Cette formulation semble évoquer les méthodes employées par Al-Qaïda, en Irak notamment, sans toutefois le dire explicitement.

Des menaces

Les Coptes d'Egypte se trouvent régulièrement pris dans des violences à caractère inter-confessionnel. Elles n'avaient toutefois encore jamais pris la forme d'un attentat suicide.

L'attaque, non revendiquée, survient deux mois après des menaces contre les Coptes proférées par une branche irakienne d'Al-Qaïda. Elle les accuse de séquestrer des femmes de prêtres coptes orthodoxes qui se seraient converties à l'islam.

Ce groupe irakien avait revendiqué l'attentat du 31 octobre contre une cathédrale de Bagdad. Cet acte terroriste avait causé la mort de 46 civils, sept membres des forces de sécurité et les cinq assaillants.

Condamnation générale

Ahmed al-Tayyeb, le grand imam d'Al-Azhar, la grande institution de l'islam sunnite basée au Caire, a dénoncé un "acte atroce interdit par l'islam". De leur côté les Frères musulmans ont condamné "un crime abject", évoquant des "complots" visant à diviser chrétiens et musulmans d'Egypte.

Le président américain Barack Obama a dénoncé "des actes terroristes odieux" et proposé l'aide des Etats-Unis. Son homologue français Nicolas Sarkozy a quant à lui exprimé sa "consternation", tandis que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'est dit "profondément choqué".

La voiture piégée a explosé alors qu'une foule de chrétiens assistaient à une messe. [REUTERS - Stringer]
La voiture piégée a explosé alors qu'une foule de chrétiens assistaient à une messe. [REUTERS - Stringer]

A Rome, le pape Benoît XVI a dénoncé les "tensions menaçantes du moment". Il a appelé les dirigeants du monde à défendre les chrétiens contre l'intolérance religieuse.

De nombreuses autres personnalités religieuses, ainsi que plusieurs capitales, dont Rome, Londres, Damas, Riyad ou Téhéran, ont aussi condamné l'attentat. Le mouvement islamiste palestinien Hamas s'est joint aux condamnations.

Condoléances de Moubarak refusées

En soirée, au moins 5000 personnes ont assisté aux funérailles des victimes de l'église copte. Les funérailles ont eu lieu au monastère Marmina à King Mariout, une banlieue située à une trentaine de kilomètres d'Alexandrie. La foule scandait des slogans dont notamment "O croix, nous nous sacrifions pour toi par notre âme et notre sang" et a refusé d'accepter les condoléances du président égyptien Hosni Moubarak. "Non, non, non", ont crié les fidèles coptes interrompant, à plusieurs reprises, le secrétaire du pape copte Chénouda III, l'évêque Youanes lorsqu'il a voulu transmettre les condoléances du chef d'Etat.

Les Coptes, la plus importante communauté chrétienne du Moyen-Orient, représentent 6 à 10% des 80 millions d'Egyptiens, en grande majorité musulmans sunnites. Peu représentés au Parlement, ils s'estiment tenus à l'écart de nombreux postes de la justice, des universités ou encore de la police.

ats/cer

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Les coptes se sentent menacés

Les coptes, la plus importante communauté chrétienne du Moyen-Orient, représentent 6 à 10% des 80 millions d'Egyptiens, en grande majorité musulmans sunnites. Peu représentés au Parlement, ils s'estiment tenus à l'écart de nombreux postes de la justice, des universités ou encore de la police.

Ils se trouvent régulièrement pris dans des violences à caractère inter-confessionnel, qui n'avaient toutefois encore jamais pris la forme d'un attentat-suicide.

Le 6 janvier 2010, six Coptes avaient été tués par des hommes armés à la sortie d'une messe en Haute-Egypte, à la veille du Noël copte. Le verdict dans cette affaire est attendu le 16 janvier.