"J'ai décidé de charger le vice-président de certains pouvoirs du président de façon constitutionnelle", a déclaré Hosni Moubarak lors de son intervention à la télévision. Le président égyptien a ajouté que ce transfert de pouvoirs prouverait qu'il serait répondu par le dialogue aux revendications des manifestants qui réclament son départ.
La colère place Tahrir
La transition du pouvoir va "d'aujourd'hui à septembre", a déclaré Hosni Moubarak en référence à la date de l'élection présidentielle à laquelle il a promis de ne pas se présenter. Le président égyptien a encore dit vouloir être "enterré en Egypte". S'adressant aux manifestants, il leur a assuré que "le sang de vos martyrs n'a pas été versé en vain".
Ce qui n'a semble-t-il pas calmé la colère des milliers de personnes rassemblées sur la place Tahrir, dans le centre du Caire. Nombre d'entre elles ont brandi des chaussures afin de manifester leur mécontentement en entendant le discours du raïs. Elles ont aussi scandé "à bas, à bas Hosni Moubarak" et "dégage, dégage".
Des manifestants appelaient à une grève générale et demandaient à l'armée, largement déployée autour de la place de les rejoindre dans la révolte: "Armée égyptienne, le choix est maintenant le régime ou le peuple"! criaient-ils. Intervenant à la télévision peu après Hosni Moubarak, Omar Souleimane a appelé les manifestants à rentrer chez eux.
Rumeurs insistantes
Tout au cours de la journée, les spéculations sur un éventuel départ du raïs sont allées bon train. L'armée a annoncé qu'elle examinait les "mesures" nécessaires "pour préserver la nation" et pour "répondre aux demandes" des manifestants rassemblés depuis le 25 janvier place Tahrir, épicentre de la contestation.
Un officier supérieur, Hassan al Roweny, s'est rendu sur la place et a solennellement déclaré aux manifestants que tout ce qu'ils souhaitaient allait "se réaliser." Il a été acclamé aux cris de "Le régime est tombé!", a rapporté un journaliste de Reuters sur place.
Avant le discours d'Hosni Moubarak, le président américain Barack Obama a déclaré que Washington appuierait une transition "ordonnée et réelle" en Egypte. "Ce qui est absolument clair, c'est que nous assistons au déroulement de l'histoire. C'est un moment de transformation qui a lieu parce que le peuple de l'Egypte appelle un changement", a dit Barack Obama. "Nous voulons que (...) tous les Egyptiens sachent que l'Amérique continuera à faire tout ce que nous pouvons pour soutenir une transition ordonnée et réelle en Egypte", a-t-il dit.
Le casse-tête américain
Peu après le discours de Hosni Moubarak, Barack Obama a réuni son équipe de sécurité nationale. L'évolution en Egypte est une affaire délicate pour l'administration Obama. Elle a exprimé son soutien aux aspirations démocratiques des manifestants anti-Moubarak et incité le gouvernement du Caire à opérer des changements substantiels, mais en soulignant les risques de chaos qui découleraient d'un virage.
De son côté, l'Union européenne s'est dite prête à "aider à construire (une) profonde démocratie" en Egypte, a déclaré sa cheffe de la diplomatie, Catherine Ashton. Elle a indiqué avoir parlé dans la journée avec le ministre égyptien des Affaires étrangères Aboul Gheit sur le rôle de l'UE dans les événements qui secouent l'Egypte.
La contestation emmenée par des jeunes et lancée sur Internet le 25 janvier, dans le sillage du renversement du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali par la rue à la mi-janvier, a connu une accélération avec une manifestation monstre d'au moins 250'000 personnes sur la place Tahrir mardi et l'éclatement de nombreuses grèves à travers le pays.
agences/cer