Des militaires étaient déployés vendredi matin dans la deuxième ville de Libye, Benghazi. Des milliers de personnes y sont descendues dans la rue au cours de la nuit pour protester contre la répression meurtrière de manifestations antigouvernementales.
Un habitant vivant sur la principale artère de Benghazi, bastion de l'opposition, a déclaré vendredi matin à Reuters que la nuit avait été très difficile. " Il y avait beaucoup de monde dans les rues, des milliers de personnes".
Citant un témoin, la BBC-radio indique que des heurts se sont produits entre les manifestants de Benghazi et les forces de sécurité, qui ont tiré à balles réelles. Des médecins ont dénombré dix tués dans cette ville de plus de 700'000 habitants, située à un millier de kilomètres à l'est de la capitale Tripoli.
Un habitant a en outre indiqué que l'homme d'affaires Saadi Kadhafi, l'un des fils du numéro un, avait déclaré à la radio libyenne qu'il allait se rendre à Benghazi pour y assumer la fonction de maire et assurer la protection de la population.
Manifestations à Al Baïda
Un autre habitant dit avoir été en contact avec des habitants d'Al Baïda, une ville voisine. Il a déclaré à Reuters: "La confrontation entre manifestants et partisans de (Mouamar) Kadhafi (le numéro un libyen) se poursuit, et certains policiers sont devenus agressifs(...). Il y a beaucoup de morts". Des sources locales avaient fait état à Reuters, un peu plus tôt, d'au moins cinq morts à Al Baïda, où les liaisons téléphoniques avaient été coupées jeudi soir et où les journalistes étaient empêchés de se rendre.
A Tripoli, ce sont des partisans du régime Kadhafi, qui étaient dans les rues vendredi matin, selon la chaîne CNN.
Jeudi, des centaines de manifestants ont défilé à Al Baïda, Benghazi, Zenten, Derna et Ajdabiya. Les obsèques des personnes tuées (lire ci-contre) devraient avoir lieu ce vendredi et risquent de catalyser un peu plus le mécontentement.
Plus de 20 morts en deux jours
Etant donné le contrôle étroit exercé sur les médias et les moyens de communication en Libye, il est difficile de se faire une idée précise des violences qui ont eu lieu jeudi et les jours précédants, mais des informations non corroborées ont fait état sur les réseaux sociaux d'internet de 50 morts.
L'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW) indique que selon ses propres sources en Libye, les forces de sécurité ont tué au moins 24 personnes lors de leurs interventions contre les manifestants mercredi et jeudi.
Les pires violences ont eu lieu à Al Baïda (est). Jeudi vers 13H00, le personnel de l'hôpital a réclamé du matériel supplémentaire, se disant dépassé par l'afflux de 70 manifestants blessés, dont la moitié dans un état critique à cause de blessures par balles, ajouté l'ONG. Selon un manifestant, les forces de sécurité et des hommes armés en civil ont tiré à balles réelles sur les protestataires.
A Benghazi, un manifestant a rapporté que des hommes en civil armés de couteaux se sont joints aux forces de sécurité pour charger des centaines de manifestants, parmi lesquels de nombreux avocats, qui réclamaient une Constitution. Durant la nuit de jeudi à vendredi, 10 personnes ont été tuées, selon un décompte de médecins.
ats/bri
Ailleurs dans le monde arabe
En Egypte, plusieurs milliers de personnes agitant des drapeaux égyptiens ont commencé à se rassembler vendredi sur la grande place Tahrir du Caire, pour célébrer la fin du règne de Hosni Moubarak, après 30 ans de pouvoir sans partage.
Au Bahreïn, des milliers de personnes participaient vendredi dans la banlieue est de Manama aux obsèques de deux chiites tués la veille dans un raid sanglant des forces de sécurité contre un sit-in de protestation antigouvernementale.
Au Yémen, trois personnes ont été tuées et 19 blessées par balles lors de violents heurts nocturnes entre la police et des centaines de manifestants hostiles au régime à Aden, principale ville du sud du Yémen. Des devantures de magasins ont été cassées, des pneus incendiés et des rues bloquées par des tonneaux.