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Mouammar Kadhafi ne partira qu'"en martyr"

Pour Mouammar Kadhafi, la place de "Guide de la révolution" n'est pas un poste que l'on peut abandonner.
Pour Mouammar Kadhafi, la place de "Guide de la révolution" n'est pas un poste que l'on peut abandonner.
Les violences continuent en Libye où le peuple réclame le départ du colonel Mouammar Kadhafi. Ce dernier, dans une allocution télévisée en direct, a fermement refusé de céder à la pression de la rue.

"Mouammar Kadhafi n'a pas de poste officiel pour qu'il en démissionne. Mouammar Kadhafi est le chef de la révolution, synonyme de sacrifices jusqu'à la fin des jours. C'est mon pays, celui de mes parents et des ancêtres", a martelé le Guide de la révolution en guise de rejet des appels à son départ du pouvoir.

Promesses de répression sanglante

Il a également promis de combattre les manifestations qui réclament son départ du pouvoir et de mourir en "martyr", criant et tapant du poing lors d'un discours plein de colère diffusé mardi par la télévision d'Etat libyenne.

Promettant de se battre "jusqu'à la dernière goutte" de son sang, il a appelé la police et l'armée à reprendre la situation en mains et assuré que tout manifestant armé méritait la "peine de mort", avant d'estimer que le régime "n'avait pas encore fait usage de la force".

"Rendez vos armes immédiatement, sinon il y aura des boucheries", a-t-il lancé évoquant une riposte "similaire à Tienanmen", en référence à la répression militaire du "Printemps de Pékin" en juin 1989 qui avait fait des centaines, voire des milliers de morts, selon les sources.

Il s'exprimait depuis un pupitre installé dans un bâtiment éventré qui semble être son ancienne résidence à Tripoli, bombardée par les Etats-Unis dans les années 1980 et laissée depuis telle quelle en signe de défiance.

Le colonel Kadhafi est arrivé au pouvoir après avoir renversé le 1er septembre 1969 le roi Idriss. En 1977, il avait proclamé la "Jamahiriya" -qu'il définit comme un "Etat des masses" qui gouvernent par le biais de comités populaires élus- s'attribuant le seul titre de "Guide de la révolution".

"Bain de sang" à Tripoli, bombardements à Benghazi

02-22, libye3, reu.jpg [REUTERS - STR]
02-22, libye3, reu.jpg [REUTERS - STR]

Mardi matin, les milices pro-Kadhafi circulaient dans Tripoli, appelant par haut-parleurs les quelque deux millions d'habitants à rester chez eux. Dans le camp des opposants, la tendance était toujours à la mobilisation, notamment sur la place Verte. Mais des témoins dans plusieurs quartiers rapportaient que les milices pro-gouvernementales semaient la terreur en mitraillant des maisons pour terrifier la population. Quant aux informations en provenance de Libye, elles restent fragmentaires et les liaisons - téléphoniques notamment - des plus aléatoires.

Reste que les témoignages semblent confirmer l'état de tension qui règne sur place. Des Jordaniens ayant fui la Libye ont fait état d'un "bain de sang" à Tripoli et de la présence en ville d'hommes armés venus d'autres pays d'Afrique pour semer la terreur.

Les combats auraient cependant cessé dans la deuxième ville du pays, Benghazi, foyer de la contestation, désormais aux mains des insurgés. Mais les habitants craignaient des bombardements aériens.

Les Européens rapatriés, les Suisses dans l'inconnue

Ce climat d'insécurité qui pousse les pays européens à rappeler leurs ressortissants résidants en Libye. Lundi soir, l'armée autrichienne a été la première à organiser un vol au départ de Tripoli à destination de Malte. Mardi, ont suivi le Portugal, l'Italie, la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Ukraine ou encore la Grèce.

La Suisse, pour sa part, n'entend pas procéder à une telle opération d'évacuation. Ce scénario n'est toutefois pas écarté "en cas de forte dégradation de la situation sécuritaire" dans le pays. Pour l'heure, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) conseille aux Suisses de ne pas se rendre en Libye et à ceux qui résident dans le pays de s'en aller, "pour autant que cela soit possible et sûr".

Quarante-six Suisses - dont 40 double-nationaux - sont immatriculés à l'ambassade de Suisse à Tripoli, qui est en contact constant avec eux. Le DFAE ne dispose d'aucune information selon laquelle ils auraient été touchés par les violences.

"Génocide"

La communauté internationale a réagi aux violences perpétrées par le gouvernement libyen contre son propre peuple. Le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir ce mardi pour discuter de la crise en Libye, a déclaré le secrétaire général de l'organisation, Ban Ki-moon. Ce dernier a précisé qu'il avait parlé avec le Mouammar Kadhafi. "Je l'ai exhorté à respecter totalement les droits de l'homme, la liberté de rassemblement et de parole", a-t-il confié.

Des diplomates libyens commencent à leur tour à "lâcher" le colonel Kadhafi, en démissionnant par exemple L'ambassadeur adjoint de la Libye à l'ONU a même déclaré que le leader était coupable de "génocide" contre son propre peuple et devait "partir le plus vite possible".

agences/vkiss/jeh

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Un premier bilan officiel de 300 morts

 Les violences qui ont accompagné la révolte contre le régime libyen ont fait 300 morts - 242 civils et 58 militaires -, selon un tableau présenté mardi soir avant une conférence de presse de Seif al-Islam Kadhaf, fils et successeur pressenti du Guide de la révolutioni.

Près de la moitié des victimes ont été recensées à Benghazi, deuxième ville du pays à 1000 km à l'est de Tripoli et foyer de l'insurrection.

Il s'agit des premiers chiffres officiels sur les victimes de la révolte populaire.