Après un calme précaire mercredi dans matinée dans le quartier pro-Ouattara d'Abobo, symbole de la crise née du scrutin de novembre et théâtre de scènes de guerre la veille, de violents échanges de tirs, certains "à l'arme lourde", étaient entendus dans l'après-midi.
Les Forces de défense et de sécurité (FDS), loyales à Laurent Gbagbo, avaient elles déployé auparavant deux blindés et barraient l'accès à certains secteurs, tandis que de nombreuses rues étaient désertes et des commerces fermés. Dans ce secteur, plusieurs dizaines d'habitants, femmes et enfants surtout, longeaient les routes pour fuir le quartier, par crainte d'une reprise des violences. "Depuis hier (mardi), les assaillants ont pris le coin, ils ont tué des 'corps habillés' (hommes en uniforme). Je quitte la zone", a dit une dame, baluchon sur la tête.
Une dizaine de morts mardi
Mardi soir, des FDS et des hommes armés non identifiés se sont livrés à des "combats à l'arme lourde", ont rapporté des habitants. Selon une source sécuritaire, le Centre de commandement des opérations de sécurité (CECOS), une unité d'élite, a perdu une dizaine d'éléments dans ces violents combats après une embuscade, les occupants de quatre de ses véhicules ayant été "tous tués".
Des témoins ont fait état d'un bilan encore plus lourd côté Cecos, et de plusieurs victimes civiles. Le corps d'un civil tué par balles gisait dans une mare de sang dans la matinée près d'une station-service. Un haut responsable du CECOS a toutefois assuré mercredi matin à l'AFP que cette unité avait perdu seulement trois hommes, déploré "sept blessés par balles" en son sein et tué "sept assaillants".
Accusations et récusations
Le gouvernement Gbagbo accuse les "rebelles" d'opérer dans ce quartier où, avant les combats de mardi, au moins une dizaine de FDS avaient été tués depuis janvier. Le camp Ouattara, allié à l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) contrôlant le nord ivoirien depuis 2002, récuse son implication dans ces actions, où la presse locale voit l'oeuvre d'un "commando invisible".
Inspirés par les exemples égyptien et tunisien, les partisans d'Alassane Ouattara ont fait monter la pression la semaine dernière en appelant à une "révolution" pour chasser le sortant. Depuis samedi, au moins une dizaine de manifestants pro-Ouattara ont été tués par les FDS qui ont dispersé la foule en tirant à balles réelles, selon des sources concordantes, à Abobo mais aussi dans les quartiers de Koumassi et Treichville (sud). Les violences post-électorales ont fait plus de 300 morts depuis la mi-décembre selon l'ONU.
Efforts diplomatiques
Ce regain de tension survient alors que l'Union africaine (UA) déploie de nouveaux efforts pour une issue à la crise, pour l'heure introuvable. Lundi et mardi, quatre présidents africains d'un groupe désigné par l'UA ont rencontré Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara. Objectif: arriver d'ici au 28 février à des solutions "contraignantes". Les membres de ce groupe, présidé par le Mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, ont commencé mardi soir à quitter le pays et se retrouveront à Nouakchott "dans les prochains jours".
L'UA privilégie un règlement pacifique, mais l'ex-médiateur Raila Odinga, premier ministre kényan, a jugé que si les sanctions économiques n'aboutissent pas à "un changement de régime, alors bien sûr la force sera utilisée". La Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) en a brandi la menace pour déloger Laurent Gbagbo du palais présidentiel.
ats/afp/hof