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Nouveau jour de la colère dans le monde arabe

Des dizaines de milliers de Tunisiens ont manifesté près des bureaux du Premier ministre. [AP Photo/Salah Habibi]
Des dizaines de milliers de Tunisiens ont manifesté près des bureaux du Premier ministre. - [AP Photo/Salah Habibi]
La vague de contestation qui déferle sur le monde arabe a encore grossi vendredi: à Tunis, une marée humaine a réclamé le départ du gouvernement transitoire, alors que les Egyptiens formulaient la même exigence. En Irak et en Jordanie, des milliers de personnes ont exprimé leur "colère".

Plus de 100'000 Tunisiens, selon la police, ont réclamé le départ du gouvernement de Mohammed Ghannouchi, devant la Kasbah de Tunis, épicentre de la contestation. Selon des membres du Croissant-Rouge et des manifestants, il "s'agit de la plus grande manifestation depuis la chute de Ben Ali" le 14 janvier.

Des manifestants scandaient "Ghannouchi dégage", "Honte à ce gouvernement". En début de soirée, le gouvernement transitoire a annoncé que des élections se tiendront au plus tard mi-juillet de cette année.

Des incidents ont éclaté en soirée. Des rafales d'armes automatiques ont été entendues dans le centre de Tunis, près de l'avenue Bourguiba, alors que plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées devant le ministère de l'Intérieur et refusaient de se disperser. Dans un climat chaotique, des soldats et des policiers pourchassaient des manifestants qui leur jetaient des projectiles, au milieu de fortes détonations.

Des policiers ont procédé à de nombreuses arrestations, parfois musclées, alors que le centre ville était toujours survolé par des hélicoptères Auparavant, la police avait procédé à des tirs de sommation et de grenades lacrymogène.

Les manifestants égyptiens n'ont pas manqué de marquer leur soutien au peuple libyen. [KEYSTONE - AP Photo/Kevin Frayer]
Les manifestants égyptiens n'ont pas manqué de marquer leur soutien au peuple libyen. [KEYSTONE - AP Photo/Kevin Frayer]

En Egypte, des milliers de personnes se sont rassemblés place Tahrir, au Caire, pour célébrer la "révolution" mais aussi réclamer un gouvernement de technocrates, quinze jours après le départ sous la pression populaire du président Hosni Moubarak. Plusieurs milliers de personnes se sont réunies dans une ambiance de fête sur cette place devenue le symbole de la révolte.

"Le gouvernement de Chafic est inféodé au régime corrompu", proclamait une pancarte, tandis que des manifestants exigeaient le départ du premier ministre Ahmad Chafic et de son gouvernement et leur remplacement par des technocrates.

L'Irak n'a pas fait exception. De Kirkouk, dans le nord, à Bassorah, dans le Sud, des milliers d'Irakiens sont descendus dans les rues, à l'occasion d'une "journée de la colère", pour dénoncer la corruption et l'état déplorable des services de base dans le pays. Il y a eu cinq morts dans la ville septentrionale de Mossoul, à 350 km de Bagdad, deux à Hawija, dans la riche province pétrolière de Kirkouk, un à Samarra, dans le centre du pays et un à Calar, une localité kurde dans la province de Diyala.

Quelque 5000 manifestants étaient rassemblés place Tahrir à Bagdad. Certains ont jeté des pierres, des chaussures et bouteilles en plastique vides sur les forces anti-émeutes bloquant le pont. La majorité des organisateurs ont insisté sur leurs seules revendications de "réformes". "Il ne s'agit pas de faire tomber le gouvernement", ont-ils souligné.

Amman a vécu la plus grande manifestation depuis le déclenchement du mouvement de contestation en janvier. [KEYSTONE - AP Photo/Nader Daoud]
Amman a vécu la plus grande manifestation depuis le déclenchement du mouvement de contestation en janvier. [KEYSTONE - AP Photo/Nader Daoud]

Des milliers de personnes ont manifesté vendredi à Amman, en Jordanie, pour "des réformes constitutionnelles", soit le plus grand rassemblement dans la capitale depuis le déclenchement du mouvement de contestation en Jordanie en janvier.

"Toute la Jordanie veut des réformes constitutionnelles urgentes, un gouvernement parlementaire et un vrai parlement représentatif du peuple", a déclaré cheikh Hamzeh Mansour, chef du Front de l'action islamique (FAI) principal parti d'opposition et émanation des Frères musulmans. "Nous voulons des réformes, une vraie monarchie parlementaire", a indiqué de son côté un syndicaliste, Maissara Malass.

Le Yémen a aussi connu des marches massives voulues comme "le début de la fin" du régime du président Ali Abdallah Saleh. Deux défilés séparés ont dégénéré à Aden, au sud, faisant un mort et une vingtaine de blessés. Les organisateurs ont affirmé avoir réuni 100'000 manifestants dans la capitale Sanaa et plusieurs centaines de milliers à Taez, également au sud du pays.

L'imam Abdallah Saatar a affirmé dans son sermon à Sanaa que "la chute du régime était la seule sortie à la situation actuelle". "Pars, pars", ont scandé pour leur part les manifestants à l'intention du président Saleh.

Dans la petite île de Bahrein, des cortèges de manifestants ont envahi les rues de la capitale Manama, à l'appel de religieux chiites, et exigé de nouveau des réformes politiques dans le petit royaume, au douzième jour d'une contestation qui ne faiblit pas. Cette forte mobilisation est intervenue alors que les Etats-Unis ont renouvelé leur soutien à la monarchie et au dialogue national proposé à l'opposition. Aucune estimation officielle de la mobilisation de vendredi, jour de prières, n'était disponible mais les voies conduisant à la place de la Perle, épicentre de la contestation, ont été bloquées par des dizaines de milliers de protestataires.

ats/cab

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