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Berlusconi restreint le pouvoir des juges

Silvio Berlusconi a tenu à illustrer lui-même sa réforme en brandissant en conférence de presse un dessin représentant deux balances de justice. [Ettore Ferrari]
Silvio Berlusconi a tenu à illustrer lui-même sa réforme en brandissant un dessin représentant deux balances de justice. - [Ettore Ferrari]
Empêtré dans ses ennuis judiciaires, Silvio Berlusconi a fait adopter jeudi par son gouvernement un projet de réforme constitutionnelle de la justice italienne restreignant les prérogatives des magistrats, que le Cavaliere accuse de s'acharner contre lui.

Les points saillants de la réforme de la justice italienne proposée par le Cavaliere sont la séparation nette des carrières entre magistrats du parquet et magistrats du siège, l'instauration de la responsabilité civile des juges, qui pourront être amenés à payer de leur poche des dommages-intérêts en cas d'erreur, et la limitation de l'action pénale du parquet.

En outre, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) sera divisé en deux organes, réduits à des entités administratives (embauches, transferts, promotions). "Un corps unique est démembré en deux parties", a expliqué Franco Pavoncello, professeur de sciences politiques à l'université américaine John Cabot de Rome, pour souligner l'affaiblissement des juges.

Epée de Damoclès

Si les magistrats du siège restent un "ordre autonome et indépendant de tout pouvoir", ceux du parquet seront en revanche cantonnés au sein d'un "département". Autre restriction imposée au parquet: il ne pourra plus faire appel des jugements en cas de relaxe de l'accusé.

En outre, les juges seront "directement responsables des actes accomplis en violation des droits". "Avec cette épée de Damoclès sur la tête, les procureurs y regarderont à deux fois avant d'ouvrir des enquêtes contre moi", a commenté le Cavaliere, selon des propos rapportés jeudi par La Repubblica.

L'Association nationale des magistrats (ANM) a dénoncé, par la voix de son président Luca Palamara, "une réforme contre les juges (...) qui mine l'autonomie et l'indépendance de la magistrature et altère sensiblement l'équilibre entre les pouvoirs".

Balance équilibrée

Silvio Berlusconi a tenu à illustrer lui-même sa réforme "historique et convaincante" en brandissant en conférence de presse un dessin représentant deux balances de justice: l'une déséquilibrée correspondant à la situation actuelle et une autre parfaitement équilibrée censée représenter celle issue de la réforme.

Cependant, même au cas où ce texte serait adopté par le Parlement, où sa majorité est plus ténue depuis sa rupture avec le président de la Chambre Gianfranco Fini, il devra encore faire l'objet d'un référendum.

"Cette réforme verra le jour à la fin de la législature" en 2013, a reconnu le ministre de la Justice Angelino Alfano. Franco Pavoncello est encore plus prudent: il faudrait que "le gouvernement arrive à son terme", note-t-il, tout en mettant l'accent sur "la dynamique imprévisible (qui) sera enclenchée avec le début le 6 avril du procès de Berlusconi pour le "Rubygate".

afp/jbu

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Revers de médaille

Silvio Berlusconi devra faire face le 6 avril au procès du "Rubygate".

Le Caveliere, 74 ans, est accusé d'avoir payé les prestations sexuelles de la Marocaine Karima El Mahroug, alias Ruby, alors qu'elle n'avait pas atteint ses 18 ans.

Pour le professeur Franco Pavoncello, lancer cette réforme dans ce contexte est pour Berlusconi "une arme à double-tranchant: il peut arguer que les juges s'acharnent contre lui alors que lui cherche à réformer la justice, donnant ainsi un caractère politique à son procès".

"Mais le revers de la médaille est que la réforme est affaiblie par le fait qu'elle est conduite par un gouvernement dont le Premier ministre est sur le point d'être jugé", conclut-il.

D'autant que le "Rubygate" n'est pas la seule casserole judiciaire traînée par le chef du gouvernement. Il est accusé dans d'autres affaires de fraude fiscale, faux en bilan...

Ce vendredi, il est convoqué à Milan dans un procès pour corruption de témoin. Mais le Cavaliere ne s'y rendra pas : il sera à Bruxelles pour le sommet extraordinaire de l'UE sur la Libye.