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Offensive en Libye: le flou autour du rôle de l'Otan

Nicolas Sarkozy et Barack Obama ont évoqué le terrorisme, mais aussi les grands défis de l'économie. [KEYSTONE - Ian Langsdon]
Nicolas Sarkozy et Barack Obama se sont entretenus mardi. Mais les interprétations diffèrent. - [KEYSTONE - Ian Langsdon]
Paris et Washington ont annoncé mardi soir être parvenus à un accord sur le rôle de l'Otan dans la coalition. Mais tous deux l'ont présenté de façons très différentes. Mardi soir, Mouammar Kadhafi a fait une apparition publique depuis sa résidence de Tripoli, affirmant que son pays était "prêt pour la bataille".

La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a déclaré sur la chaîne ABC que des proches du colonel Kadhafi sont entrés en contact avec des alliés de la Libye pour trouver une porte de sortie au conflit, apprenait-on mardi soir.

Pour la Maison Blanche, les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne sont tombés d'accord pour que l'Otan puisse jouer un "rôle-clé" dans le commandement de l'opération militaire de la coalition internationale en Libye. Une expression que ne reprend pas la présidence française, qui évoque simplement un entretien téléphonique au cours duquel Barack Obama et Nicolas Sarkozy "se sont entendus sur les modalités d'utilisation des structures de commandement de l'Otan en soutien de la coalition".

Une "instance de pilotage politique de l'opération"

Lundi, lors d'une réunion houleuse à l'Otan à Bruxelles, les partenaires de la France avaient insisté pour une implication de l'Alliance atlantique, à laquelle Paris a répondu mardi en proposant à ses alliés "une instance de pilotage politique de l'opération" militaire, au niveau des ministres des Affaires étrangères.

A US Air Force F-15 aircraft flies over Afghan and French soldiers participating in operation Spear Tackle 2 in Surobi district on September 26, 2010. Most of France's 3,500 soldiers, who are part of a NATO-led multinational force fighting the Taliban inside Afghanistan, are based in districts around Kabul. AFP PHOTO/Joel SAGET [AFP - Joël Saget]
Depuis la nuit de lundi à mardi, plus aucun avion de combat américain n'a effectué de sortie. [AFP - Joël Saget]

Depuis le début, Paris insiste pour tenir l'Alliance atlantique à l'écart de l'intervention militaire destinée à mettre en oeuvre la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l'ONU, autorisant le recours à la force en Libye pour protéger les civils de la répression du régime de Mouammar Kadhafi.

Actuellement, les Etats-Unis assurent la coordination des missions aériennes au-dessus de la Libye depuis leur QG en Allemagne. Mais ces derniers, engagés en Irak et en Afghanistan, ont annoncé leur intention de prendre du recul. Des négociations intenses étaient en cours mardi entre Paris, Londres et Washington pour déterminer qui prendrait la direction des opérations, selon des sources concordantes.

Les tirs ont continué mardi soir

Mardi soir, des tirs de la défense anti-aérienne précédés et suivis d'explosions lointaines ont été entendus à Tripoli, selon un journaliste de l'AFP. Sur le terrain, les forces gouvernementales n'ont pas cessé les bombardements, selon les rebelles et des témoins, en dépit de l'annonce par le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi d'un nouveau cessez-le-feu dimanche soir.

A Yefren (130 km au sud-ouest de Tripoli), "les forces de Kadhafi ont entrepris une offensive meurtrière lundi et mardi dans la région. Les combats ont fait au moins 9 morts à Yefren et beaucoup de blessés", a indiqué un habitant. Dans la même région d'Al-Jabal Al-Gharbi, "il y a eu un renversement de situation dans la nuit (de lundi à mardi).

Les forces de Kadhafi, qui tenaient une position à environ 10 km de Zenten et d'où elles bombardaient la ville, ont été contraintes d'abandonner cette position, sous le feu des rebelles", a indiqué un témoin, qui a dit par ailleurs avoir vu "pas mal de corps à la morgue de Zenten", des "victimes côté rebelle des combats des derniers jours". A l'est de Tripoli, cinq personnes, dont quatre enfants, ont été tuées à Misrata, troisième ville du pays (200 km de la capitale), par des tirs de pro-Kadhafi, selon les rebelles.

La veille, 40 personnes y avaient déjà été tuées et plus de 300 blessées. Des chars et des snipers déployés dans la principale artère ont ouvert le feu "aveuglément", selon un porte-parole rebelle.

Première perte de la coalition

"Les deux membres de l'équipage se sont éjectés de leur F-15E lorsque l'avion a connu un problème de dysfonctionnement de son équipement le 21 mars vers 22H30 au-dessus du nord-est de la Libye", a ajouté le commandement américain dans un communiqué (éclairage sur les difficultés rencontrées par les forces de la coalition).

Un missile de la coalition a détruit lundi un bâtiment administratif de Mouammar Kadhafi à Tripoli [KEYSTONE - Stringer]
Un missile de la coalition a détruit lundi un bâtiment administratif de Mouammar Kadhafi à Tripoli [KEYSTONE - Stringer]

Opérations de la coalition

Durant la nuit de lundi à mardi, la coalition internationale s'en est pris à la résidence du colonel Kadhafi à Tripoli et à une base navale. Lundi soir, des tirs de la défense anti-aérienne suivis d'explosions ont retenti à Tripoli près de la résidence du dirigeant libyen, selon un journaliste de l'AFP. La nuit précédente, des missiles avaient détruit un bâtiment au sein de cette résidence-caserne dans le sud de Tripoli.

Une base navale située à 10 km à l'est de Tripoli a été touchée par des bombardements lundi soir, selon des témoins qui ont vu des flammes s'échapper de la base.

Lundi à l'est, les forces gouvernementales libyennes, qui avaient attaqué Benghazi samedi matin, ont reculé lundi jusqu'à Ajdabiya, à 160 km au sud.

Depuis samedi, la coalition a mené des raids sur Tripoli, Zouara, Misrata (ouest), Syrte et a visé lundi Sebha, selon Tripoli. Ces attaques ont fait de "nombreuses victimes" parmi les civils.

Signes de division

Il y aura moins d'attaques de la coalition en Libye dans les tout prochains jours, a déclaré mardi le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates. Entrée en action samedi en vertu de la résolution 1973 de l'ONU adoptée jeudi, la coalition montrait jusqu'ici des signes de division concernant les raids qui ont été menés.

L'opération militaire de la coalition internationale peut même s'arrêter "à tout moment" en Libye si Mouammar Kadhafi se conforme aux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et accepte un cessez-le-feu, a déclaré mardi le chef de la diplomatie française, Alain Juppé. Il faut aussi que "les forces de Kadhafi rentrent dans les casernes et l'opération militaire s'arrêtera".

Le Conseil de sécurité de l'ONU tiendra jeudi une réunion pour débattre de la situation en Libye, mais il ne tiendra pas de réunion extraordinaire pour débattre des raids occidentaux dans ce pays.

agences/mej

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Kadhafi apparaît en public

Mouammar Kadhafi a fait mardi soir une apparition en public dans sa résidence de Bab el-Aziziya à Tripoli, cible dimanche d'un missile de la coalition, a rapporté la télévision nationale libyenne.

Selon la télévision, Mouammar Kadhafi s'est adressé à la foule au cours d'une brève allocution à sa résidence. Il a affirmé que son pays était "prêt pour la bataille, qu'elle soit longue ou courte". "Nous allons gagner cette bataille", a-t-il ajouté. Il a également affirmé que "les masses étaient les plus fortes des défenses anti-aériennes".

Emigrations en masse

Les immigrés africains en Libye continuent de quitter le pays. Selon l'OIM, près de 5000 d'entre eux sont arrivés au Niger ces derniers jours. Au total, en un mois, 328'000 personnes ont fui la Libye dans les pays voisins. Des dizaines de milliers d'autres sont bloqués dans la ville de Sabha, dans le sud de la Libye, en raison du manque de moyens de transport, ont indiqué au personnel de l'OIM ces immigrés arrivés à Dirkou (Niger).

Le Haut Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) a signalé pour sa part que le flux des arrivées à la frontière égyptienne est stable. Environ 3000 sont arrivés dimanche en Egypte, la moitié de Libyens et la moitié d'Egyptiens. Environ un millier de Libyens sont arrivés lundi, selon l'OIM.