Selon un militant syrien des droits de l'homme qui a requis l'anonymat, "dix-sept manifestants ont été tués par des tirs contre un rassemblement de manifestants se dirigeant vers Deraa. Ils ont été visés à Sanamein" 40 km au nord de Deraa. Il n'était pas possible de confirmer ce bilan dans l'immédiat.
Les forces de sécurité auraient aussi tiré sur des manifestants rassemblés dans le centre de Deraa, près de la maison du gouverneur qui avait été limogé. "Il y a eu des victimes", selon la même sources.
Les forces de sécurité ont ouvert le feu lorsque des manifestants ont arraché un portrait du président Bachar el-Assad et voulu déboulonner une statut de son père, l'ancien président Hafez alAssad, selon un militant et témoin.
Des tirs nourris ont été entendus par des correspondants de Reuters sur la place principale de Deraa, où les manifestants scandaient "l'heure de vérité a sonné!" lors des obsèques de 37 personnes tuées durant la seule journée de mercredi.
A Damas aussi
L'annonce du pouvoir prévoyant une possible annulation de l'état d'urgence, des mesures anti-corruption, des libérations d'opposants ainsi qu'une augmentation des salaires des fonctionnaires, ne semble ainsi pas avoir calmé la contestation populaire du régime autoritaire en place depuis 40 ans.
Dans un communiqué sur Facebook, "l'Union de la jeunesse syrienne" a appelé "Bachar al-Assad et les membres de son régime à démissionner" et à la mise en place d'un "gouvernement de transition formé de toutes les composantes du peuple".
Pour cette "Journée de la dignité" lancée sur Facebook, des centaines de personnes ont aussi manifesté à Damas après la prière à la mosquée des Omeyyades. Ils ont défilé en criant "Deraa, c'est la Syrie", "Dieu, la Syrie, la liberté et c'est tout".
Dans la capitale, la police secrète a toutefois dispersé vendredi cette manifestation, qui avait rassemblé quelque 200 personnes dans la vieille ville de la capitale, procédant à des dizaines d'arrestations.
Des milliers de manifestants dans tout le pays
Des manifestations ont eu lieu dans plusieurs autres villes. Dans le Sud, à Daael, à 30 km au nord de Deraa, 300 personnes, portant des drapeaux syriens, ont crié "Daael et Deraa ne se laisseront pas humilier". Selon des associations des droits de l'Homme, 3000 personnes ont manifesté a Banias, au nord-ouest de Damas.
A Hama, ville connue pour la répression sanglante d'un soulèvement islamiste qui avait fait jusqu'à 20'000 morts sous le régime de Hafez al Assad, en 1982, des centaines de personnes ont défilé en signe de soutien avec les milliers de jeunes contestataires de Deraa.
Une manifestation d'un millier de personnes avait été signalé peu auparavant à At Tal, quelques kilomètres seulement au nord de Damas. Quant au quotidien du parti au pouvoir, "Al-Baas", a publié des photos de manifestations pro-Assad, assurant qu'un "nuage passager est passé mais la Syrie a montré sa volonté de surmonter la crise".
ats/vkiss
Ailleurs dans le monde arabe
Premier mort en Jordanie
Un manifestant jordanien est décédé vendredi lors des violences à Amman, le premier décès depuis le déclenchement du mouvement de contestation en Jordanie il y a trois mois, selon une source médicale. "Khairy Jamil Saad, âgé de 55 ans, est décédé. Il est tombé en martyr", a dit l'une des sources médicales à l'Hôpital Hamzeh où il a été transporté. Elle s'est refusée à toute autre précision notamment sur les causes du décès.
Une autre source médicale a affirmé que le nombre des blessés "dépasse les 130, dont trois dans un état critique". Selon des témoins, "certains des blessés légers ont été arrêtés par les forces de l'ordre" déployées en force autour des hôpitaux où ont été admis les blessés. De violents heurts ont opposé à Amman les manifestants aux partisans du régime et aux forces de l'ordre qui ont dispersé les protestataires à coups de canon à eau avant de démonter leur camp installé dans le centre de la capitale. Il s'agit du premier affrontement entre les forces de l'ordre et des manifestants en Jordanie.
Un mort à Bahreïn
Bravant l'interdiction de tout rassemblement public en raison de l'état d'urgence, des milliers de personnes ont manifesté après la grande prière du vendredi dans les localités chiites du pays, Malakiya, Karzakan et plusieurs autres à l'ouest de la capitale Manama. Des manifestations ont aussi eu lieu sur l'île de Sitra, coeur de l'industrie pétrolière du petit archipel, où la population est majoritairement chiite mais la dynastie au pouvoir sunnite.
Selon les responsables de l'opposition et militants des droits de l'homme, un septuagénaire est mort étouffé par les gaz l'ayant atteint jusque chez lui, et 50 personnes ont été blessées, la plupart par des balles en caoutchouc.
Manifestations en Arabie Saoudite
Plusieurs centaines de chiites ont manifesté dans deux villes de l'est de l'Arabie saoudite pour demander la libération de détenus et exprimer leur soutien aux manifestants chiites dans le royaume voisin de Bahreïn, a rapporté vendredi l'agence de presse saoudienne Rasid. Les manifestants ont défilé dans deux villes de la province de Qatif, selon l'agence chiite.
Agitant des drapeaux bahreïnis, ils ont demandé au gouvernement de Riyad de retirer les troupes saoudiennes envoyées à Bahreïn, où elles dirigent une force militaire des pays du Golfe de 1'500 hommes destinée à aider la monarchie sunnite bahreïnie à faire face à la contestation. Minoritaires en Arabie saoudite, les chiites se disent victimes de discriminations. Ils représentent 10% des 23 millions d'habitants du royaume saoudien.
Le président yéménite combatif
Le président du Yémen Ali Abdallah Saleh s'est engagé vendredi à Sanaa devant des partisans à "résister" à ses adversaires qui réclament son départ. Au pouvoir depuis 32 ans, Saleh a proposé à nouveau le dialogue aux jeunes protestataires qui campent depuis le 21 février sur la place du Changement. Il s'est dit prêt à céder le pouvoir, mais pour le mettre "en mains sûres".
Ce discours intervient alors que des centaines de milliers de manifestants contre et en faveur du président Saleh se sont mobilisés vendredi en deux rassemblements distincts à Sanaa, quadrillée par les forces de sécurité.