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Le pouvoir syrien peine à calmer la colère de la rue

La fronde a gagné le coeur de Damas (ici devant la mosquée des Omeyyades). [Muzaffar Salman]
La fronde a gagné le coeur de Damas (ici devant la mosquée des Omeyyades). - [Muzaffar Salman]
Des manifestants ont incendié samedi une station de police et un siège du parti Baas au pouvoir dans le sud de la Syrie, alors que des "hommes armés" ont tiré à partir des toits sur des passants dans le Nord. Ces violences interviennent en dépit des gestes d'apaisement des autorités qui ont libéré 260 détenus politiques.

Alors que la contestation lancée le 15 mars contre le régime de Bachar al-Assad a fait des dizaines de morts selon des militants syriens des droits de l'Homme et l'organisation Amnesty international, un appel à une "révolte populaire" samedi dans toutes les provinces a été posté sur Facebook.

A Tafas, un village à 18 km au nord de Deraa, des manifestants ont incendié un siège du parti Baas, au pouvoir depuis 1963, et une station de police, a affirmé un haut responsable syrien qui n'a pas voulu être identifié.

"L'incendie de la station de police et le siège du parti Baas n'est pas un acte de gens qui cherchent des réformes. Est-ce qu'incendier des bâtiments peut-être qualifié de manifestations pacifiques", a-t-il demandé.

Au moins deux nouvelles victimes

Selon un militant des droits de l'Homme présent sur place, plusieurs milliers d'habitants ont participé à l'enterrement de trois manifestants tués la veille par les forces de sécurité, lorsque certains protestataires ont incendié les deux bâtiments.

A Lattaquié (350 km au nord-ouest de Damas), "des groupes armés ont pris position sur les toits d'immeubles et ont tiré sur les passants", a ajouté le responsable sans autre précision. Au moins deux manifestants ont été tués.

A Deraa, épicentre de la contestation à 120 km au sud de Damas, près de 300 jeunes, torse nu, sont montés sur les restes d'une statue à l'effigie de l'ancien président Hafez al-Assad, père de l'actuel président, déboulonnée la veille, en scandant des slogans hostiles au régime, selon des témoins.

Des manifestations dans tout le pays

La journée de vendredi avait été marquée par des violences dans plusieurs villes du pays. Selon un responsable syrien, elles ont fait 15 morts, alors que des militants des droits de l'Homme ont affirmé qu'au moins 25 manifestants avaient été tués.

Le responsable syrien a précisé que 10 contestataires avaient été tués à Sanamein (sud), alors qu'à Homs (160 km au nord de Damas), Lattaquié et à Maadamié (10 km de Damas), des manifestants ont tué le gardien d'un club militaire, deux civils et deux pompiers.

Le pouvoir calme le jeu

Ces violences avaient eu lieu malgré l'annonce de gestes jeudi par le pouvoir. Les autorités avaient promis des libérations de détenus, des mesures anti-corruption et dit envisager l'annulation de l'état d'urgence instauré en 1963.

Dans le cadre de ces promesses, "260 détenus, en grande majorité des islamistes mais également 14 Kurdes, ont été libérés", a déclaré Abdel Karim Rihaoui, président de la Ligue syrienne de défense des droits de l'Homme basée à Damas, appelant à libérer "les autres détenus politiques encore détenus".

Selon Rami Abdelrahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), les "détenus ont été libérés de la prison de Sednaya", à 30 km au nord de Damas. La majorité d'entre eux avaient purgé les trois quarts de leur peine.

Selon Rami Abdelrahmane, "plusieurs centaines de prisonniers politiques" sont toujours détenus en Syrie, dont une partie à Sednaya qui compte 10'000 prisonniers.

L'Occident dénonce

Le régime a réprimé, parfois dans le sang, les islamistes qui contestaient son pouvoir, et arrêté de nombreux militants kurdes qui réclamaient des droits pour cette population qui vit dans le Nord. Après les condamnations de Washington, Paris et Londres, l'Union européenne a dénoncé à son tour la "brutale" réponse syrienne aux "exigences légitimes" des contestataires.

afp/sbo

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