"D'ici 48 à 60 heures, Lampedusa sera habitée uniquement par des Lampedusains", a déclaré le Cavaliere, lors d'un discours improvisé devant la mairie, avant de détailler le plan gouvernemental.
Sept navires "pour un total de 10'000 places" sont déjà à quai ou vont arriver sur cette minuscule île de 20 km2, pour transférer les migrants vers des centres d'accueil dans le sud de l'Italie. Il a en outre promis qu'il y aurait désormais toujours un grand ferry présent à Lampedusa pour permettre l'évacuation d'éventuels nouveaux immigrés si ces derniers arrivaient en grand nombre.
Une centaine de nouveaux migrants ont débarqué d'une embarcation dans la matinée et selon le président de région, Raffaele Lombardo cinq autres sont attendues à Lampedusa.
Conditions insupportables
Ces derniers jours, la cohabitation entre les 6000 immigrés et les 5000 habitants y était devenue "insupportable", selon Laura Boldrini, la porte-parole du Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) en Italie. Sur le quai de la gare maritime, où étaient massés les milliers d'immigrés, l'odeur est pestilentielle: seuls trois WC chimiques pourvoyaient aux besoins des milliers d'immigrés, contraints d'uriner et déféquer en plein air, sans possibilité de se laver.
Béchir, un Tunisien de 21 ans, veut quitter au plus vite Lampedusa. Il a quitté son pays "parce qu'il n'y a pas de travail en Tunisie" et rêve, comme beaucoup d'autres, de "rejoindre sa famille en France". Mais ce mercredi, il est rongé d'inquiétude: "je ne sais pas ce qui va se passer. J'ai peur, j'ai très très peur".
Destination inconnue
Une fois embarqués, la destination des migrants n'est en effet pas connue. Les médias italiens ont même évoqué le renvoi directement en Tunisie d'un bateau d'un millier de Tunisiens.
Des centres ont par ailleurs été installés pour les accueillir mais, pour l'essentiel, ils se situent dans des zones rurales des Pouilles et de Sicile, deux régions du sud défavorisé de l'Italie. Un choix critiqué par l'opposition de gauche et même à demi-mots par le président Giorgio Napolitano.
"L'île est devenue le point-frontière entre les civilisations sans démocratie, sans liberté, sans bien-être et les civilisations occidentales, européennes qui jouissent de la démocratie, de la liberté et du bien-être", selon Silvio Berlusconi.
Pour appuyer ses promesses, il achète une maison
"L'île a dû supporter des désagréments. C'est pour cette raison que le gouvernement présentera, lors du prochain Conseil des ministres, la candidature de Lampedusa au prix Nobel de la paix", a assuré Silvio Berlusconi.
Dans la foulée, il a indiqué que le gouvernement aiderait à nettoyer l'île avec le génie militaire, et participerait à la réalisation d'infrastructures pour faciliter la prochaine saison touristique.
Pour convaincre les Lampedusains du sérieux de ses promesses, le chef du gouvernement a affirmé "avoir cherché depuis hier soir, sur internet, une maison à Lampedusa". "J'en ai trouvé une très belle (...) et ce matin je l'ai achetée", a conclu le milliardaire en souriant. Depuis la chute du président Zine El Abidine Ben Ali à la mi-janvier et le début des insurrections en Afrique du Nord, environ 20'000 immigrés sont arrivés à Lampedusa contre 4000 migrants sur toute l'année 2010.
afp/ant
Rome attaque l'UE et la France
Le gouvernement Berlusconi s'en est pris pour sa part à l'Union européenne. "L'Europe est inerte", a dénoncé le chef de la diplomatie Franco Frattini. Rome ne demande pas des "fonds européens de toute façon limités", mais "une action forte" de l'Europe pour aider Tunis à dissuader les migrants de partir.
A Bruxelles, la Commission européenne a estimé que c'était à l'Italie de prendre en charge les "migrants économiques" qui arrivent de Tunisie.
Franco Frattini a aussi fustigé "une absence de solidarité" de la France qui repousse systématiquement les Tunisiens tentant d'entrer sur son territoire.
Cet afflux de réfugiés n'est pas sans effet sur la Suisse. Le nombre de sans-papiers tunisiens qui tentent de gagner la Suisse a augmenté ces dernières semaines. En mars, les gardes-frontière tessinois ont appréhendé quatorze migrants tunisiens par semaine, contre cinq par semaine en temps normal.