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Les manifestations tournent au bain de sang en Syrie

Plusieurs manifestants ont été tués à Deraa. [AFP PHOTO / SYRIAN TV]
Plusieurs manifestants ont été tués à Deraa. - [AFP PHOTO / SYRIAN TV]
Au moins 20 manifestants ont été tués vendredi en Syrie lors de manifestations contre le régime du président Bachar el-Assad qui ont rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes. En outre, 19 membres des forces de l’ordre auraient aussi été tués. Des manifestations ont également eu lieu en Egypte et au Yémen.

Ammar Qurabi, qui dirige l'Organisation syrienne des droits de l'Homme, a affirmé que la plupart des décès de vendredi étaient survenus à Deraa, dans le sud du pays, d'où est partie la contestation le 18 mars avant de s'étendre à d'autres régions.

Nombreux morts

Au moins 16 personnes y ont été tuées, auxquelles s'ajoutent trois autres à Harasta, en banlieue de Damas, la capitale et une autre à Homs, dans le centre, selon lui.

La télévision d'Etat a de son côté affirmé que 19 policiers et membres des forces de sécurité avaient été tués par balles par des individus armés. C'était la première fois que le gouvernement, qui impute les troubles à des gangs armés, reconnaissait des pertes importantes, ce qui pourrait annoncer des représailles accrues.

Bachar al-Assad n'a pas levé l'état d'urgence en Syrie. [Reuters TV]
Bachar al-Assad n'a pas levé l'état d'urgence en Syrie. [Reuters TV]

Les bilans sont difficiles à vérifier car le régime empêche les journalistes de circuler dans le pays et contrôle strictement l'information.

Tirs à balles réelles

Un témoin joint par téléphone à Deraa a déclaré à l'Associated Press sous le couvert de l'anonymat qu'il avait manifesté avec des milliers d'autres habitants et que les forces de sécurité avaient tiré à balles réelles. Il a dit avoir aidé à transporter morts et blessés à l'hôpital.

Une infirmière a affirmé qu'il n'y avait plus assez de lits et que de nombreux blessés étaient soignés par terre ou dans des mosquées voisines. L'opposition a appelé les Syriens à manifester tous les vendredis après les prières, jugeant insuffisants les gestes d'ouverture tentés par le régime du président Bachar el-Assad pour mettre fin à la mobilisation.

Ces appels surviennent alors que Bachar el-Assad a tenté de calmer la colère des manifestants par quelques concessions, notamment en limogeant son gouvernement et deux gouverneurs régionaux. Jeudi, il a accordé la citoyenneté syrienne à plus de 250’000 Kurdes du nord-est de la Syrie, répondant ainsi à une revendication-clé d'une minorité qui se plaint depuis longtemps de discriminations.

La colère ne faiblit pas

Ces gestes d'ouverture, plutôt modestes, n'ont visiblement pas suffi. Selon les organisations internationales de défense des droits de l'Homme, la répression des manifestations a fait jusqu'ici au moins 100 morts. Des témoins ont également fait état de centaines de manifestants vendredi à Lattaquié (nord-ouest, 12 morts il y a deux semaines), dans le centre à Homs et Hama, dans le nord à Alep et dans la banlieue de Damas.

L'opposition réclame notamment la levée de l'état d'urgence en vigueur depuis 1963, la séparation entre l'exécutif et le judiciaire, ainsi qu'une nouvelle loi autorisant la formation des partis politiques et des élections libres.

agences/hof/bkel

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Manifestation au Caire

Plusieurs officiers en uniforme se sont joints vendredi à une manifestation de plusieurs dizaine de milliers de personnes place Tahrir au Caire réclamant le jugement du président déchu Hosni Moubarak et d'autres responsables de son régime, a constaté un journaliste de l'AFP.

"Nos demandes sont vos demandes. Nous voulons un gouvernement civil. Nous voulons que les corrompus soient jugés, pas simplement faire appliquer la loi aux gens ordinaires", a déclaré l'un d'eux en prenant la parole sur un podium avec six autres officiers.

Les sept hommes, tous des lieutenants, ont brandi leurs cartes militaires pour montrer qu'ils étaient bien des soldats et non des civils ayant emprunté des uniformes.

A la veille de cette manifestation, plusieurs vidéos sont apparues sur le site internet YouTube, dans lesquelles des personnes se présentant comme d'anciens officiers accusent le Conseil suprême des forces armées, à qui Hosni Moubarak a remis le pouvoir en démissionnant le 11 février, de trahir les idéaux de la révolte populaire.

Ces messages appelant également les soldats à rejoindre la manifestation ont amené l'armée à mettre en garde contre le port d'un uniforme par tout manifestant, ajoutant que cela serait passible de peines de prison.

Quatre manifestants tués au Yémen

Quatre personnes ont été tuées vendredi au Yémen. Deux manifestants ont été tués à Sanaa et deux autres par les tirs des forces de l'ordre à Taëz, au sud de la capitale, un épicentre de la contestation de son régime.

Le président contesté du Yémen Ali Abdallah Saleh a rejeté vendredi un plan de sortie de crise des monarchies du Golfe. Dans une brève intervention devant ses partisans à Sanaa, Ali Abdallah Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, a dénoncé "l'ingérence flagrante" des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) et s'en est pris nommément au Qatar.

"Nous tirons notre force de la force de notre grand peuple, ni du Qatar, ni de personne d'autre", a-t-il lancé. "Nous sommes nés libres, et nous sommes libres de décider", a également poursuivi le président Saleh, qui s'est dit prêt à passer la main mais dans le cadre d'une transition ordonnée avant le début 2012.

Inquiets face à l'instabilité au Yémen, les pays du CCG (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Oman, Qatar et Koweït) ont proposé leur médiation le 3 avril. Mercredi, le premier ministre du Qatar, cheikh Hamad Ben Jassem Al-Thani, avait spécifié que cette offre prévoyait le retrait immédiat de Saleh, une exigence de l'opposition toujours refusée par le chef de l'Etat.

La médiation du CCG propose également la remise du pouvoir au vice-président Abed Rabo Mansour, la formation d'un gouvernement dominé par l'opposition et des garanties au président qu'il ne sera pas poursuivi en justice.