"Quatre-vingts pour cent des morts sont des civils", a déclaré lundi l'administrateur de l'hôpital de Misrata, le Dr Khaled Abou Falgha, précisant que les combats incessants depuis la fin février à Misrata avaient également fait 3000 blessés.
Ce bilan n'a pas pu être confirmé auprès d'autres sources. Selon Human Rights Watch, citant des sources médicales à Misrata, à la date du 15 avril, 267 corps avaient été amenés dans les morgues de la ville.
Pour la seule journée de dimanche, au moins dix-sept personnes ont été tuées et 71 blessées dans la grande ville côtière située à 200 km à l'est de Tripoli, a-t-on indiqué à l'hôpital.
Bombes à sous-munitions et snipers
Le médecin a précisé avoir constaté, depuis la semaine dernière, de graves blessures causées par des bombes à sous-munitions, que les forces pro-Kadhafi emploient depuis jeudi soir, selon les rebelles et l'organisation Human Rights Watch.
L'emploi de ces armes, prohibées par une convention internationale en raison notamment des dommages qu'elles sont susceptibles de causer aux populations civiles, a nécessité de nombreuses amputations à Misrata, selon le médecin.
L'hôpital a par ailleurs constaté une augmentation du nombre de civils blessés par des balles à haute vélocité tirées par des snipers et provoquant des blessures dont les séquelles sont souvent irréversibles.
Les combats ont été "horribles", raconte Hussein Al-Fortia, un responsable des rebelles. "Il y a des familles qui veulent partir (...) Rester à Misrata est terrible. Tout le monde à Misrata se trouve sur la ligne de front", ajoute-t-il. Selon lui, les forces de Kadhafi attaquent par trois côtés et tirent des roquettes à plusieurs kilomètres de distance.
Evacuations par voie maritime
Lundi, des tirs d'artillerie étaient entendus au loin à Misrata, selon un journaliste de l'AFP. Samedi, l'ONG Médecins Sans Frontières a évacué en Tunisie 99 blessés, dont 10 dans un état "critique", par la voie maritime, la seule qui relie la vie assiégée au reste du monde.
Une dizaine de milliers de migrants, notamment égyptiens et nigériens, attendent toujours leur évacuation dans un camp de fortune installé près du port de Misrata, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Jeremy Haslam, chef de la mission de l'OIM dans le pays, a indiqué craindre également un mouvement d'exode de masse des quelque 400'000 habitants libyens de la ville qui dépasserait les capacités logistiques du dispositif mis en place par l'OIM, le Qatar et l'ONG Médecins sans Frontières.
Ailleurs dans le pays, les combats se poursuivaient à Nalout et à Ajdabiya, noeud de communication stratégique menant vers le fief des rebelles à Benghazi, à 160 km au nord, et vers Tobrouk (à 327 km à l'est), près d'un mois après le début de l'intervention le 19 mars de la coalition internationale.
Ajdabiya toujours en mains rebelles
Environ 3000 Libyens ont fui samedi les montagnes de l'ouest du pays pour rejoindre la Tunisie, a indiqué le Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR). A Ajdabiya, les forces pro-Kadhafi étaient revenues dimanche à moins de 20 km à l'ouest de cette ville, poussant certains rebelles et des habitants à fuir par centaines.
Lundi, les rebelles tenaient toujours la ville, selon un journaliste de l'AFP qui a entendu trois tirs de roquettes au loin à l'ouest dans la matinée. Pour le régime libyen, "l'implication d'al-Qaïda dans le conflit en Libye est prouvée chaque jour".
"Nous croyons que ce serait très dangereux que ces gens s'installent dans ce pays, contrôlent son avenir et de son immense richesse, à quelques pas de l'Europe", a dit dimanche soir à la presse le porte-parole du régime, Moussa Ibrahim.
La coalition internationale est intervenue le 19 mars, sur mandat de l'ONU, pour mettre un terme à la répression sanglante de la révolte contre le régime autoritaire de Mouammar Kadhafi, au pouvoir depuis 42 ans.
afp/mre
Plus de 100 morts en 48 heures
Les forces loyales au colonel Mouammar Kadhafi ont pilonné intensivement la région d'Al-Jabal Al-Gharbi sous le contrôle de la rébellion, à l'ouest de Tripoli, tuant plus de 100 personnes depuis dimanche, a-t-on appris lundi auprès d'habitants de cette région.
"Les bataillons de Kadhafi n'ont pas arrêté le pilonnage de la région, surtout Yefren et Nalout, avec des roquettes Grad. Il y a eu 110 morts parmi les rebelles et les civils dans ces deux villes", a déclaré à l'AFP un habitant de Yefren (à une centaine de km au sud-ouest de Tripoli) sous couvert de l'anonymat.
Tirs aveugles
Un habitant de Nalout, à moins d'une dizaine de kilomètres de la frontière avec la Tunisie, a indiqué que "les forces de Kadhafi sont en train de perpétrer un massacre" dans cette région montagneuse, faisant état d'au "moins 100 morts en deux jours".
"Ils tirent aveuglement des roquettes Grad sur les habitations, les hôpitaux. Plusieurs familles ont fui vers la Tunisie", a-t-il ajouté. Un témoin avait fait état plus tôt de combats près de Nalout dans l'après-midi entre rebelles et forces pro-Kadhafi.
Un autre témoin qui se trouve à Ghazaya a fait état, dans cette petite ville au nord-ouest de Nalout située tout près de la frontière, de combats qui "n'ont pas cessé depuis la nuit dernière et (qui) on repris de plus belle lundi soir à la mitrailleuse lourde et aux roquettes".
Accord humanitaire trouvé
Le gouvernement libyen a donné son accord pour la présence d'équipes internationales humanitaires à Tripoli et assurera leur accès en toute sécurité jusqu'à la capitale libyenne, a annoncé lundi un porte-parole de l'ONU, Farhan Haq.
Cet accord garantissant un accès à Tripoli d'équipes humanitaires a été trouvé dimanche lors du séjour à Tripoli de la secrétaire générale adjointe pour la coordination humanitaire Valerie Amos qui a rencontré des hauts dirigeants libyens.