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"Rien n'est encore joué" pour le printemps arabe

04-20-arabe-reu.jpg [Amr Abdallah Dalsh]
Pour les experts, le plus urgent pour les pays arabes est d'élaborer des institutions capables de consolider le changement. - [Amr Abdallah Dalsh]
Plusieurs experts réunis mercredi à Genève ont estimé que de nombreuses incertitudes demeuraient sur la transition vers de nouvelles institutions dans les pays arabes en proie à des mouvements de révoltes depuis le début de l'année.

Rien n'est encore joué pour le printemps arabe, ont affirmé mercredi plusieurs experts réunis au Club suisse de la presse à Genève. De nombreuses incertitudes demeurent sur la transition vers de nouvelles institutions et le processus va durer, ont-ils estimé.

"La Tunisie et l'Egypte avancent à l'aveugle, il n'y a pas de possibilité d'évaluer l'état de l'opinion", a constaté Luis Martinez, directeur de recherche à Sciences Po à Paris. Elaborer des institutions capables de consolider le changement est le plus urgent, a-t-il souligné, mais l'issue du processus électoral est incertain. "C'est seulement à la fin que l'on saura et c'est le gagnant qui réécrira l'histoire", a fait remarquer le chercheur.

Si le printemps arabe peut être comparé avec les événements qui ont accompagné la chute du Mur de Berlin en 1989, "le mur arabe est très long, très haut, certains ont déjà fait tomber leur partie, mais d'autres regardent ou attendent le bon moment", a observé Ayache Derradji, envoyé spécial d'Al Jazira au Caire.

Pas de garantie de succès

Pour Akram Belkaid, "il est trop tôt pour parler de révolution et de démocratie". "Rien n'est joué, rien n'est gagné", a dit l'écrivain algérien. "Il n'y a pas de garantie de succès" et "ce processus historique va durer avec des avancées et des reculs", a-t-il prévenu.

Le journaliste syrien Nabih Hussami a insisté sur le fait que chaque contexte est différent. Il a estimé que le président syrien Bachar Al-Assad est ouvert aux réformes. Pour Elias Khoury, de l'Union des juristes arabes, la levée de l'état d'urgence par Damas est "un pas en avant".

"L'Egypte se trouve à un carrefour dangereux" et les "partisans du clan de Moubarak sont toujours actifs", a mis en garde l'écrivaine égyptienne Hedayat Abdelnabi, tout en exprimant son espoir.

L'Algérie traverse aussi "une grave crise sociale", dont témoignent de nombreuses manifestations dans une "ambiance de fin de règne", a constaté Akram Belkaid.

Au Maroc, un fort mouvement pousse vers l'établissement d'une monarchie constitutionnelle. Même si la répression a pris le dessus à Bahrein, les élites des pays du Golfe réclament également une ouverture, ont constaté les experts.

ats/vkiss

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Sur le terrain, les révoltes continuent

Un manifestant et un policier ont été tués mercredi au Yémen, portant à huit depuis mardi le nombre de victimes de la répression des manifestations contre le régime, et de nouveaux appels à protester ont aussitôt été lancés par l'opposition. Les monarchies du Golfe ont pour le moment échoué à trouver une solution pour sortir de la crise, de même que le conseil de sécurité de l'ONU à se mettre d'accord sur une déclaration commune.

Un opposant syrien de premier plan, Mahmoud Issa, a été arrêté en Syrie, selon l'Observatoire des droits de l'Homme, alors que le président Assad devait promulguer mercredi la levée de l'état d'urgence, acceptée mardi par le gouvernement. Un haut responsable de la sécurité, Amjad Abbas, a été limogé à Banias, ville du nord-ouest de la Syrie où des violences meurtrières s'étaient produites il y a une dizaine de jours, et il va être traduit en justice.

La policière tunisienne accusée d'avoir giflé Mohamed Bouazizi, le vendeur de légumes qui s'était immolé par le feu, déclenchant la révolution tunisienne, a bénéficié mercredi d'un non-lieu. Par ailleurs, seuls certains anciens cadres du RCD, l'ex-parti du président tunisien déchu Ben Ali, ne pourront pas se présenter à l'élection de l'assemblée constituante le 24 juillet.

Les autorités saoudiennes ont arrêté plus de 160 dissidents depuis février, dont un écrivain, Nadhir al-Majid, a indiqué mercredi Human Rights Watch (HRW), en dénonçant le silence des Etats-Unis et de l'Union européenne sur ces "violations des droits de l'Homme".