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La situation s'aggrave dans le sud de la Syrie

Image issue d'une vidéo amateur prise ce 25 avril à Deraa.
Image issue d'une vidéo amateur prise ce 25 avril à Deraa.
Environ 3000 membres des services de sécurité syriens, appuyés par des blindés, ont pénétré lundi matin dans la ville de Deraa, dans le sud du pays, après une vague d'arrestations menée ces derniers jours contre les opposants au régime de Bachar el-Assad. Plusieurs morts et blessés.

Des milliers de soldats syriens appuyés par des chars sont intervenus lundi à Deraa pour mater la contestation contre le régime née dans cette ville du sud du pays, faisant au moins 25 morts, selon des militants des droits de l'Homme

"Les hommes des services de sécurité sont entrés par centaines dans la ville, accompagnés de chars et de blindés", a déclaré un militant par téléphone. "Les hommes tirent dans toutes les directions et avancent derrière les blindés qui les protègent", a-t-il raconté.

Les Nations unies réagissent

Lundi, la Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Navi Pillay, a demandé "l'arrêt immédiat des tueries en Syrie", jugeant "inacceptable" la "réaction erratique et violente" du gouvernement syrien face à "des manifestants pacifiques". "Les forces de sécurité doivent immédiatement arrêter les tirs à balles réelles contre les manifestants" a-t-elle souligné dans un communiqué.

"Le gouvernement a l'obligation internationale légale de protéger les manifestants pacifiques et le droit de manifester pacifiquement", a-t-elle ajouté. La Haut-Commissaire a précisé par ailleurs avoir reçu une liste avec les noms de 76 personnes tuées vendredi pendant des manifestations pacifiques, mais a ajouté que le nombre des tués pourrait être "considérablement plus élevé".

Projet de déclaration au Conseil de sécurité

"La communauté internationale a réitéré ses demandes urgentes auprès du gouvernement syrien d'arrêter" de tirer sur "son propre peuple", "mais ces demandes sont restées lettre morte", a-t-elle regretté. "Au lieu de cela, la réponse du gouvernement a été erratique avec des promesses de réforme suivies d'actes de répression violents contre les manifestants (...) Les tueries doivent cesser immédiatement", a encore dit Navi Pillay.

Quatre pays européens ont en outre proposé lundi un projet de déclaration du Conseil de sécurité des Nations unies condamnant fermement la répression des manifestations en Syrie, selon un diplomate du conseil.

Le texte a été proposé par la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et le Portugal. Il sera débattu mardi après-midi lors d'une réunion du Conseil de sécurité, a précisé ce diplomate sous couvert de l'anonymat.

Tout avait commencé à Deraa

La contestation contre le régime syrien est née à Deraa, où des dizaines de Syriens ont été tués lors de la violente répression des manifestations par les services de sécurité. Quatre personnes ont aussi été tuées dimanche par les forces de l'ordre à Jableh, dans le nord-ouest du pays, selon un militant des droits de l'homme.

Le nouveau gouverneur de la région s'était rendu en visite dans cette ville où il a rencontré des dignitaires à la mosquée: c'est après son départ que les forces de l'ordre ont encerclé la ville et ont commencé à tirer, a indiqué ce militant.

Plus de 350 morts depuis le 15 mars

Ces quatre nouveaux décès portent à au moins 352 le nombre de personnes ayant péri depuis le début, le 15 mars, du mouvement de contestation, selon des chiffres compilés par l'AFP. Des milliers d'habitants de la province de Deraa, où est né le mouvement de contestation dans le sud du pays, ont par ailleurs enterré dimanche plusieurs victimes de la répression, après la prière. Une manifestation a suivi sans que les forces de sécurité n'interviennent, a indiqué un militant.

Les protestataires ont brandi des drapeaux syriens et des pancartes appelant "à la suppression de l'article 8 de la Constitution" sur la suprématie du parti unique Baas, a-t-il ajouté sous couvert de l'anonymat. La majorité des commerces étaient fermés en signe de deuil.

Arrestations incessantes

La répression des manifestations hostiles au régime a fait au moins 120 morts vendredi et samedi en Syrie, selon une liste nominative compilée par le Comité des martyrs de la révolution du 15-Mars. Ces derniers jours, les services de sécurité ont effectué des descentes dans plusieurs villes, arrêtant des militants hostiles au régime, ont indiqué des témoins et l'opposition.

Dimanche, selon des militants des droits de l'Homme, une dizaine de personnes ont été arrêtées notamment à Damas, Homs (centre), Deraa (sud), Lattaquié, Hasaka (nord-est), Deir es Zor (est) et Alep (nord). Dans un communiqué, 102 intellectuels et journalistes ont condamné "la pression des autorités syriennes" et ont appelé les journalistes travaillant dans les médias officiels à démissionner.

Dans un geste inédit, deux députés de Deraa et le mufti de la ville, plus haute autorité religieuse à Deraa, ont démissionné samedi pour protester contre la répression sanglante des manifestations, largement condamnée par la communauté internationale.

afp/ap/mej/olhor

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Le pouvoir désinforme

La Syrie a fermé lundi sa frontière avec la Jordanie, a annoncé le ministre jordanien de l'Information Taher Adwan, cité par l'agence Petra, quelques heures après une intervention massive des forces de sécurité syriennes à Deraa, près de la frontière avec le royaume.

"La Syrie a fermé ses frontières terrestres avec la Jordanie. La décision syrienne est liée à la situation interne en Syrie", a indiqué M. Adwan, cité par l'agence officielle Petra. "Nous espérons que la situation revienne rapidement à la normale", a-t-il ajouté.

Sanctions américaines proches

L'administration Obama examine actuellement toute une série de mesures frappant le gouvernement syrien, y compris des sanctions à l'encontre de hauts dirigeants du régime du président Bachar al-Assad, a annoncé lundi un responsable de l'administration Obama.

Les mesures à l'étude pourraient comprendre un gel des avoirs et une interdiction de faire des affaires aux Etats-Unis. On ignore la date à laquelle ces mesures pourraient être imposées.

Des sanctions contre le gouvernement de Bachar el-Assad sont une réponse possible "pour faire comprendre au gouvernement syrien" que les Etats-Unis estiment "qu'il doit cesser les violences qu'il commet contre ses propres citoyens", a expliqué le porte-parole de la Maison Blanche, Jay Carney.

"Le peuple syrien devrait être respecté, ses droits devraient être respectés, (les Syriens) ne devraient pas être attaqués, ils ne devraient pas être tués", a-t-il ajouté. "Nous appelons à des processus de réforme."

C'est la première fois que Washington évoque de possibles sanctions depuis le début du mouvement de contestation, il y a plus de deux mois.