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Libye: création d'un fonds spécial pour la rébellion

Franco Frattini, le ministre italien des Affaires étrangères, a tenu un rôle central dans la réunion du groupe de contact à Rome. [Tony Gentile]
Franco Frattini, le ministre italien des Affaires étrangères, a tenu un rôle central dans la réunion du groupe de contact à Rome. - [Tony Gentile]
Le groupe de contact sur la Libye, réuni jeudi à Rome, a décidé de créer un "fonds spécial" afin d'aider les rebelles, pour lesquels les Etats-Unis ont déjà décidé de puiser dans les avoirs, gelés, du régime de Mouammar Kadhafi. La Suisse ne versera elle rien dans l'immédiat.

"Un soutien économique plus fort est nécessaire", a déclaré le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini à l'ouverture de la réunion en annonçant "l'établissement d'un fonds spécial".

Sous le nom de mécanisme financier temporaire, il "permettra à des fonds d'être transférés effectivement et de manière transparente au Conseil national de transition" (CNT), l'organe politique de la rébellion, a-t-il précisé.

Le chef de la diplomatie italienne a souligné qu'il fallait de manière urgente pouvoir lever les fonds gelés à la demande du CNT, pour des raisons humanitaires. La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a annoncé que les Etats-Unis allaient "bâtir une législation" pour leur permettre de "puiser dans une partie des fonds détenus par Kadhafi et le gouvernement libyen aux Etats-Unis, afin que nous puissions rendre ces fonds disponibles pour aider le peuple libyen".

30 milliards de dollars d'avoirs libyens

Les avoirs libyens bloqués aux Etats-Unis représentent plus de 30 milliards de dollars et ceux qui sont bloqués dans l'Union européenne sont estimés à une somme du même ordre de grandeur. "Cet argent appartient au peuple libyen, et l'Italie et la France ont déjà exhorté les organismes compétents de l'Union européenne à trouver une solution", a déclaré Franco Frattini.

Le responsable de l'économie du CNT, Ali Tarhoni, a averti mardi que l'économie libyenne risquait l'effondrement et a demandé "des lignes de crédit" de "deux à trois milliards d'euros" à la France, aux Etats-Unis et à l'Italie. Les insurgés entendent "fournir de l'aide médicale, des vivres, maintenir des fonctions minimales comme l'électricité, les hôpitaux", a expliqué le porte-parole du CNT Mahmoud Chamame. Pour Mahmoud Chamame, ce mécanisme serait un nouveau jalon dans le soutien politique accordé aux rebelles par la communauté internationale.

Le Qatar, un des trois pays à avoir reconnu le CNT avec la France et l'Italie et coprésident de la rencontre de Rome, a aussi proposé d'aider les rebelles à exploiter les ressources pétrolières dans les zones qu'ils contrôlent.

22 pays à la réunion de Rome

Organisatrice de la deuxième réunion du groupe créé à Londres en mars, l'Italie accueille 22 pays participants, six institutions internationales dont l'UE, l'OTAN et l'Organisation de la conférence islamique, ainsi que six observateurs dont l'Union africaine et la Banque mondiale.

Outre l'instauration d'un mécanisme d'aide au CNT, figurent à l'ordre du jour des discussions sur ce conflit qui a fait plus de 10'000 morts selon les rebelles et sur les moyens de parvenir "le plus vite possible à un cessez-le-feu". "La meilleure chose à faire pour Kadhafi est de cesser sa violence brutale et de quitter le pouvoir", a lancé Hilary Clinton avant la réunion, en soulignant que les Etats-Unis entendent agir exclusivement dans le cadre de la résolution de l'ONU.

Franco Frattini souhaite que "de plus en plus de partenaires envisagent d'établir des relations bilatérales" avec le CNT, lui accordant ainsi leur reconnaissance. Il avait souligné auparavant l'importance de la réunion de Rome pour passer "le plus vite possible de la phase militaire à la phase politique" de l'opération internationale en Libye. "L'objectif est d'obliger le régime Kadhafi à partir", en utilisant "une combinaison d'action militaire pour protéger les civils et d'aide aux rebelles".

Enfin, la prochaine réunion du Groupe de contact sur la Libye se tiendra aux Emirats arabes unis (EAU), a annoncé jeudi Franco Frattini, sans en préciser la date, à l'issue de la réunion.

afp/ats/olhor


UN NAVIRE AVEC DES RÉFUGIÉS DE MISRATA EST ARRIVÉ À BENGHAZI

Un bateau transportant plusieurs centaines de migrants et blessés de la ville assiégée de Misrata est arrivé jeudi matin à Benghazi. Le fief des rebelles est situé à l'autre extrémité du golfe de Syrte.

Le bateau Red Star One a pu embarquer près d'un millier de personnes. Il s'agit essentiellement des réfugiés africains mais aussi de centaines de Libyens, dont une quarantaine de blessés graves.

La vingtaine des journalistes internationaux qui se trouvaient à Misrata, cette grande ville côtière assiégée depuis deux mois par les forces loyales à Kadhafi, étaient aussi à bord.

Le bateau, affrété par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), avait déchargé 180 tonnes d'aide humanitaire pour Misrata. Il avait pu appareiller mercredi après avoir été bloqué au large de Misrata quatre jours en raison des menaces sur le port. Des roquettes ont touché mercredi un camp de réfugiés près du port, tuant cinq Nigérians membres d'une même famille dont des enfants.

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Le Canada, le Danemark et l'Espagne reconnaissent la CNT

Les rebelles libyens ont annoncé jeudi que le Canada, le Danemark, l'Espagne et les Pays-Bas avaient rejoint les pays ayant reconnu le Conseil national de transition (CNT) mis en place par l'opposition comme représentant la Libye. Les Pays-Bas ont cependant démenti avoir reconnu le CNT, et aucune confirmation n'a pu être obtenue dans l'immédiat à Copenhague et à Madrid.

Au début de la réunion du Groupe de contact pour la Libye, l'Italie, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Franco Frattini, avait souhaité qu'un maximum de ses alliés reconnaissent le Conseil national de transition (CNT), l'organe des insurgés libyens.

Franco Frattini a par ailleurs annoncé que déjà 250 millions de dollars avaient été recueillis pour l'aide humanitaire.

La Suisse ne versera rien dans l’immédiat

La Suisse ne versera pas dans l'immédiat les avoirs libyens qu'elle a bloqués dans le fonds spécial destiné à aider les rebelles. Une confiscation de ces fonds doit être coordonnée au niveau international, "idéalement avec une décision du Conseil de sécurité de l'ONU", estime le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO).

Il est nécessaire d'avoir une base légale solide, car une confiscation de fonds constitue une "intervention grave" au niveau légal, a indiqué à l'ATS le SECO. Pour cette raison, le fonds spécial d'aide aux rebelles doit être fondé sur "une base juridique solide".

Le Conseil fédéral avait ordonné le 21 février le blocage des éventuels fonds déposés en Suisse par le colonel Mouammar Kadhafi et ses proches. Selon le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), 360 millions de francs ont été bloqués depuis cette date.