"Vendredi du défi, le 6 mai 2011, Syrie, la liberté approche, le peuple veut faire tomber le régime", titre le site "The Syrian Revolution 2011" créé par de jeunes militants. Les contestataires, qui exigeaient au départ la levée de l'état d'urgence, la libération des détenus et la fin de la suprématie du parti Baas, réclament désormais la chute du régime.
Bachar el-Assad avait levé le 21 avril l'état d'urgence en vigueur depuis près de 50 ans, mais la répression a continué, suscitant des condamnations internationales. Les Etats-Unis et l'Italie appellent Damas à "cesser les violences et reprendre la voie du dialogue", a déclaré jeudi le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini à l'issue d'un entretien à Rome avec la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton.
Il a également évoqué des "sanctions" contre la Syrie, notamment "la suspension des négociations avec l'Union européenne en vue d'un accord de coopération". Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé avait réaffirmé mercredi que la France voulait voir le président Assad sanctionné par l'Union européenne et estimé qu'il serait évincé si la répression perdurait.
A Damas, une centaine de manifestants portant des t-shirts à l'effigie du président se sont rassemblés jeudi dans le calme devant l'ambassade de France pour protester contre les déclarations "enflammées" d'Alain Juppé.
600 morts déjà selon les ONG
A Washington, des élus du Congrès américain ont jugé l'administration du président Barack Obama trop tendre avec le régime syrien et sa répression violente du mouvement de protestation. Michael Posner, un haut responsable du département d'Etat, a rejeté l'idée d'un représentant de rappeler l'ambassadeur américain à Damas. Le diplomate, Robert Ford, premier ambassadeur américain en poste en Syrie depuis cinq ans, a été nommé dans l'espoir d'entamer une nouvelle relation avec Damas.
La répression de la contestation a fait, selon des ONG, quelque 600 morts à travers la Syrie, en majorité à Deraa (sud), où est né le mouvement mi-mars, alors que le nombre de personnes "détenues ou disparues pourrait dépasser les 8000", a déclaré mardi Wissam Tarif, directeur exécutif de l'organisation de défense des droits de l'Homme Insan.
Sur le terrain, l'armée a commencé jeudi à se retirer de la ville de Deraa, place forte de la contestation, située à une centaine de km au sud de Damas, ont constaté des journalistes de l'AFP sur place. Mais elle a poursuivi sa campagne d'arrestations avec les forces de sécurité notamment à Saqba, près de Damas, où 300 personnes ont été arrêtées, selon un militant.
"Nous avons entamé notre départ après avoir accompli notre mission", a affirmé le général Riad Haddad, directeur du département politique de l'armée. "Nous n'avons pas affronté les manifestants, nous poursuivions des bandes terroristes cachées dans plusieurs endroits. En tant qu'armée, nous n'avons jamais affronté les manifestants, nous n'avons jamais utilisé des armes lourdes sauf des armes automatiques", a-t-il souligné.
L'armée toujours sur le qui-vive
Vingt-cinq militaires ont été tués et 177 autres blessés selon lui durant le siège de la ville, débuté le 25 avril. L'armée syrienne avait affirmé que son intervention à Deraa répondait aux appels au secours lancés par les habitants.
A Saqba, près de Damas, "plus de 300 personnes ont été arrêtées" jeudi matin "dont plusieurs dignitaires religieux, par les services de sécurité appuyés par l'armée", a indiqué à l'AFP un militant, joint par téléphone depuis Nicosie. Sur la place centrale de la ville, baptisée "Place des martyrs", les services de sécurité "ont arraché un panneau portant cette inscription et déchiré des photos de martyrs qui y étaient collées", a ajouté le militant.
Sept habitants ont été tués à Saqba depuis la mi-mars, selon lui. Par ailleurs, des dizaines de chars et blindés et d'importants renforts de troupes se sont massés jeudi à Sahm Al-Bahar, à 10 km au sud de Banias (nord-ouest), ville encerclée par l'armée depuis plus d'une semaine, a indiqué à l'AFP un militant.
"Il semble qu'ils s'apprêtent à attaquer la ville comme ils l'ont fait à Deraa", a affirmé un autre. Quelque 3000 personnes a manifesté jeudi après-midi à Banias, selon l'observatoire syrien des droits de l'Homme. A Alep (nord), deuxième ville de Syrie, des partisans du régime ont dispersé par la force un sit-in d'étudiants, selon des militants. Les étudiants, qui se trouvaient dans la faculté de la ville, demandaient la libération de leurs collègues arrêtés récemment.
afp/olhor