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Tripoli critique le plan d'aide aux rebelles

Le fils de Mouammar Kadhafi aurait été tué dans un raid. [José Luis Roca / AFP]
Malgré une coalition internationale liguée contre lui, Kadhafi ne compte toujours pas renoncer au pouvoir. - [José Luis Roca / AFP]
Le régime libyen s'est insurgé vendredi contre le plan d'aide international aux rebelles qui prévoit l'utilisation de ses fonds gelés et a répété que Mouammar Kadhafi n'avait aucune intention de quitter le pouvoir, au lendemain de la réunion du Groupe de contact à Rome.

Près de trois mois après le début du conflit lancé le 15 février par une révolte contre le pouvoir autoritaire de Kadhafi et l'intervention militaire internationale le 19 mars, les combats entre insurgés et pro-Kadhafi semblent marquer le pas notamment dans la région stratégique de Misrata (ouest).

La France, premier pays à reconnaître le Conseil national de transition (CNT), organe représentatif de la rébellion basé à Benghazi (est), a déclaré "persona non grata 14 ex-diplomates libyens", leur donnant "de 24 à 48 heures" pour quitter son territoire.

Fonds spécial créé

Dans l'attente d'une solution politique ou militaire au conflit, le Groupe de contact sur la Libye a mis en place jeudi un "fonds spécial" pour le CNT, qui sera alimenté par des dons et des prêts notamment arabes, puis en partie par les avoirs libyens gelés aux Etats-Unis et en Europe. Le fonds, sous supervision internationale, sera "opérationnel dans les prochaines semaines", a indiqué le chef de la diplomatie française Alain Juppé.

Le Koweït a déjà promis 180 millions de dollars, le Qatar 400 à 500 millions. Il servira "en premier lieu à payer les salaires, acheter des médicaments et des vivres, et pour des frais médicaux", ainsi que pour la reconstruction, a expliqué le Premier ministre du Qatar Hamad Ben Jassem Al-Thani.

Tripoli se défend

"La Libye est toujours, selon le droit international, un Etat souverain, et toute utilisation des fonds gelés est comme de la piraterie en haute mer", a répliqué le vice-ministre libyen des Affaires étrangères Khaled Kaïm lors d'une conférence de presse à Tripoli.

Les fonds gelés de Kadhafi, au pouvoir depuis près de 42 ans, et de ses proches sont estimés à 60 milliards de dollars dans le monde, dont plus de la moitié aux Etats-Unis. Outre l'aide financière, les moyens de parvenir le plus vite possible à un cessez-le-feu ont été discutés à la réunion de Rome, le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini estimant "réaliste" qu'il puisse intervenir "d'ici quelques semaines".

Le mouvement de contestation sans précédent du régime s'est vite transformé en guerre civile et des milliers de personnes ont péri dans le conflit selon le procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno-Ocampo, qui compte demander trois mandats d'arrêt pour crimes contre l'humanité en Libye.

Situation militaire bloquée

Malgré l'intervention d'une coalition internationale le 19 mars sous mandat de l'ONU pour mettre fin à la répression sanglante puis la prise des commandes par l'Otan, la situation militaire semble bloquée sur le terrain avec des risques d'aggravation de la crise humanitaire. "La meilleure chose à faire pour Kadhafi est de cesser sa violence brutale et de quitter le pouvoir", a dit la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, présente à Rome.

Mais le régime ne veut rien entendre. "Ils disent aux Libyens: 'Vous ne savez pas ce qui est bon pour vous. Nous allons vous retirer le mauvais choix et vous laisser le bon' (...) Ce n'est pas moral, pas légal et pas logique de conditionner le choix des Libyens", a dit le porte-parole, Moussa Ibrahim.

Le CNT se présente comme l'alternative dans l'immédiat. L'un de ses leaders Mahmoud Jibril a détaillé à Rome une "feuille de route" prévoyant une élection présidentielle six mois après un départ de Kadhafi. "Notre propos est de donner davantage de crédibilité à nos orientations pour une démocratie authentique".

afp/cht

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Le port de Misrata toujours ouvert

Peu d'informations filtraient depuis mercredi sur la situation à Misrata, assiégée depuis plus de deux mois par les pro-Kadhafi et où se focalisent les combats.

"Le port de Misrata, malgré toutes les difficultés, est ouvert. C'est la planche de salut pour la survie de Misrata. Et l'Alliance fait des progrès en frappant systématiquement les forces de Kadhafi qui attaquent", a annoncé le président du Comité militaire des chefs d'état-major de l'Otan, l'amiral Paolo Di Paola.

Cinq Nigérians avaient péri dans un bombardement des forces loyalistes mercredi du camp de réfugiés près du port, seul accès pour évacuer les blessés et les étrangers et décharger l'aide humanitaire.

Un bateau affrété par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), bloqué au large plusieurs jours en raison des menaces sur le port, avait néanmoins pu embarquer ce jour-là quelque 1300 passagers -réfugiés africains et Libyens-, dont une quarantaine de blessés graves.

Exode massif

Quelque 710'000 Libyens et immigrés ont fui la guerre en Libye, ont indiqué vendredi les agences de l'ONU. Des milliers de personnes continuent de quitter quotidiennement le pays, certaines après plusieurs jours d'épreuve dans le désert.

Depuis la mi-février, 339'000 personnes ont fui vers la Tunisie, 262'000 en Egypte, 61'200 au Niger, 23'000 au Tchad, 17'000 en Algérie et quelques milliers en Italie, à Malte et au Soudan, selon un décompte publié à Genève par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

"Le nombre de personnes qui fuient la Libye continue à augmenter chaque jour. Certaines arrivent complètement épuisées et déshydratées après un voyage de plusieurs jours jusqu'à la frontière tchadienne", a déclaré la porte-parole de l'OIM Jemini Pandya.

En moyenne, trois camions transportant 150 personnes chacun arrivent chaque jour à Faya, dans le nord du Tchad, a-t-elle expliqué. "La température au Sahara atteint 50 degrés. Ceux qui arrivent sont complètement déshydratés et épuisés après un voyage de deux semaines en camion dans le désert", a rapporté la porte-parole.

Quelque 40'000 Tchadiens n'ont toujours pas les moyens de quitter la ville libyenne de Gatroun, dans le sud du pays, selon l'OIM. Ils survivent dans une situation désespérée, sans eau, ni nourriture et dans de mauvaises conditions d'hygiène. Les migrants arrivés à Faya sont ensuite évacués par la route avec l'aide de l'OIM vers N'Djamena et d'autres villes au Tchad.