Après une semaine de manifestations contre l'envolée du chômage et l'austérité, le Parti populaire (PP, droite) a obtenu dimanche 37,5% des voix contre 27,8% pour les socialistes, leur plus mauvais score à des élections municipales depuis l'avènement de la démocratie en 1978. Le PSOE a perdu les villes de Barcelone et de Séville. Il est devancé par le PP dans les 13 régions autonomes en jeu.
Le premier ministre José Luis Rodriguez Zapatero, à la tête d'un gouvernement fragilisé, a refusé d'envisager des élections anticipées. Le chef de l'opposition, Mariano Rajoy, n'en a lui-même pas réclamé. Mais plusieurs observateurs jugent intenable la position du gouvernement, qui doit composer avec la pression des investisseurs réclamant de nouvelles mesures d'austérité.
Zapatero: "Je sais"
"Ces résultats sont une réaction explicite à la crise économique que nous subissons depuis trois ans", a dit José Luis Zapatero. "Je sais que la majorité des Espagnols connaissent de grandes difficultés et craignent pour leur emploi et leur avenir". Au pouvoir depuis 2004, le chef du gouvernement a assuré qu'il irait jusqu'au terme de son mandat, en mars prochain.
Lundi, les tentes des jeunes protestataires remplissaient encore la Puerta del Sol mais la foule était moins nombreuse sur la place madrilène. Les experts jugent que ce mouvement de protestation, lancé le 15 mai, sera dur à maintenir compte tenu de l'absence de structure politique pour le soutenir.
"On compte rester au moins jusqu'à dimanche, mais on n'exclut pas de rester encore plus", a déclaré une porte-parole de ce mouvement spontané né le 15 mai via les réseaux sociaux, avant de très rapidement s'amplifier, gagner tout le pays et se structurer.
Ce mouvement n'a pas eu grande influence sur le résultat des élections. Mais ses revendications reflètent les angoisses que la population a exprimées dans les urnes: les ménages sont endettés en raison de l'effondrement de la bulle immobilière et 44% des jeunes sont au chômage.
Transformer l'essai
Si le résultat d'élections locales ne permet pas de prédire celui d'élections générales, le PP va néanmoins tenter de transformer le succès de dimanche en victoire nationale. "C'est un jour formidable pour notre parti", s'est félicité Mariano Rajoy, qui briguera la présidence du gouvernement l'an prochain.
Outre la reconquête de Séville, le PP a pris le contrôle de cinq régions, dont un bastion socialiste, la Castille-La Manche. L'Extrémadure est la seule communauté autonome que pourrait conserver le PSOE, en s'alliant à la coalition de gauche Izquierda Unida (Gauche unie). La ville de Barcelone, que les socialistes géraient depuis trentedeux ans, sera dirigée pour la première fois par les nationalistes catalans (CiU).
"Raz de marée"
Dans la presse espagnole, les regards sont tournés vers les prochaines élections. "L'Espagne exige le changement", titrait "El Mundo". "Le PSOE ouvre à Rajoy le chemin de la Moncloa (palais de la présidence du gouvernement) avec une déroute sans précédent", titrait pour sa part "El Pais", évoquant un "raz de marée" électoral.
Selon les observateurs, José Luis Zapatero souhaite se maintenir au pouvoir le plus longtemps possible pour laisser à l'économie le temps de se relancer et augmenter ainsi les chances des socialistes de remporter les élections de l'an prochain.
"Ils attendent la fin de l'orage. Si l'économie progresse au troisième trimestre et si la situation de l'emploi s'améliore, ils pourront dire que c'est grâce à leurs réformes économiques", souligne Antonio Barroso, analyste chez EuroAsia Group.
ats/vkiss