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Arrestations et procès d'opposants au Bélarus

La répression s'est encore accentuée ces derniers jours. [Victor Drachev]
La répression s'est encore accentuée ces derniers jours. - [Victor Drachev]
Depuis quelques jours, le Bélarus est secoué par des violents affrontements entre des manifestants contre le régime du président Alexandre Loukachenko et les forces de l'ordre. Des centaines de personnes ont été arrêtées et doivent être jugées dès lundi à Minsk.

Depuis la réélection contestée d'Alexandre Loukachenko le 19 décembre dernier, les autorités bélarusses mènent une violente et systématique répression contre ceux qui contestent le résultat du vote et la légitimité du pouvoir. Les heurts se sont encore amplifiés ce week-end quand des rassemblements silencieux ont été organisés pour la fête de l'Indépendance du pays.

Les forces ont tiré des gaz lacrymogènes et interpellé violemment des centaines d'opposants venus participer aux manifestations dans la capitale Minsk surtout, mais aussi dans d'autres villes du pays. Sur les 300 personnes arrêtées, 140 doivent comparaître lundi pour "hooliganisme", un délit passible de 15 jours de prison.

Site d'opposition bloqué

Au cours de ces rassemblements organisés par le mouvement d'opposition "Révolution à travers les réseaux sociaux", les manifestants entendaient exprimer leur opposition sans crier de slogan, en se bornant à frapper dans les mains. Les manifestent souhaitent aussi protester contre la répression en cours et contre les mesures d'austérité prises dans ce petit pays de 10 millions d'habitants confronté à une grave crise économique.

Dimanche, la page d'accueil sur internet du mouvement "Révolution à travers les réseaux sociaux" a été bloquée dans une apparente tentative des autorités d'empêcher les opposants d'organiser d'autres manifestations.

Loukachenko intransigeant

Alexandre Loukachenko demeure sourd aux protestations de la rue. [AFP - NIKOLAI PETROV]
Alexandre Loukachenko demeure sourd aux protestations de la rue. [AFP - NIKOLAI PETROV]

Au pouvoir depuis près de 17 ans mais très critiqué, en particulier en Occident, Alexandre Loukachenko a lancé dimanche à la télévision une sévère mis en garde à ses détracteurs.

"On nous impose des scénarios sans scrupule de révolution de couleur qui ont déjà eu lieu dans d'autres capitales", a déclaré le chef de l'Etat, dans une allusion aux soulèvements populaires qui ont entraîné des changements de régime dans deux autres républiques de l'ex-URSS, l'Ukraine ("révolution orange" en 2004) et la Géorgie ("révolution des roses" en 2003).

"On veut nous mettre à genoux et réduire à zéro notre indépendance. Cela ne se produira pas", a prévenu Alexandre Loukachenko.

Ex-président brièvement arrêté

Les manifestants ont été appréhendés pour la plupart par des policiers en civil. Parmi eux figurent 17 journalistes, dont la plupart ont été relâchés dans la nuit de dimanche à lundi. L'ancien président bélarusse Stanislav Chouchkevitch, aujourd'hui actif dans l'opposition, a déclaré avoir été interpellé et retenu pendant plusieurs heures samedi par la police avant la fête de l'Indépendance.

"Il y a très clairement des mesures illégales prises pour empêcher les manifestations qui ont fait l'objet d'appels sur l'internet", a déploré l'ex-chef d'Etat. "Les autorités déploient des efforts titanesques pour briser la vague de protestations", a renchéri le site d'opposition Charter 97.

afp/boi

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Un déficit abyssal

En plus de la contestation politique, le Bélarus est confronté à sa plus grave crise depuis l'arrivée au pouvoir de Loukachenko il y a 17 ans.

Ce pays à l'économie dirigiste fait face à un déficit commercial abyssal, une inflation galopante et a été contraint de procéder à une très importante dévaluation de sa monnaie.

Le gouvernement a annoncé jeudi un gel des prix à la consommation, ultime recours pour tenter de contenir les effets inflationnistes. Les produits alimentaires et non alimentaires sont concernés.

Il s'agit d'éviter des pénuries qui renforceraient l'inflation.

Minsk a déjà considérablement dévalué sa monnaie. Début juin, le gouvernement a reconnu que l'inflation dépassait les 20% depuis le début de l'année.

Les autorités relativisent toutefois la situation: "Beaucoup se plaignent que les importations sont limitées, qu'on ne peut pas trouver de bananes dans le pays. Et alors, on peut bien vivre six mois sans bananes!", a déclaré le Premier ministre la semaine passée.

Mi-juin, l'autoritaire président bélarusse Alexandre Loukachenko avait prévenu qu'il "fermerait les frontières" si nécessaire pour stabiliser la situation économique. Il avait aussi juré qu'il ne changerait pas le modèle dirigiste de l'économie et nié la réalité de la crise, dénonçant une "panique" artificielle, créée selon lui par les médias.

Le Premier ministre a par ailleurs indiqué que Minsk attendait de la Russie une "baisse conséquente" des prix du gaz à partir du 1er janvier 2012, l'un des facteurs les plus importants expliquant le déficit.

Alexandre Loukachenko a de plus reconnu que sa demande d'un crédit au Fonds monétaire international de huit milliards de dollars allait sans doute être refusée, en raison de l'opposition des Européens et des Américains.