Les pilotes de l'Airbus sont mis en cause
C'est le troisième rapport d'étape du BEA sur l'accident du vol AF447. Mais c'est le premier depuis que les boîtes noires ont été repêchées début mai. Les enquêteurs ont récupéré toutes les données des enregistreurs, que ce soient les paramètres de vol ou les conversations dans le cockpit.
Ce nouveau document confirme qu'il y a bien eu un problème d'indication de vitesse, "vraisemblablement" parce que les instruments de mesure ont givré. Sur les trois sondes Pitot qui équipaient l'avion, celle de gauche a dysfonctionné pendant 29 secondes et celle de secours pendant 54 secondes.
On ignore ce qu'il en est pour la sonde Pitot de droite car ses données ne sont pas conservées dans les boîtes noires. Les incohérences de vitesse ont provoqué la déconnexion du pilote automatique.
Procédure standard pas respectée
Le commandant de bord vient alors de partir en repos. Les deux copilotes se rendent compte qu'ils ont perdu les indications de vitesse mais ils n'observent pas la procédure "IAS douteuse" (IAS pour Indicated AirSpeed). "Les copilotes n'avaient pas reçu d'entraînement à haute altitude à la procédure 'IAS douteuse' et au pilotage manuel", écrit le BEA.
L'alarme de décrochage, qui s'était déclenchée deux fois brièvement au moment de la perte des vitesses, retentit à 2h10. Mais cette fois elle sonne pendant près d'une minute. Cependant, aucun des pilotes ne fait référence à cette alarme et aucun n'identifie formellement la situation de décrochage, affirme la note du BEA.
Le pilote aux commandes a cabré (tiré le manche, faisant prendre de l'altitude à l'appareil), alors qu'en situation de décrochage il convient de piquer pour lui faire gagner en portance. A 2h11, les mesures de vitesse redeviennent cohérentes et le commandant de bord revient dans le cockpit.
Alarme de décrochage arrêtée
Cependant, dans les secondes qui suivent, les vitesses sont de nouveau invalides et l'alarme de décrochage s'arrête. Cette alarme s'arrête parce que le nez de l'appareil est tellement dressé que l'incidence mesurée ne veut plus rien dire. Or c'est le paramètre d'incidence qui active cette alarme.
Le décrochage, lui, continue. Juste avant 2h12, l'avion est à environ 35'000 pieds (10'000m d'altitude), mais il chute de 10'000 pieds par minute. L'A330 percute l'eau à 2h14mn à une vitesse de 200km/h. Aucun de ses occupants n'a survécu.
Le BEA va approfondir encore ses analyses pour "déterminer les causes de l'accident qui figureront dans (son) rapport final". Toutefois, il recommande d'ores et déjà de "revoir le contenu des programmes" d'entraînement des pilotes pour qu'ils comprennent des "exercices spécifiques et réguliers dédiés au pilotage manuel, à l'approche et à la récupération du décrochage y compris à haute altitude".
Il suggère aussi que les tableaux de bord indiquent désormais l'incidence de l'appareil. Actuellement, les pilotes n'ont pas d'accès direct à cette mesure. Les sondes Pitot ont, elles, toutes été changées sur les A330 et les A340. Le modèle qui équipait le Rio-Paris n'existe plus.
AP/rber
Air France donne sa version des faits
Air France a mis en cause la fiabilité de l'alarme de décrochage dans la catastrophe du vol Rio-Paris, après la publication vendredi du nouveau rapport du Bureau d'enquêtes et d'analyse (BEA) pointant une série de défaillances des pilotes pendant l'accident.
"Les multiples activations et arrêts de l'alarme de décrochage en contradiction avec l'état de l'avion ont fortement contribué à la difficulté pour l'équipage d'analyser la situation", a estimé la compagnie française dans un communiqué transmis à l'AFP.
Les familles brésiliennes rejettent le rapport
Les familles brésiliennes des victimes du vol d'Air France qui s'est abîmé en mer le 1er juin 2009 "rejettent" le nouveau rapport d'enquête publié vendredi qui pointe une série de défaillances des pilotes et affirment que la "faille est mécanique et non pas humaine".
"Le BEA, chargé de l'enquête technique, a reconnu lui-même des problèmes dans les sondes Pitot. C'est une contradiction de rejeter maintenant la faute sur les pilotes", a indiqué Nelson Faria Marinho, président de l'Association des victimes brésiliennes, qui a perdu son fils dans l'accident qui a fait 228 morts.