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Syrie: des chars pilonnent la ville de Hama

L'armée syrienne se déploie dans les principaux sièges de la contestation. [Shaam News Network]
Dimanche, l'armée syrienne s'est déployée dans les principaux sièges de la contestation, faisant plus de 130 morts. - [Shaam News Network]
Des chars de l'armée syrienne pilonnaient lundi soir un quartier résidentiel à Hama, ville rebelle du centre du pays où une offensive massive a déjà fait 104 morts depuis dimanche, selon un militant sur place. Une réunion en urgence du Conseil de sécurité de l'ONU était prévue lundi soir.

"Dix chars sont en train de bombarder d'une manière indiscriminée Dawar Bilal, un quartier résidentiel à la périphérie de Hama", a déclaré ce militant, joint par téléphone, alors que le bruit des obus résonnait derrière lui. Selon Abdel Karim Rihaoui, chef de la Ligue syrienne des droits de l'Homme, des tirs nourris étaient entendus lundi soir dans tous les quartiers de Hama.

104 morts depuis dimanche

"L'armée poursuit sa mission dans la ville de Hama, en enlevant les barricades dressées par les groupes de saboteurs aux principales entrées de la ville", a pour sa part annoncé l'agence officielle Sana, citant un responsable syrien. "En ce moment de vastes affrontements ont lieu car ces groupes sont bien organisés, ils utilisent des armes sophistiqués et minent les rues principales", a ajouté l'agence.

Les éventuels nouveaux partis devront rester dans l'ombre du parti Baas de Bachar al-Assad qui demeure "dirigeant de l'Etat et de la société".
Les éventuels nouveaux partis devront rester dans l'ombre du parti Baas de Bachar al-Assad qui demeure "dirigeant de l'Etat et de la société".

L'armée et les forces de sécurité ont déjà tué 100 personnes dimanche et quatre autres lundi à Hama, à 210 km au nord de Damas, ainsi que 41 personnes dans le reste du pays depuis dimanche, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de bilans de plusieurs organisations de défense des droits de l'Homme (lire: Répression en Syrie).

Le président Bachar al-Assad a cependant félicité lundi son armée à l'occasion du 66e anniversaire de sa création. "Vous tous représentez l'orgueil et la fierté", a affirmé al-Assad selon l'agence officielle Sana, faisant fi des réactions internationales horrifiées après l'une des journées les plus sanglantes depuis le début du mouvement de protestation le 15 mars.

Nous pouvons "faire échouer ce nouvel épisode du complot bien ourdi, qui vise à morceler la Syrie, en prélude à la division de la région entière en petits Etats qui se battent entre eux", a martelé le président syrien, qui s'est aussi rendu lundi au chevet de soldats hospitalisés.

Vaste opération militaire

Depuis le début de la révolte, les autorités accusent des "groupes armés" et des "terroristes" de répandre le chaos dans le pays, en s'infiltrant parmi les manifestants. Située à 210 km au nord de Damas, la ville de Hama a été le théâtre d'immenses manifestations contre le pouvoir ces dernières semaines. Le pouvoir, qui s'en était retiré, cherchait depuis à soumettre cette ville déjà symbole de la lutte contre le régime depuis la répression en 1982 d'une révolte des Frères musulmans, qui avait fait 20’000 morts.

Lundi, outre les morts à Hama, les forces de sécurité ont aussi tué deux personnes, dont un enfant de 13 ans, à al-Boukamal (est), selon le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane, joint par téléphone en Grande-Bretagne. En outre, des habitants ont vu "plus de 80 chars et des équipements militaires" se diriger vers Deir Ezzor (est), où 19 personnes ont été tuées dimanche, faisant craindre "les préparatifs d'une vaste opération militaire", a-t-il ajouté.

Les chars sont entrés dans al-Houla, au nord-ouest de Homs (centre), où des tirs nourris ont été entendus et 15 personnes blessées, a expliqué Rami Abdel Rahmane. Ils ont aussi encerclé Zabadani, à 60 km au nord-ouest de Damas, où l'armée a dressé des barricades dans la ville, a déclaré Abdel Karim Rihaoui. La répression n'a pas empêché les manifestations. Des milliers de personnes ont ainsi défilé dans les rues de Salamiyé, près de Hama, en soutien aux victimes des violences.

Réunion du Conseil de sécurité

Cette violence a fait de dimanche l'une des journées les plus sanglantes depuis le début du mouvement de protestation le 15 mars et suscité de vives condamnations internationales (lire ci-contre). Une réunion en urgence du Conseil de sécurité de l'ONU était prévue lundi soir.

Le pouvoir tente depuis plusieurs semaines de soumettre Hama, théâtre d'immenses manifestations contre le pouvoir. Cette ville était déjà un symbole de la lutte contre le régime syrien depuis la répression en 1982 d'une révolte des Frères musulmans, qui avait fait 20.000 morts.

afp/bkel

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Les condamnations pleuvent

Les condamnations se sont multipliées dimanche dans le monde quelques heures seulement après l'intervention de l'armée syrienne à Hama.

Barack Obama s'est dit "horrifié par l'usage qu'a fait le gouvernement syrien de la violence et de la brutalité contre son propre peuple". Les Etats-Unis vont "dans les jours à venir continuer à augmenter la pression sur le régime syrien et à collaborer avec d'autres pays pour isoler" le régime du président Bachar al-Assad, a annoncé le président américain.

Ban Ki-moon a "vigoureusement condamné l'usage de la force contre la population civile" en demandant instamment au gouvernement d'"arrêter cette violente offensive". Le secrétaire général de l'ONU a rappelé au régime de Damas qu'il est responsable de "tous les actes de violences commis" contre la population.

A Bruxelles, la cheffe de la diplomatie européenne Catherine Ashton s'est déclarée "choquée".

Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a lui condamné "avec la plus extrême fermeté" la poursuite de la répression, relevant lui aussi son caractère "particulièrement inacceptable en cette veille du mois de Ramadan".

Comme l'Allemagne, le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini a réclamé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU.

Le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, s'est déclaré "consterné".

La Turquie a appelé le régime syrien "à arrêter ses opérations (militaires) et à s'orienter vers des méthodes politiques, vers le dialogue et les initiatives pacifiques pour parvenir à une solution".