Deir ez-Zor est un des foyers du mouvement de contestation du régime du président Bachar al Assad. "Les membres du renseignement militaire ont pointé leur AK-47 sur la mosquée et ont atteint le principal système de climatisation qui a pris feu", a raconté un habitant de cette ville de l'Est, joint par téléphone. "Les fidèles ont couru se cacher dans des ruelles", a ajouté ce technicien habitant près de la mosquée Harouil, dans le quartier d'Ordi.
L'offensive lancée par des soldats et des membres du renseignement militaire s'est intensifiée cette semaine contre cette ville de la vallée de l'Euphrate, près de la frontière avec l'Irak. Les militaires sont appuyés par des chars et des véhicules blindés. "Assad veut étouffer définitivement le soulèvement avant que la pression internationale ne devienne trop forte pour lui", estime un habitant de Deir ez-Zor.
Dix morts vendredi
Comme chaque vendredi depuis le début du mouvement de contestation le 15 mars, les manifestants se sont rassemblés suite à des appels lancés via le réseau social Facebook. Ils se sont regroupés cette semaine autour du slogan "Nous ne nous soumettrons qu'à Dieu".
A Deir ez-Zor où des dizaines de personnes sont mortes le week-end dernier, un civil a été tué, selon un militant sur le terrain. En début d'après-midi, quelque 8000 personnes se sont rassemblées à Lattaquié (nord) et d'autres manifestations avaient lieu à Hama et Homs (centre), selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). L'organisation a précisé que les forces de sécurité ont ouvert le feu à Hama, où deux manifestants ont perdu la vie.
Selon les comités de coordination locale, sept personnes ont également été tuées par balles vendredi dans les faubourgs damascènes de Sakba et Douma, quatre dans la ville commerçante d'Alep et deux autres dans la province d'Idlib, près de la frontière turque.
Lettre du président turc
La répression en Syrie s'est accentuée depuis le début du mois du ramadan, en dépit des menaces de nouvelles sanctions américaines et d'appels de la Turquie et des pays arabes à cesser les attaques. Les prières nocturnes du ramadan, après la rupture du jeûne, sont l'occasion de rassemblements contre la famille Assad, issue de la minorité chiite alaouite, au pouvoir depuis 41 ans.
Dans une lettre adressée à son homologue syrien cette semaine, le président turc, Abdullah Gül, a conseillé à Bachar al Assad d'agir avant qu'il ne soit trop tard, selon l'agence de presse officielle Anatolie. "En dirigeant le changement au lieu d'être emporté par les vents du changement, vous vous placerez dans une position historique", poursuit-il.
Après Paris, le chef de la diplomatie italienne Franco Frattini a lui aussi lancé vendredi "un appel fort aux autorités syriennes pour la libération immédiate" du président de la Ligue des droits de l'homme Abdel Karim Rihaoui.
Près de 2000 morts
Face à la poursuite de la répression, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a souhaité jeudi que d'autres pays, en particulier en Europe et la Chine, principaux acteurs dans le secteur énergétique syrien, s'associent aux Etats-Unis pour inciter Bachar al-Assad à partir.
Malgré la poursuite de la répression, la Russie et la Chine, soutenues par l'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud, se sont opposées mercredi soir au Conseil de sécurité des Nations unies à l'idée de nouvelles sanctions contre la Syrie. Selon les derniers chiffres de l'ONU, près de 2000 civils ont péri depuis le début de la révolte en mars.
ats/vkiss
Rassemblement à Genève
Une trentaine de personnes se sont rassemblées vendredi devant le consulat de Syrie, à Genève, pour dénoncer la répression exercée sur la population syrienne par le gouvernement de Bachar el Assad. Elles ont regretté l'inertie de la communauté internationale. "Il y a tous les jours des morts", a relevé un manifestant venu exprès de Bienne. Pour ce père de famille, l'ONU se montre bien trop timide face aux exactions commises par le régime de Damas. Contrairement à la Libye, où il y a eu intervention, la Syrie ne fait l'objet d'aucune pression internationale, a-t-il souligné.
Le président des Verts, Ueli Leuenberger, s'est joint aux manifestants. Le conseiller national a déploré le peu de soutien reçu par la population syrienne. A ses yeux, la Suisse pourrait aussi "faire plus". L'élu entend notamment discuter avec ses collègues de la Commission des affaires étrangères d'un isolement économique de la Syrie. Ueli Leuenberger s'est également étonné de certains propos tenus par des membres de la diaspora syrienne à Genève, favorables au gouvernement de Bachar el Assad. "Il est injustifiable et impensable de ne pas réagir à de tels massacres", a-t-il déclaré.