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Syrie: l'ONU décide une commission d'enquête

Lundi, la haut-commissaire Navy Pillay a fait état de 2200 morts depuis le début de la crise en mars dernier. [Salvatore Di Nolfi]
Lundi, la haut-commissaire Navy Pillay a fait état de 2200 morts depuis le début de la crise en mars dernier. - [Salvatore Di Nolfi]
Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a condamné mardi avec force les violences en Syrie et décidé d'y envoyer d'urgence une commission internationale d'enquête. La résolution présentée par l'Union européenne (UE) a été adoptée par 33 voix sur 47 pays membres.

"Il s'agit d'une réponse très claire du Conseil aux violations graves et systématiques en cours en Syrie", a affirmé le représentant de la Pologne au nom de l'UE. Le vote à une large majorité d'une condamnation ferme de la répression en Syrie a été salué comme un succès par plusieurs pays et ONG.

Quatre pays ont voté contre: la Chine, la Russie, Cuba et l'Equateur. Neuf se sont abstenus: l'Angola, le Bangladesh, le Cameroun, Djibouti, l'Inde, la Malaisie, la Mauritanie, les Philippines et l'Ouganda. Le siège de la Libye est vacant depuis son expulsion.

Soutien des pays arabes

Les quatre pays arabes membres du Conseil, soit la Jordanie, le Koweït, le Qatar et l'Arabie saoudite, ont voté pour la résolution soutenue par tous les pays européens, dont la Suisse, et les Etats-Unis.

La Russie et la Chine avaient demandé le vote, en regrettant l'échec des consultations pour obtenir un consensus. Ils ont expliqué que la résolution n'est pas équilibrée et ne prend pas en considération la volonté de dialogue des autorités de Damas.

La Syrie a dénoncé "une intervention politique extérieure dans un pays indépendant et souverain" et une résolution "politisée" qui envoie "un message erroné".

Le texte condamne avec fermeté "la poursuite de violations graves et systématiques", dont des exécutions sommaires, l'usage excessif de la force, l'assassinat et la persécution de manifestants et défenseurs des droits de l'homme, les détentions arbitraires, les disparitions forcées, les tortures et mauvais traitements de détenus, y compris des enfants.

Avant novembre

Il demande à la Syrie de mettre immédiatement fin à la répression, de libérer tous les prisonniers de conscience, de donner accès aux médias et aux organisations humanitaires sans restrictions.

Le texte décide l'envoi d'urgence en Syrie d'une commission internationale indépendante, nommée par le président du Conseil, pour enquêter sur toutes les violations des droits de l'homme depuis le mois de mars, y compris de possibles crimes contre l'humanité. Elle devra aussi vite que possible établir les faits et identifier le cas échéant les responsables en vue de les traduire en justice. Son rapport devra être publié avant la fin novembre.

Le Conseil avait déjà tenu le 29 avril une session spéciale consacrée à la Syrie et demandé à la Haut Commissaire aux droits de l'homme d'enquêter. Damas a refusé de donner accès à la mission d'enquête de l'ONU.

Crimes contre l'humanité

Son rapport, publié jeudi dernier à partir de témoignages, est accablant. Selon l'ONU, des crimes qui peuvent constituer des crimes contre l'humanité ont été commis par les forces de sécurité syriennes et plus de 2200 personnes ont été tuées depuis le mois de mars.

Selon la Haut Commissaire Navi Pillay, la répression se poursuit et les promesses de réformes du régime de Damas n'ont pas été tenues. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon avait déploré lundi que le président syrien Bachar Al Assad n'ait pas donné suite à son engagement de mettre un terme aux opérations militaires.

ats/cht

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L'ambassadeur américain dans le sud du pays

L'ambassadeur américain à Damas, Robert Ford, s'est rendu mardi matin dans le sud de la Syrie à Jassem, où 15 manifestants avaient été tués vendredi. Selon l'ambassade, ce voyage s'inscrivait dans le cadre d'une visite diplomatique de routine.

Les autorités syriennes n'apprécient pas ce genre d'escapade: les ambassadeurs des Etats-Unis et de la France à Damas, s'étaient rendus le 8 juillet à Hama, lors de visites séparées, provoquant l'ire des autorités. Hama, située à 210 km au nord de Damas, avait été début juillet le théâtre de deux manifestations monstres contre le président Assad, réunissant à chaque fois environ un demi-million de personnes.

La visite de Robert Ford visait alors à montrer que "les Etats-Unis sont engagés à soutenir le droit du peuple syrien à se rassembler et à s'exprimer librement à travers des manifestations pacifiques". Le ministère syrien de l'Intérieur avait vivement protesté, accusant l'ambassadeur d'avoir rencontré des "saboteurs" et de les avoir incités "à la violence, à manifester et à refuser le dialogue".

Washington s'était dit "consterné" par ces critiques, affirmant avoir informé Damas à l'avance de cette visite. Trois jours plus tard, les ambassades de France et des Etats-unis à Damas avaient été attaquées par des partisans du régime.

Nouveau train de sanctions de l'Europe

Les pays de l'Union européenne ont annoncé avoir formellement adopté mardi un nouveau train de sanctions contre la Syrie prévoyant un gel des avoirs et une interdictions de visas contre 15 nouvelles personnes et 5 sociétés proches du régime.

L'UE a déjà adopté une série de sanctions à l'encontre de la Syrie, dont un gel des avoirs et une interdiction de voyage visant 35 personnes dont le président Bachar al-Assad et quatre entreprises, ainsi qu'un embargo sur les armes.

Elle travaille en outre à un éventuel embargo sur les produits pétroliers importés du pays. "Les discussions avancent bien" sur ce point, selon un diplomate, mais une décision n'a pas encore été prise. L'Europe achète 95% du pétrole exporté par la Syrie, ce qui représente un tiers des recettes du pays.