"C'est une politique rigoureuse pour permettre à la France de rester souveraine sur le plan économique et sur le plan social", a souligné François Fillon lors de sa conférence de presse, organisée après une dernière réunion d'arbitrage sous l'égide de Nicolas Sarkozy dans l'après-midi à l'Elysée.
Grâce aux économies prévues, le gouvernement vise désormais un déficit public à 4,5% du PIB en 2012, contre 4,6% auparavant. Par mesure de "réalisme", le gouvernement a en revanche revu à la baisse ses hypothèses de croissance, tablant désormais sur une hausse du PIB de 1,75% en 2011 et en 2012, au lieu des 2% et 2,25% prévus précédemment.
Le plan d'économies -François Fillon s'est refusé à parler de "mesures d'austérité", expression qu'il réserve à des pays comme l'Italie, l'Espagne, le Portugal, l'Irlande et la Grèce- comporte quatre grandes orientations.
Première mesure: la mise en place de "prélèvements spécifiques", à commencer par une taxe exceptionnelle de 3% pour les ménages ayant un revenu fiscal supérieur à 500'000 euros par an. Cette mesure devrait rapporter à l'Etat "autour de 200 millions d'euros", a évalué le Premier ministre.
Les prélèvements sociaux (CSG, CRDS, etc) sur les revenus du patrimoine passeront en outre de 12,3% à 13,5%. Ce relèvement de 1,2 point devrait générer 190 millions d'euros de recettes en 2011 et 1,3 milliard d'euros en 2012.
Deuxième mesure: le gouvernement a décidé de réduire une série de niches fiscales, touchant notamment à l'une des mesures phares du début de quinquennat de Nicolas Sarkozy, la défiscalisation des heures supplémentaires, symbole du "travailler plus pour gagner plus". A partir du 1er janvier prochain, les heures supplémentaires et complémentaires seront intégrées dans la base de calcul de "l'allégement Fillon", cet allégement de cotisations sociales pour les employeurs rémunérant leurs salariés entre 1 et 1,6 fois le SMIC.
Cette mesure devrait rapporter 600 millions d'euros de recettes supplémentaires à la Sécurité sociale. "Les salariés continueront de bénéficier exactement des mêmes avantages", a assuré le Premier ministre, mais cet aménagement limitera "les effets d'aubaine et d'optimisation pour les entreprises". En outre, le forfait social va être relevé de deux points. Les sommes versées par les employeurs à leurs salariés dans le cadre de l'épargne salariale ou de la retraite complémentaire ne seront plus taxées à hauteur de 6% mais de 8%. Cela devrait rapporter à la Sécurité sociale 410 millions d'euros en 2012.
Mickey et Astérix seront eux aussi mis à contribution. Actuellement, les parcs d'attraction bénéficient d'un taux réduit de TVA (5,5 alors que les barbotages dans les parcs aquatiques sont taxés à 19,6%. Ce taux normal s'appliquera désormais aussi aux droits d'entrée dans les parcs à thème, pour un rendement espéré de 90 millions d'euros en année pleine.
Troisième mesure: les mesures liées à la santé publique. La fiscalité sur le tabac et les alcools forts sera alourdie et une taxe sur les boissons sucrées sera instaurée. Le tabac augmentera de 6% dès octobre, puis de 6% encore en 2012, ce qui devrait renflouer les caisses de la Sécu de 90 millions d'euros en 2011 et de 600 millions l'année suivante. La fiscalité sur les alcools affichant au moins 40 degrés subira aussi une hausse.
"Le vin, les rhums et les productions régionales ne sont pas concernés par cette mesure", assure Matignon, qui en attend 340 millions d'euros en 2012. A compter du 1er janvier prochain, les boissons sucrées seront taxées à même hauteur que le vin, ce qui devrait générer 120 millions d'euros de recettes. Seront exemptés les eaux, les jus de fruits sans sucres ajoutés et les boissons contenant des édulcorants.
Et quatrième mesure: l'Etat compte faire un "effort supplémentaire" de réduction de ses dépenses d'un milliard d'euros en 2012.
ap/mej
Pas d'inquiétude" sur la note AAA de la France
D'autre part, François Fillon s'est dit confiant mercredi sur la note de la dette souveraine de la France, qui bénéficie actuellement d'un triple A, la meilleure possible, auprès des trois grandes agences de notation.
"Je n'ai pas d'inquiétude sur la notation de la France", a déclaré François Fillon sur TF1 en relevant que les agences Standard & Poor's, Moody's et Fitch avaient "toutes signifié que la France bénéficiait de la plus haute notation en matière financière et de manière durable".
"Mais, a-t-il ajouté, il est important que la France respecte ses engagements en matière de déficit." Des rumeurs sur une possible dégradation de la note souveraine française après celle des Etats-Unis par Standard & Poor's début août ont provoqué un effondrement des cours à la Bourse de Paris le 10 août dernier, qui ont poussé Moody's et Fitch à redire qu'elles maintenaient le "AAA" et la perspective stable de la note française.
Standard & Poor's a elle aussi réitéré depuis que la France continuait à bénéficier de sa note optimale "AAA" avec perspective stable, ce qui permet aux autorités françaises de se financer à des taux d'intérêts avantageux sur les marchés financiers.
Le PS dénonce un rafistolage
Le président du groupe PS à l'Assemblée nationale Jean-Marc Ayrault qualifie mercredi de "rustines" les mesures annoncées par le Premier ministre François Fillon pour réduire l'endettement de la France. "Où est la justice, où est le sérieux dans ce raclement des fonds de tiroirs?" lance-t-il dans un communiqué diffusé après la conférence de presse du chef du gouvernement.
"Alors que depuis 10 ans, la politique de défiscalisation en faveur des riches et des entreprises du CAC 40 fait perdre plus de 100 milliards au budget de l'Etat et plombe la dette de la France, les responsables de cette faillite veulent faire croire qu'un coup de rabot de quelques niches fiscales trop voyantes va empêcher leur Titanic de couler", poursuit le député-maire de Nantes.
Pour Jean-Marc Ayrault, "plutôt que de se remettre en question, le pouvoir continue d'amuser la galerie avec quelques rustines dont le symbole est la taxation exceptionnelle des plus hauts revenus".