Les insurgés libyens ratissent Tripoli dans l'espoir d'arrêter le plus ancien dirigeant arabe et africain, arrivé au pouvoir après un coup d'Etat en 1969 (lire Insurrection en Libye). Mais le "Guide" libyen pourrait bien avoir déjà déserté la capitale. Dans ce cas, il ne disposerait que d'une marge de manoeuvre réduite, dans un pays dont le point faible est le Sud-sahélien aux frontières poreuses, selon la rébellion.
Trois points de chute en Libye
Pour Abdelmoneim Al-Houni, représentant du Conseil national de transition (CNT), l'organe politique des rebelles, auprès de la Ligue arabe, "Mouammar Kadhafi n'a que trois possibilités en Libye: la région de Jefra, dans le désert, l'oasis de Traghen, dans l'extrême-sud à la frontière avec le Niger, et Syrte, sa ville natale".
Né, selon sa propre légende, sous une tente dans la ville côtière située à 450 km à l'est de la capitale, il pourrait y compter sur sa tribu, les Guedadfa, dont les membres sont encore bien implantés et armés.
Les rebelles peinent d'ailleurs à négocier avec tous les chefs de tribu leur entrée sans violence dans ce grand port, connu depuis l'Antiquité, où le colonel Kadhafi avait fait construire un centre de conférences, au style grandiloquent et moderne, anomalie architecturale dans la modeste localité.
S'il ne trouve pas refuge chez les siens, Mouammar Kadhafi, qui fait face depuis février à une insurrection qui s'est transformée en conflit armé, dispose d'autres réseaux, tribaux là aussi, chez les Touaregs. Grâce au clientélisme qui lui a si longtemps réussi, le Guide libyen a pu compter sur eux en leur garantissait un intéressement sur le commerce transfrontalier en échange de la stabilité de la région.
Mais les nouvelles victoires de la rébellion pourraient changer la donne. Certains Touaregs ont en effet déjà rejoint les insurgés en ouvrant le front du sud à Morzuk dans la région du Fezzan, un noeud de communication vital vers le Niger, le Tchad et l'Algérie organisé autour de la capitale régionale Sebha où les Guedadfa jouent un rôle politique et économique clé.
Algérie, Afrique du Sud, Venezuela ou Nicaragua
Au-delà des régions du sud, Mouammar Kadhafi pourrait également traverser les frontières et tirer profit de l'absence de contrôle au sud du pays, rejoignant l'Algérie, par exemple. Dans les rues de Benghazi, le ressentiment est grand à l'égard du voisin algérien accusé d'avoir soutenu Kadhafi jusqu'au bout.
Quelques jours avant la chute de son QG, des informations de presse prêtaient à Kadhafi l'intention de s'exiler en Afrique du Sud, voire au Venezuela, annonçant même l'arrivée dans la région d'avions qui le transporteraient avec sa famille vers l'un des deux pays.
Si l'Afrique du Sud a démenti lundi par la voix de sa ministre des Affaires étrangères Maite Nkoana-Mashabane tout projet sud-africain d'exfiltrer Kadhafi, le président vénézuélien Hugo Chavez a alimenté les rumeurs sur un possible exil du fantasque "Guide" du côté de Caracas en lui renouvelant mardi son soutien.
Son ministre des Affaires étrangères, Nicolas Maduro, à quant lui refusé de dire si son pays était prêt à accorder l'asile politique à Kadhafi si celui-ci en faisait la demande, mais il n'a pas jugé bon d'écarter cette hypothèse.
Brouillant davantage les cartes, le Nicaragua de Daniel Ortega, un autre "ami" de Kadhafi, a laissé la porte ouverte à son possible exil sur son territoire.
L'ancien numéro deux du régime, Abdessalem Jalloud, qui a fait défection, n'imagine lui d'autre sortie pour Kadhafi que la mort s'il n'a pas déjà quitté Tripoli. "Et comme il n'a pas le courage de se suicider, il pourrait charger l'un de ses proches de le tuer", a-t-il assuré à la chaîne satellitaire al-Arabiya.
ats/afp/hof