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Réunion d'urgence après des violences au Caire

Un couvre-feu a été instauré après les violents heurts de dimanche soit au Caire. [AP Photo]
Un couvre-feu a été instauré après les violents heurts de dimanche soit au Caire. - [AP Photo]
Le Premier ministre égyptien Essam Charaf a appelé lundi à une réunion d'urgence du gouvernement, au lendemain des affrontements entre chrétiens coptes et forces de l'ordre qui ont fait 24 morts au Caire.

La réunion devrait avoir lieu dans l'après-midi, alors que les heurts ont relancé les craintes de violences intercommunautaires dans le pays. Au moins 40 personnes ont été arrêtées dans la nuit à la suite des affrontements qui ont aussi fait plus de 200 blessés, a indiqué à l'AFP un responsable de la sécurité, sans préciser combien étaient musulmans ou chrétiens.

Ces violences, les plus meurtrières depuis la révolte qui a renversé le président Hosni Moubarak en février, ont eu lieu en marge d'une manifestation de coptes protestant contre l'incendie d'une église dans le gouvernorat d'Assouan (sud). Un couvre-feu a ensuite été décrété dans le centre de la capitale de 02H00 à 07H00 (00H00 à 05H00 GMT) pour tenter de rétablir le calme.

Appels au calme

Dans la nuit, le Premier ministre avait appelé chrétiens et musulmans "à la retenue" et à ne pas céder aux "appels à la sédition". "Ce qui se passe, ce ne sont pas des affrontements entre musulmans et chrétiens, ce sont des tentatives de provoquer le chaos et la sédition", avait dit Essam Charaf sur sa page officielle sur Facebook.

La manifestation avait commencé pacifiquement dans la capitale égyptienne. [KEYSTONE - AP Photo/Ahmed Ali]
La manifestation avait commencé pacifiquement dans la capitale égyptienne. [KEYSTONE - AP Photo/Ahmed Ali]

Dans des déclarations rapportées par l'agence Mena, le Premier ministre avait en outre estimé qu'il s'agissait d'un "complot pour éloigner l'Egypte des élections". Les premières législatives depuis le départ de Hosni Moubarak doivent se tenir à partir du 28 novembre.

Ahmed al-Tayyeb, grand imam d'al-Azhar, la plus haute institution de l'islam sunnite, a appelé de son côté à des discussions entre les membres de la Famille égyptienne, une organisation réunissant des religieux musulmans et chrétiens, "afin de tenter de contenir la crise", selon la télévision.

Causes confuses

Les raisons qui ont fait dégénérer ce qui avait commencé comme une marche pacifique de milliers de Coptes du quartier de Chobra vers Maspero, où se trouve la télévision publique dans le centre du Caire, restent confuses.

L'Egypte connaît depuis plusieurs mois une montée des tensions confessionnelles, alimentées notamment par des querelles de voisinage et des différends sur la construction d'églises. Les Coptes, qui représentent de 6 à 10% des Egyptiens, s'estiment discriminés dans une société en grande majorité musulmane. Ils ont été visés par plusieurs attentats, en particulier celui du Nouvel an contre une église à Alexandrie (23 morts).

Le 7 mai, 15 personnes avaient été tuées et plus de 200 blessées au Caire lorsque des musulmans avaient attaqué deux églises, affirmant qu'une chrétienne convertie à l'islam était détenue dans l'un des lieux de culte.

Plusieurs ministres européens ont exprimé leur inquiétude lundi au lendemain des affrontements entre chrétiens coptes et forces de l'ordre qui ont fait 24 morts dans la capitale égyptienne.

Inquiétudes européennes

"Je suis très préoccupé par les informations que nous recevons du Caire", a dit le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, à son arrivée à Luxembourg pour une réunion avec ses homologues européens. "Il s'agit d'une situation que nous ne pouvons pas du tout accepter", a-t-il dit.

Le chef de la diplomatie britannique, William Hague, s'est déclaré "très préoccupé et alarmé" tandis que la chef de la diplomatie de l'UE, Catherine Ashton a rappelé que la liberté religieuse "est absolument fondamentale".

Le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, a dénoncé de son côté des "violences très graves" contre la communauté chrétienne d'Egypte et souhaité "une condamnation unanime" de l'UE. La ministre espagnole des Affaires étrangères, Trinidad Jimenez, a évoqué "une situation inquiétante".

afp/cab


LE PATRIARCHE COPTE DÉNONCE DES "INFILTRÉS"

Les affrontements sont dus à des "inconnus infiltrés", a déclaré lundi le chef de l'église copte orthodoxe, le patriarche Chénouda III.

"La foi chrétienne dénonce la violence. Des inconnus se sont infiltrés dans la manifestation et ont commis les crimes que l'on impute aux Coptes", a affirmé le patriarche dans une déclaration publiée après une rencontre avec 70 responsables de son Eglise.

"Les Coptes ont souffert à maintes reprises de problèmes sans que les agresseur ne soient poursuivis", a-t-il ajouté, en appelant les autorités à "traiter les racines de ces problèmes".

Le patriarche a également invité les Coptes à un jeûne de trois jours à partir de mardi "pour ramener la paix en Egypte".

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Les Coptes d'Egypte: une communauté très ancienne

Les Coptes d'Egypte constituent la communauté chrétienne la plus nombreuse du Moyen-Orient et l'une des plus anciennes.

Cette minorité religieuse est généralement estimée entre 6 et 10% des quelque 80 millions d'Egyptiens. L'Eglise copte, elle, parle de 10 millions de fidèles.

Les Coptes orthodoxes, avec à leur tête le patriarche Chenouda III, constituent la grande majorité de cette communauté qui comptent également des catholiques.

Les Coptes remontent à l'aube du christianisme, à l'époque où l'Egypte est intégrée à l'empire romain puis à l'empire byzantin après la disparition de la dernière dynastie pharaonique des Ptolémées, d'origine grecque.

Les Coptes sont présents à travers tout le pays, avec des concentrations plus fortes en Moyenne-Egypte.

On les trouve également dans toutes les catégories sociales, des éboueurs misérables du Caire ("zabbaline") aux grandes familles patriciennes comme les Boutros-Ghali.

Faiblement représentés au gouvernement, les Coptes s'estiment tenus à l'écart de nombreux postes de la justice, des universités ou encore de la police. Ils déplorent également une législation très contraignante pour l'édification des églises, alors que le régime pour les mosquées est très libéral.