Le nouveau gouvernement sera chargé de "mettre en oeuvre" le plan européen anti-crise décidé à Bruxelles fin octobre, avant des élections anticipées, selon un communiqué de la Présidence de la république grecque diffusé après une rencontre entre le leader de l'opposition de droite Antonis Samaras et le Premier ministre socialiste Georges Papandréou à la résidence du Président de la République Carolos Papoulias.
Alors que la Grèce se bat contre la montre pour éviter avant la mi-décembre faillite et exclusion de l'euro, l'accord politique obtenu de haute lutte dans un pays très fortement polarisé politiquement, met fin à un week-end d'intense guerre des nerfs entre les deux rivaux politiques, par médias et états-majors interposés.
Il suspend aussi une crise politique politique aiguë, qui a conduit au retrait d'un projet de référendum par le Premier ministre censé ratifier le plan européen anti-crise, décidé par la zone euro dans la nuit du 26 au 27 octobre à Bruxelles.
Réunion à l'Eurogroupe
Georges Papandréou voulait éviter un "vide du pouvoir" et conditionnait sa démission à un accord de gouvernement, mais Antonis Samaras réclamait l'exact inverse. Aucun nom de Premier ministre n'a encore été fixé, les deux hommes devant avoir un nouvel entretien lundi pour le désigner et faire ensemble la composition du nouveau gouvernement.
Sauf imprévu pendant la nuit, cet accord permet au pays d'être représenté lors de la réunion de l'Eurogroupe lundi par l'actuel ministre des Finances et vice-Premier ministre sur le départ, Evangélos Vénizélos, en charge des négociations depuis mi-juin.
"Le pays ne peut pas perdre plus de temps", avait insisté le porte-parole du gouvernement Ilias Mosialos peu avant la rencontre, estimant qu'en cas d'accord le nouveau gouvernement pourrait être investi et recevoir la confiance d'ici la fin de la semaine.
Vénizélos favori
Parmi les favoris cités par la presse, figurent les noms du ministre des Finances Evangélos Vénizélos, ex-rival malheureux de Georges Papandréou, et celui du conseiller du Premier ministre et ancien vice-président de la Banque centrale européenne (2002-2010), Lucas Papademos. Le calendrier apparaît d'autant plus serré que la Grèce entend commencer à négocier lundi lors d'un conseil de l'Eurogroupe le versement d'un soutien de 80 milliards d'euros d'ici fin février, dans le cadre de l'accord de désendettement conclu par la zone euro fin octobre à Bruxelles.
Mais elle doit aussi, selon M. Mosialos, ratifier ce plan au Parlement d'ici fin 2011, qui inclut de nouveaux douloureux sacrifices pour les Grecs.
Antonis Samaras, devenu au fil du psychodrame vécu par la Grèce et la zone euro depuis une semaine le pivot essentiel de cette partie politique, avait réitéré samedi son refus de soutenir en l'état et sous forme "d'un chèque en blanc" de telles mesures d'austérité.
Fort à 60 ans d'une carrière politique construite pour l'essentiel sur l'inflexibilité, il a dénoncé depuis deux ans le "dosage" de la politique dictée par les créanciers du pays, jugeant qu'en imposant la rigueur à tout prix, elle risque de tuer l'économie. Mais face au risque d'un dérapage incontrôlé du pays, il s'est pour la première fois engagé à soutenir le vote du plan de Bruxelles.
Grecs europhiles
Une avancée qui prend acte de l'europhilie que les Grecs continuent de nourrir. Selon trois sondages parus dimanche, ils plébiscitent l'euro à près de 80%, en dépit de la grogne contre l'austérité qui a semé la fronde contre Georges Papandréou dans la majorité socialiste, fait gronder la rue et grippe à coup de grèves à répétition la machine étatique (lire: Crise grecque).
"L'absence d'un consensus risquerait d'inquiéter nos partenaires européens sur notre volonté de rester dans l'euro", avait mis en garde samedi Georges Papandréou.
Même l'influente Eglise orthodoxe de Grèce est intervenue dimanche pour prêcher la "responsabilité" aux acteurs du grand marchandage politique, un appel également lancé par le patronat. "Le pays a besoin d'avoir lundi un nouveau gouvernement, qui évitera la faillite et le retour à la drachme", écrivait pour sa part dans son éditorial le journal libéral Kathimérini, sous un titre dénonçant des "Marchandages à bord du Titanic".
Pour diriger ce nouveau gouvernement, Kathimérini avançait aussi le nom de Stavros Dimas, ex-commissaire européen à l'environnement, qui flanquait samedi M. Samaras lors de l'intervention télévisée de ce dernier.
afp/pima
Papandréou quitte le pouvoir lessivé
Georges Papandréou, fils et petit-fils de Premier ministre, qui va abandonner le pouvoir, quitte le gouvernement grec KO debout, lessivé par une bataille titanesque contre la dette, les marchés et son opinion publique, après avoir commis une erreur politique majeure en fin de parcours.
Le Premier ministre grec, 59 ans, qui avait comparé l'économie grecque à un bateau en train de couler lorsqu'il réclamait l'aide de ses partenaires européens en avril 2010, la laisse dans un état proche de celui du Titanic après sa collision avec l'iceberg, de l'avis de nombreux commentateurs et analystes.
Pourtant ce social-démocrate réformiste convaincu, né et élevé aux Etats-Unis, affichant une certaine vision de l'Europe et peu suspect de corruption personnelle, à la différence d'une partie du personnel politique grec, avait fait un démarrage impeccable lors de son arrivée au pouvoir en octobre 2009: il n'avait pas eu peur de s'attaquer aux déficits et dettes accumulés par l'incurie de ses prédécesseurs.
Ancien ministre des Affaires étrangères, crâne dégarni et moustache blanche, Georges Papandréou avait aussi promis une "remise en ordre" de l'Etat grec, plombé par le clientélisme et la corruption.
Depuis mai 2010 et la première aide financière versée par l'UE et le FMI à la Grèce, il a bataillé pour réussir l'impossible: satisfaire les créanciers du pays qui demandent de plus en plus d'austérité et satisfaire l'électorat grec rétif à cette potion amère.