Dix-huit des 22 membres de la Ligue ont voté en faveur d'un appel à tous les courants de l'opposition à "se mettre d'accord sur un projet unique pour la gestion de la transition prochaine en Syrie", a expliqué lors d'une conférence de presse, Hamad ben Jassem al-Thani, qui a présidé samedi une réunion de la Ligue arabe sur la Syrie.
Il a précisé que l'institution panarabe souhaitait rencontrer tous les courants de cette opposition sous trois jours au Caire pour parler de ce projet. La suspension de l'adhésion de la Syrie à la Ligue arabe était l'une des revendications principales de l'opposition syrienne dont les différents courants se sont succédé au Caire ces derniers jours pour rencontrer Nabil al-Arabi, le secrétaire général de la Ligue arabe.
Engagements non respectés
Les ministres arabes ont également appelé au retrait des ambassadeurs arabes à Damas, a déclaré le responsable qatari qui s'exprimait à l'issue d'une réunion ministérielle consacrée aux mesures à prendre à l'encontre de Damas, qui a accepté il y a dix jours le plan de sortie de crise de la Ligue sans pour autant l'appliquer. (Lire: Répression en Syrie)
Depuis cet accord, la répression de la révolte populaire sans précédent contre le régime, qui a fait selon l'ONU plus de 3500 morts depuis la mi-mars, n'a pas baissé d'intensité, faisant notamment plus de 120 morts dans la seule région de Homs, un des foyers de la contestation dans le centre du pays.
Décision illégale aux yeux syriens
La décision de la Ligue arabe de suspendre la Syrie est "illégale et contraire au traité" de l'organisation panarabe, a indiqué samedi l'ambassadeur syrien Youssef Ahmad, dans des déclarations citées par les médias syriens. C'est une décision qui "met fin à l'action arabe commune, et prouve que l'administration (de la Ligue) suit un programme édicté par les Américains et les Occidentaux", a affirmé Youssef Ahmad.
Soutien de l'Union européenne
L'Union européenne a apporté son plein soutien aux décisions de la Ligue arabe, qui a annoncé samedi la suspension de la Syrie et a menacé le pouvoir syrien de sanctions s'il continue à ignorer le plan de règlement élaboré par l'institution panarabe. "Nous soutenons pleinement les décisions prises par la Ligue arabe aujourd'hui, qui montrent l'isolement croissant du régime syrien", a déclaré à l'AFP un porte-parole de la chef de la diplomatie de l'UE Catherine Ashton.
Les Etats-Unis applaudissent
Le président américain Barack Obama a "applaudi" samedi la décision de la Ligue arabe de suspendre la Syrie de l'organisation, saluant une "étape importante" qui "démontre l'isolement diplomatique croissant" du régime de Bachar al-Assad. Le président a salué dans un communiqué "l'initiative de la Ligue arabe pour mettre un terme à la crise et tenir le gouvernement syrien responsable" de la répression des manifestations de l'opposition et de violations des droits de l'homme.
Londres salue ces sanctions
Le ministre des Affaires étrangères britannique William Hague a salué samedi la "fermeté" de la Ligue arabe qui a suspendu l'adhésion de la Syrie, une décision qui illustre "la frustration de ses membres face à l'intransigeance du président Assad". Cette suspension "jusqu'à ce que le régime syrien mette fin à la répression des civils et respecte ses engagements, démontre la frustration qu'éprouvent les membres de la Ligue arabe face à l'intransigeance du président Assad", a souligné le chef de la diplomatie britannique dans un communiqué.
Paris se montre satisfait
"La France salue les mesures fortes prises aujourd'hui par la Ligue arabe à l'encontre du régime syrien", a déclaré dans un communiqué Alain Juppé, le chef de la diplomatie française. Elles confirment "qu'il est plus que temps d'accroître la pression sur le régime syrien afin qu'il cesse immédiatement la répression sauvage à l'encontre de sa population", a-t-il ajouté. "La France appelle la communauté internationale à entendre le message qui lui est adressé par les Etats arabes, à prendre ses responsabilités et à agir en conséquence sans plus tarder, notamment dans toutes les instances internationales appropriées, pour faire cesser la violence, protéger la population civile et permettre qu'une transition politique s'engage en Syrie", a précisé le ministre.
agences/mre/olhor
SOUTIENS AU REGIME SYRIEN
Des manifestations pro-régime ont eu lieu samedi en Syrie, notamment devant l'ambassade du Qatar à Damas, ainsi qu'à Tartous (ouest) et Alep (nord), pour dénoncer la suspension du pays par la Ligue arabe.
A Damas, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés devant l'ambassade du Qatar, agitant des drapeaux syriens et des photos de Bachar al-Assad, en scandant des slogans favorables au président syrien, a constaté un photographe de l'AFP.
Certains d'entre eux ont ouvert de force la grille de l'ambassade et sont montés sur le toit, enlevant le drapeau du Qatar pour le remplacer par le drapeau syrien, selon la même source. Des gaz lacrymogènes ont été tirés par le service de sécurité de l'ambassade.
Les principales mesures
Dix-huit pays ont voté en faveur, trois se sont prononcés contre -la Syrie, le Yémen et le Liban- et l'Irak s'est abstenu.
- La Ligue arabe "suspend l'adhésion de la République arabe de Syrie à toutes ses réunions et sa participation à toutes ses instances à compter du 16 novembre, jusqu'à l'application dans sa totalité du plan arabe de sortie de crise accepté par Damas le 2 novembre".
- La Ligue arabe appelle au "retrait des ambassadeurs arabes à Damas", une décision toutefois laissée "à la discrétion de chaque Etat souverain" membre de l'institution.
- Les ministres arabes se sont également mis d'accord sur le principe de "sanctions économiques et politiques", sans fournir plus de détails.
- La Ligue "invite tous les courants de l'opposition syrienne à se réunir au siège de la Ligue arabe sous trois jours pour convenir d'un projet commun pour la période de transition à venir en Syrie, le Conseil des ministres attend les résultats de ces consultations et jugera à l'issue de ces travaux de ce qu'il convient de faire concernant la reconnaissance de l'opposition syrienne".
- La Ligue a décidé, "dans le but de protéger les civils syriens", de "contacter immédiatement les organisations arabes concernées. Et si la violence et les assassinats ne s'arrêtent pas, le secrétaire général Nabil al-Arabi contactera les organisations internationales, y compris les Nations unies".
Situation catastrophique à Homs
Selon Shady Ammane, fondateur du collectif Jasmin, la situation à Homs et dans sa banlieue est particulièrement catastrophique. "La population de cette ville est non seulement bombardée à l'arme lourde jour et nuit mais elle fait l'objet d'une privation de tous les moyens de vie et de survie possibles.
L'électricité et l'eau sont coupées, les denrées alimentaires sont bloquées à l'entrée de la ville afin d'affamer la population, les hôpitaux, les écoles et les lieux de cultes servant à mettre à l'abri femmes, enfants, personnes âgées et blessés sont bombardés. " L'hiver approchant, les foyers seraient privés de mazout explique Shady, "afin de punir la population de demander la liberté".