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Le gouvernement égyptien présente sa démission

La place Tahrir au Caire était noire du monde lundi soir au troisième jour de manifestations contre le pouvoir. [Khalil Hamra]
La place Tahrir au Caire était noire du monde lundi soir au troisième jour de manifestations contre le pouvoir. - [Khalil Hamra]
Le gouvernement égyptien a annoncé lundi sa démission au troisième jour de heurts meurtriers opposant forces de l'ordre et manifestants réclamant la fin du pouvoir militaire en Egypte qui fait face à sa plus grave crise depuis la chute de Hosni Moubarak. Le bilan des victimes de ces affrontements est passé à 26 morts et une manifestation massive est prévue mardi.

Le gouvernement a présenté sa démission au Conseil suprême des forces armées (CSFA) au pouvoir depuis le départ du président Moubarak en février "au vu des circonstances difficiles que traverse actuellement le pays", a annoncé son porte-parole Mohamed Hijazi, cité par l'agence officielle Mena.

Peu après l'annonce, la télévision publique a affirmé que l'armée avait refusé cette démission, citant une source militaire. Mais le ministre de l'Information Osama Haikel, cité par la Mena, a déclaré ensuite que l'armée ne s'était pas encore prononcée.

Cette démission intervient à une semaine des premières élections législatives depuis le départ de Hosni Moubarak, chassé du pouvoir par une révolte populaire le 11 février, alors que les heurts font craindre que le scrutin, prévu sur plusieurs mois, soit émaillé de violences.

Sur la place Tahrir, des manifestants portent l'un d'entre eux, blessé. [Khalil Hamra]
Sur la place Tahrir, des manifestants portent l'un d'entre eux, blessé. [Khalil Hamra]

Promesses non tenues

Selon le ministère de la Santé, 24 personnes - 23 au Caire, une à Alexandrie (nord) - ont été tuées et 1900 blessées depuis samedi, notamment sur la place Tahrir au Caire, épicentre du soulèvement populaire du début de l'année. Dans la nuit de lundi à mardi, deux autres personnes ont été tuées à Ismaïliya, selon des sources médicales dans un hôpital de cette ville sur la mer Rouge, portant à 26 le bilan des décès depuis samedi.

Le CSFA a appelé lundi soir les forces politiques à une réunion d'urgence "pour examiner les causes qui ont aggravé la crise actuelle et les moyens d'en sortir le plus rapidement possible". Après trois jours d'affrontements meurtriers, le CSFA a en outre annoncé avoir chargé le ministère de la Justice de mettre en place un comité chargé de faire la lumière sur les violences.

La colère gronde de plus en plus contre le conseil militaire accusé de vouloir se maintenir au pouvoir, de ne pas tenir ses promesses de réformes et de poursuivre la politique de répression de l'ère Moubarak. Selon Amnesty international, le CSFA "a étouffé la révolution" et certaines violations des droits de l'Homme commises depuis qu'il est au pouvoir sont pires que sous le régime Moubarak.

Les violences ont fait au moins 15 morts ce week-end en Egypte. [Mohamed Omar]
Les violences ont fait au moins 15 morts ce week-end en Egypte. [Mohamed Omar]

Poursuite des affrontements

Des mouvements égyptiens, dont la Coalition des jeunes de la révolution et le mouvement du 6 avril, ont appelé à une manifestation massive mardi à 16h00 sur la place Tahrir pour réclamer la fin du pouvoir militaire et la formation d'un "gouvernement de salut national". Et des dizaines de diplomates égyptiens ont appelé à "la fin immédiate des attaques contre les manifestants pacifiques".

Dans la nuit de lundi à mardi, de violents affrontements se poursuivaient dans des rues adjacentes à Tahrir menant au ministère de l'Intérieur, cible privilégiée des manifestants et sous forte garde des forces anti-émeutes. La télévision publique a continué de retransmettre ces scènes en direct, comme elle le fait depuis le début des affrontements.

Ailleurs dans le pays, police et manifestants s'opposaient à Alexandrie et Qena (centre), Ismaïliya et Suez, sur la mer Rouge, et el-Arich dans le Sinaï. Le ministère de l'Intérieur a accusé dans un communiqué les manifestants d'avoir lancé des cocktails molotov et tiré avec des fusils de chasse sur les forces de l'ordre, en blessant 112. Le communiqué fait état de "116 émeutiers arrêtés au Caire, 46 à Alexandrie et 29 à Suez".

Inquiétudes internationales

La Ligue arabe, qui s'exprimait pour la première fois sur ces événements, a appelé au calme, exhortant les acteurs politiques à travailler au "changement démocratique". Les slogans des manifestants visent en particulier le maréchal Hussein Tantaoui, un cacique de l'ancien régime qui a pris la tête du conseil militaire et est devenu dirigeant de facto de l'Egypte.

L'armée s'est engagée à rendre le pouvoir aux civils après une élection présidentielle qui doit suivre les législatives mais dont la date n'est toujours pas connue. L'armée a dit "regretter" les violences, tout en réaffirmant s'en tenir au calendrier électoral établi.

La chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton et Ban Ki-moon, le secrétaire général de l'ONU, ont appelé au "respect des droits de l'Homme". Paris, Londres, Rome et Berlin ont fait part de leur préoccupation, tandis que les Etats-Unis, "profondément inquiets", ont appelé "à la retenue".

afp/dk

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Les Frères musulmans ne veulent pas mettre de l'huile sur le feu

Les Frères musulmans d'Egypte, la force politique la mieux organisée du pays, ont annoncé qu'ils ne participeraient pas à la manifestation massive prévue mardi à la place Tahrir au Caire contre le pouvoir militaire.

Le Parti de la liberté et la justice, issu des Frères musulmans, a annoncé que cette décision émanait du "souci de ne pas entraîner le peuple vers de nouveaux affrontements sanglants avec des parties qui cherchent davantage de tensions", selon un communiqué publié lundi soir.

Le Parti de la liberté et de la justice a appelé le Conseil suprême des forces armées (CSFA), au pouvoir depuis la chute de Hosni Moubarak, à poursuivre les auteurs "des horribles crimes" commis et à arrêter "l'effusion de sang".

Les Frères musulmans, très critiques à l'égard du pouvoir militaire, sont hostiles à un report des élections législatives qui débutent le 28 novembre et pour lesquelles ils estiment être en position de force.

Fondés en 1928 puis interdits en 1954, les Frères musulmans étaient tolérés dans les faits sous le régime Moubarak, tout en étant la cible de campagnes d'arrestations.

Après le soulèvement du printemps dernier, la confrérie a formé un parti politique légal - le Parti de la justice et de la liberté - pour pouvoir participer ouvertement aux élections.