Au terme d'une crise politique de 535 jours - un record mondial - la Belgique va pouvoir se doter d'un gouvernement de plein exercice appelé à être dirigé pour la première fois depuis 32 ans par un francophone, Elio Di Rupo, à la suite d'un accord trouvé mercredi soir.
Les six partis politiques flamands et francophones engagés depuis août dans des négociations en ce sens ont scellé un compromis sur le programme du futur gouvernement. "Il y a un accord global" sur le contenu "c'est à dire sur la réforme de l'Etat, le socio-économique et le programme du gouvernement", a indiqué une source proche des discussions.
Aucun commentaire officiel n'était prévu avant jeudi, où les négociateurs doivent procéder à une ultime relecture du lourd document de 185 pages avant de sceller l'accord. Reste ensuite à le faire approuver ce week-end par les congrès des partis, répartir les portefeuilles, pour que le gouvernement puisse prêter serment en début de semaine prochaine et que cette page difficile de l'histoire de la Belgique soit réellement tournée.
Elio Di Rupo tout sourire
Elio Di Rupo, le président du parti socialiste wallon, avait quitté les négociations dans la soirée tout sourire, sans faire de commentaires. "C'est le bout du tunnel", avait déjà prophétisé en arrivant la vice-première ministre et négociatrice PS Laurette Onkelinx.
Depuis avril 2010, la Belgique est dirigée par un gouvernement en affaires courantes, avec le Flamand Yves Leterme à sa tête. Elio Di Rupo, 60 ans, a été désigné par le roi pour former le gouvernement et lui succéder. Il deviendra alors le premier chef de gouvernement francophone de Belgique depuis plus de trois décennies, en même temps que le premier socialiste à ce poste depuis 1974, à un moment où partout en Europe la gauche est à la peine. Il sera aussi, dans la série des précédents, un des seuls Premiers ministres ouvertement homosexuel dans le monde.
Près de 530 jours de négociations
Dans ce pays tiraillé entre ses deux communautés flamande (néerlandophone) et wallonne (francophone), les négociations duraient depuis les élections du 13 juin 2010, soit 535 jours. C'est finalement la crise de la dette qui a contraint les deux grandes communautés à s'entendre.
L'agence de notation Standard & Poor's a dégradé vendredi dernier la Belgique, poussant les partis, qui se querellaient des questions budgétaires, à sceller un compromis. Ils se sont ainsi entendus dimanche sur un budget de rigueur pour réduire le déficit de la Belgique à 2,8% du PIB en 2012 et atteindre l'équilibre en 2015, conformément aux demandes de la Commission européenne.
Elio Di Rupo dirigera une coalition politiquement hétéroclite qui regroupera les socialistes, les démocrates-chrétiens et les libéraux francophones et flamands. Ni les Verts, ni surtout les nationalistes flamands de la N-VA, pourtant première formation politique de Flandre, n'y participeront.
La crise politique a révélé la profondeur du fossé qui sépare les Flamands au Nord (60% de la population) et les francophones de Bruxelles et de la Wallonie au Sud. Les premiers ont fini par obtenir une autonomie régionale renforcée qu'ils réclamaient. Mais la question de la survie du pays sur une forme unitaire risque de se reposer à terme tant les forces centrifuges qui le travaillent restent à l'oeuvre.
afp/pbug