"Toutes les informations crédibles disponibles montrent que plus de 4000 personnes ont été tuées par les forces" syriennes lors de la répression des manifestations contre le régime de Damas, a déclaré Ban Ki-moon lors d'une visite dans des camps de réfugiés de Dadaab au Kenya.
De son côté, Navi Pillay a estimé à New York que des vies auraient pu être sauvées en Syrie si le Conseil de sécurité avait agi plus tôt, tout en ajoutant qu'il ne lui appartenait pas de dicter la conduite à tenir au Conseil.
Dans un entretien mercredi à la chaîne américaine ABC News, Bachar al-Assad a dit n'accorder aucun crédit au bilan de 4000 morts en Syrie avancé par les Nations unies. "Qui a dit que l'ONU était une institution crédible?", s'est-il interrogé. Lors du même entretien, le président Assad avait assuré qu'il n'avait jamais donné l'ordre de tuer des manifestants depuis le début des troubles dans son pays en mars dernier.
Sources de première main
Ban Ki-moon a assuré que les Nations unies avaient traité de la question "des violations des droits de l'homme en Syrie et ailleurs sur une base impartiale, juste, objective et crédible". "En tant que secrétaire général, je peux dire clairement que les missions des Nations unies seront toujours fondées sur la justice, l'impartialité, la neutralité, la protection des droits de l'homme et la dignité", a-t-il ajouté.
"Il s'agit de dépositions de première main auprès de témoins, beaucoup de ces informations provenant de l'intérieur du pays par Skype", le service de téléphonie sur internet, a de son côté indiqué Navi Pillay, lors d'une conférence de presse. Plus de 220 témoins ont été interrogés, a-t-elle précisé. "Le président syrien ne peut pas balayer tout cela d'une affirmation sans fondement selon laquelle les Nations unies ne sont pas crédibles", a-t-elle ajouté.
Désertions nombreuses de militaires
Navi Pillay a exhorté le président syrien à laisser une commission d'enquête entrer dans le pays. "Il est très important que nous allions là-bas et que nous vérifions sa version", a-t-elle dit. La responsable des droits de l'homme a encore souligné que les défections de plus en plus nombreuses dans les rangs des forces armées syriennes faisaient planer la menace "d'une véritable guerre civile". "Près de 1000 personnels des forces de l'ordre du président Assad ont également été tués", a expliqué Navi Pillay.
Elle a ajouté que le père d'un garçon de 14 ans avait montré des images montrant que son fils avait été "torturé puis tué". "C'est cela que nous voudrions montrer au président Assad et cela ne colle pas avec l'image qu'il donne. Quelqu'un tue des manifestants innocents et nous devons établir de qui il s'agit", a-t-elle encore dit.
Désaccord au sein du Conseil de sécurité
Le Conseil de sécurité n'arrive pas à se mettre d'accord sur une résolution condamnant la Syrie. Un double veto russo-chinois le 4 octobre dernier avait torpillé un projet de résolution. Vitali Tchourkine, président en exercice du Conseil de sécurité et ambassadeur russe à l'ONU, a confirmé aux journalistes que Navi Pillay serait entendue, vraisemblablement lundi, par le Conseil au sujet de la Syrie mais aussi au sujet de la situation dans les Territoires palestiniens.
L'audition de Navi Pillay par le Conseil de sécurité sur la Syrie était à l'origine une demande de la France rejointe par la Grande-Bretagne et l'Allemagne. Les missions française et allemande à l'ONU ont officiellement confirmé sur leur compte de microblogs Twitter que l'audition aurait lieu lundi à 19h00 GMT.
agences/olhor
La Syrie accuse la chaîne ABC d'avoir déformé les propos du président
La Syrie a accusé vendredi la chaîne ABC d'avoir "délibérément" déformé les propos du président Bachar al-Assad dans sa présentation d'un entretien entretien accordé cette semaine à cette chaîne de télévision américaine.
Par ses choix de montage, ABC "a délibérément déformé les propos du président Assad" pour présenter la Syrie sous un jour négatif, a déclaré le porte-parole du ministère syrien des Affaires étrangères, Jihad Makdessi, lors d'une conférence de presse.
Je ne sais pas qui a commis l'erreur. La chaîne a (supprimé) de longs extraits de l'interview (...), se contentant d'une réponse" incomplète. "C'est une erreur délibérée, car ils veulent montrer la Syrie à l'opposé de ce qu'elle est en réalité", a poursuivi Jihad Makdessi.
Mercredi, la Syrie s'était déjà étonnée après des déclarations du porte-parole du Département d'Etat américain, qu'elle a accusé d'avoir "déformé" les propos de d'al-Assad.
A Homs, 24 nouvelles victimes de la répression
Les forces de sécurité ont ouvert le feu sur des manifestants vendredi en Syrie, faisant 24 nouvelles victimes civiles, dont quatre enfants, en particulier à Homs, où l'opposition accuse le régime du président Bachar al-Assad de préparer "un massacre".
Malgré le déploiement massif des forces de l'ordre, de nombreuses manifestations ont eu lieu, en particulier à Deraa (sud), Idleb (nord-ouest), Homs, Hama (centre) et Deir Ezzor (est), sous le slogan "la grève de la dignité", en prévision d'une grève générale dimanche, selon des militants et l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Dix civils ont été tués à Homs, dont deux enfants de 10 et 12 ans, et un autre, un adolescent de 14 ans, près de cette ville, cinq près de Damas, quatre à Hama (centre), deux dans la province d'Idleb (nord-ouest) et deux, dont une fillette, à Deraa (sud), où la contestation est née il y a près de neuf mois, a précisé l'OSDH.
Cette association basée au Royaume-Uni a également fait état de "violents affrontements" entre déserteurs et forces gouvernementales à Douma et à Saqba, à 10 km de la capitale. Le Conseil national syrien (CNS), qui réunit la majorité des courants de l'opposition, a dit craindre un "massacre" à Homs, cible d'une répression violente depuis des semaines.
Londres se fâche et Washington s'inquiète
Le gouvernement britannique a appelé vendredi Damas à "retirer immédiatement ses forces de Homs", condamnant une nouvelle fois la violence "inacceptable" exercée par le régime du président Bachar al-Assad à l'encontre des manifestants.
Les Etats-Unis ont pour leur part signifié vendredi leur "profonde inquiétude" quant aux informations émanant de l'opposition syrienne qui évoquent la préparation, par le régime du président Bachar al-Assad, d'un assaut d'envergure dans la ville de Homs.
La porte-parole du département d'Etat, Victoria Nuland, a également souligné qu'al-Assad serait tenu responsable de tout décès provoqué par les troupes syriennes.