Poursuivi pour homicide multiple par imprudence, naufrage et abandon du navire, le capitaine du paquebot avait été écroué samedi sur ordre du procureur en chef de Grosseto, à la suite du naufrage qui a pour l'heure fait 11 morts et 24 disparus (voir Naufrage du Costa Concordia ).
Le parquet a dit craindre "un risque de fuite et de dissimulation de preuves". Une assignation à résidence a donc été décidée et Francesco Schettino devrait quitter la prison mercredi.
Francesco Schettino a lui assuré aux magistrats-enquêteurs du parquet qu'il n'avait pas abandonné le navire et qu'il avait sauvé "des milliers de vies". Il a aussi "défendu son rôle dans la direction qu'il a donnée au navire à la suite du choc sur le récif. Il aurait également expliqué être tombé à l'eau, ce qui l'aurait empêcher de se trouver à bord pour organiser les secours.
Des enregistrements accablants
Cette décision d'assignation à résidence du parquet fait suite à la diffusion par l'agence Ansa d'enregistrements accablants pour le capitaine. A 1h46 du matin, alors que des centaines de personnes doivent encore être évacuées, un officier de la capitainerie a ordonné au commandant Francesco Schettino, joint sur son portable, de retourner sur le navire.
"Maintenant vous allez à la proue, vous remontez par l'échelle de secours et vous coordonnez l'évacuation. Vous devez nous dire combien il y a encore de gens, enfants, femmes, passagers, le nombre exact dans chacune des catégories", indique la voix de l'officier dans l'enregistrement contenu dans l'une des boîtes noires, saisies par les enquêteurs.
"Que faites-vous? vous abandonnez les secours ?", interroge l'officier. Francesco Schettino répond: "Non non je suis là, je coordonne les secours."
L'officier reprend: "Commandant, c'est un ordre, c'est moi qui commande maintenant, vous avez déclaré l'abandon du navire, vous devez aller à la proue, remonter à bord et coordonner les secours." L'homme indique alors au commandant qu'il y a "déjà des cadavres". "Combien?" répond Francesco Schettino, qui se voit rétorquer: "C'est à vous de me le dire, que faites-vous? Vous voulez rentrer chez vous?", s'énerve l'officier.
"Retournez là haut!"
"Maintenant vous retournez là haut et vous nous dites ce que l'on peut faire, combien il y a de gens, quels sont leurs besoins", poursuit l'officier auquel le commandant assure qu'il va remonter à bord. Mais selon la capitainerie et de nombreux témoignages, il était déjà réfugié sur la rive avant minuit, peut-être dès 23h40.
En effet, dans un appel précédent, dès 0h42, le commandant lâche une phrase compromettante en parlant par téléphone avec la salle opérationnelle de la capitainerie: "Nous ne pouvons plus monter à bord car le navire est en train de se cabrer côté poupe". "Commandant, vous avez abandonné le bateau?", demande alors d'un ton très surpris l'officier, auquel le commandant répond: "Non non, évidemment que non!"
Selon l'Ansa, l'enquête de la capitainerie de Livourne, coordinatrice des secours, montre par ailleurs qu'il y a eu une sorte de "mutinerie" de l'équipage qui a décidé l'évacuation avant un ordre formel du capitaine.
afp/pima
Recherches interrompues
Par mesure de sécurité, les sauveteurs italiens ont suspendu mercredi les recherches des quelque vingt personnes toujours portées disparues après le naufrage du Concordia.
"Les instruments de mesure ont relevé un déplacement du navire, nous sommes en train d'évaluer s'il a trouvé un nouveau point d'appui avant de voir si l'on peut reprendre. Pour le moment nous ne pouvons même pas nous en approcher", a expliqué le porte-parole des pompiers, Luca Cari.
Le travail a été interrompu à 08H00. Lundi l'exploration de l'épave avait déjà dû être interrompue pendant trois heures à mi-journée à cause du mauvais temps et des vagues qui avaient fait glisser le Concordia, couché en équilibre sur des rochers, d'une dizaine de centimètres.
Le bilan est actuellement de 11 morts pour la catastrophe de vendredi dont seulement 5 ont été formellement identifiés: deux touristes français, un Italien et un Espagnol et un membre d'équipage péruvien.
Les autorités ont publié mardi soir la liste de 28 personnes manquant encore à l'appel, 25 passagers - 13 Allemands, cinq Italiens, quatre Français, deux Américains - et quatre membres d'équipage: un Italien, un Hongrois, un Péruvien et un Indien. Ce total inclut les six corps non identifiés dont un serait celui d'une touriste allemande.