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Le juge espagnol Baltasar Garzon devant la justice

Baltasar Garzon, au centre, est soutenu par de multiples organisations des droits de l'Homme, dont Amnesty International.
Baltasar Garzon, au centre, est soutenu par de multiples organisations des droits de l'Homme, dont Amnesty International.
Le juge espagnol Baltasar Garzon comparaît devant la justice à partir de mardi pour avoir brisé un tabou en voulant enquêter sur le sort des disparus du franquisme, divisant un pays où les blessures de la guerre civile restent à vif.

A 56 ans, le juge Garzon, suspendu de ses fonctions depuis mai 2010, risque une interdiction d'exercer de 20 ans au maximum. Une sanction qui mettrait un point final à la carrière hors du commun de ce magistrat hyperactif, admiré autant qu'haï, mondialement connu pour avoir fait arrêter en 1998 à Londres l'ancien dictateur chilien Augusto Pinochet.  Le magistrat avait déjà comparu le 17 janvier pour un premier procès dans lequel il est accusé d'avoir ordonné des écoutes illégales (Lire: Espagne)

Mais dans son propre pays, sa quête d'une "justice universelle" s'est heurtée aux démons du franquisme. Poursuivi par deux associations d'extrême droite, il est accusé d'avoir enfreint la loi d'amnistie votée en octobre 1977, deux ans après la mort de Francisco Franco, qui était censée imposer un pacte du silence sur les années noires de la Guerre civile (1936-39) et de la dictature (1939-75).

"Inquisition" dénoncée

Saisi en 2006 par des associations de défense de victimes, il avait tenté d'ouvrir ce douloureux dossier et de faire la lumière sur le sort de 114'000 disparus, avant de renoncer en 2008 face à l'opposition du parquet qui dénonçait le risque d'une "inquisition" incompatible avec un Etat de droit.

Son argumentation, fondée sur les principes des tribunaux internationaux: ces disparitions forcées de civils constituent des crimes contre l'humanité imprescriptibles et échappent à ce titre à la loi d'amnistie.

Les poursuites ouvertes contre le juge avaient suscité la polémique en Espagne et rappelé que la page du franquisme n'est pas complètement tournée, malgré une loi votée en 2007 afin de réhabiliter les victimes. Ses partisans dénoncent un complot politique, d'autant que le parquet lui-même a demandé dans ses réquisitions préliminaires que l'accusé soit blanchi, estimant que sa tentative d'enquête ne justifiait pas les poursuites.

De multiples organisations des droits de l'Homme, dont Amnesty International et Human Rights Watch, se sont mobilisées pour le soutenir, dénonçant un "lynchage" judiciaire. Après la déposition du juge Garzon le 31 janvier, le procès verra défiler 22 témoins, tous représentant des proches de disparus. Plusieurs autres témoins cités par la défense pour défendre les principes du droit international, dont l'ancien procureur du TPI Carla del Ponte, ont en revanche été récusés par le tribunal.

afp/cab

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Soutien populaire

Environ 200 partisans du juge espagnol Baltasar Garzon se sont rassemblés mardi matin devant le Tribunal suprême de Madrid pour réclamer "justice", à l'ouverture du procès du magistrat, jugé pour avoir voulu enquêter sur les disparus du franquisme.

"Nous voulons la mémoire, nous voulons la justice", ou encore "Garzon, ami, le peuple est avec toi", criaient les manifestants.