"En dépit des progrès importants réalisés ces derniers jours, nous n'avons pas eu tous les éléments nécessaires sur la table pour prendre des décisions" dans l'immédiat, a dit le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, à l'issue d'une réunion des ministres des Finances de l'Union monétaire à Bruxelles.
Une nouvelle réunion de ce forum est prévue le mercredi 15 février pour approuver le nouveau programme d'aide de 130 milliards d'euros promis à la Grèce par l'Europe en octobre, ainsi qu'un plan d'effacement de dette par les banques d'une ampleur historique au niveau mondial. Sous réserve que les conditions posées soient remplies.
D'ici là, le parlement grec va devoir approuver dimanche le plan de rigueur sur lequel les partis politiques grecs et les représentants des créanciers publics du pays réunis au sein de la "troïka" (UE-BCE-FMI), se sont mis d'accord sur le principe jeudi, a encore averti Jean-Claude Juncker.
Le président de l'Eurogroupe est serein
Mais le Premier ministre luxembourgeois s'est montré absolument certain que le parlement grec adopterait le plan.
Par ailleurs, le gouvernement grec a lui jusqu'à mercredi pour trouver "des économies supplémentaires à hauteur de 325 millions d'euros" dans le budget 2012.
Enfin, la zone euro exige que les partis au pouvoir à Athènes apportent des garanties par écrit sur leur soutien au plan de rigueur. "Nous voulons des engagements réels" sur les réformes qui sont menées, a souligné Jean-Claude Juncker. La patience des pays de la zone euro est à bout face à la lenteur des réformes en Grèce et Jean-Claude Juncker a reconnu que le ton des échanges autour de la table avait parfois été "assez vif".
Les conservateurs grecs pointés du doigt
Le ministre grec des Finances, le socialiste Evangélos Vénizélos, a reconnu à la fin de la réunion que "de nombreux pays ont trouvé des lacunes" dans le plan de rigueur qui leur a été présenté, et en a tenu responsable le chef des conservateurs grecs Antonis Samaras, qui "n'a pas encore signé" l'intégralité des mesures prévues à l'origine.
Le montant de 325 millions d'euros d'économies au total réclamé par les partenaires d'Athènes d'ici mercredi correspond à des coupes dans les dépenses refusées tout particulièrement par les conservateurs grecs d'Antonis Samaras, favori des sondages dans la perspective d'élections prévues au printemps.
Samaras s'est pour sa part prévalu d'avoir "évité le pire" en bloquant toute une série de mesures de rigueur réclamées par l'UE et le Fonds monétaire international (FMI).
Vers un effacement de l'ardoise auprès des privés
Par contre, les négociations de la Grèce avec ses créanciers privés (banques, assureurs et fonds d'investissements) pour effacer 100 milliards d'euros de dette avancent bien. "le projet d'accord est pratiquement finalisé", a dit le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn.
L'objectif est de parvenir par ce biais à réduire le niveau de la dette publique globale de la Grèce à un niveau jugé soutenable, soit 120 % du Produit intérieur brut (PIB) national en 2020. Ce seuil est une condition fixée par le FMI pour continuer de son côté à prêter de l'argent à Athènes.
Mais si l'effacement de dette par les banques ne permet pas de revenir à l'objectif de ratio de 120 %, les gouvernements de la zone euro, ou des institutions comme la BCE, seront alors contraints d'apporter une contribution supplémentaire pour y parvenir.
"Le temps commence à manquer" pour parvenir à un accord global car la Grèce risque le défaut de paiement le 20 mars, à l'expiration de 14,5 milliards d'obligations, mais "nous sommes encore dans les temps", a assuré Oli Rehn. Il a aussi dit que la proposition franco-allemande de créer un compte bloqué spécial pour s'assurer du remboursement de la dette grecque était "sérieusement envisagée" par la Commission et les experts de la zone euro.
Les deux grandes centrales syndicales grecques et le syndicat communiste PAME ont appelé à une grève générale vendredi et samedi.
agences/rber/jzim
LES GRANDES DATES DE LA CRISE GRECQUE
2009
- Octobre: le nouveau gouvernement socialiste de Georges Papandréou relève la prévision de déficit public pour 2009 (12,7% contre 6%). En décembre, l'Union européenne alerte sur l'état des finances publiques, la Grèce est dégradée par les agences de notation.
2010
- Avril: avec 350 milliards d'euros de dette, Athènes demande une aide internationale, car elle n'arrive plus à emprunter sur les marchés où les taux sont devenus prohibitifs.
2011
- Juin: adoption d'un plan pluri-annuel révisé de redressement, durcissant l'austérité et élargissant les privatisations.
- Septembre: la troïka des créanciers (UE-FMI-BCE) dénonce le dérapage des comptes publics et le retard des réformes.
- Après un mois d'août noir, les bourses mondiales dégringolent, apeurées par l'hypothèse de plus en plus ouvertement évoquée d'une faillite de la Grèce, dont les comptes publics dérapent.
- Octobre: nouvel accord de la zone euro sur un plan renforçant celui du 21 juillet, prévoyant un renflouement de 130 milliards d'euros et l'effacement de 100 milliards de dette détenu par les créanciers privés.
- Novembre: Papandréou provoque une crise politique en annonçant un référendum sur le plan qui demande de nouveaux efforts. Sous pression européenne, il renonce le 4 novembre et démissionne le 9.
- Lucas Papademos, ancien vice-président de la BCE, est désigné pour former un gouvernement de coalition.
2012
- Janvier: Athènes rejette toute idée de céder sa souveraineté en matière budgétaire, émise par l'Allemagne.
- Février: avant de s'engager sur le déboursement de 130 milliards d'euros d'ici 2015, les Européens et le FMI exigent que les partis socialiste et de droite représentés dans le gouvernement de coalition s'engagent sur les mesures d'ajustement structurel.
- 9 février: le gouvernement grec et la BCE annoncent la conclusion en Grèce d'un accord politique attendu dans toute l'Europe au memorandum qui comporte des conditions drastiques d'assainissement des finances publiques du pays, une sévère dérégulation du marché de travail et un abaissement du coût de la main d'oeuvre.
Maintien du taux directeur de la BCE à 1%
Encouragé par des indicateurs économiques meilleurs qu'attendus en début d'année en zone euro, le conseil des gouverneurs de l'institution monétaire de Francfort a décidé sans surprise de laisser son principal taux directeur à 1%, son plus bas historique.
Une baisse de ce taux n'a même pas été discutée, selon le président de la BCE Mario Draghi, qui s'est montré d'un optimisme prudent pour l'avenir. "L'incertitude est élevée en raison du ralentissement de l'économie mondiale, de la crise dette, du resserrement du crédit", a-t-il dit, appelant encore une fois les gouvernements à effectuer leur travail pour rétablir leurs finances.
Banques européennes: recapitalisations a priori suffisantes
Les plans des banques européennes pour leur recapitalisation sont a priori largement suffisants pour atteindre globalement les 115 milliards d'euros requis, a assuré jeudi le régulateur européen des banques, sans toutefois se prononcer sur la viabilité de ces plans.
A l'issue d'une première réunion d'évaluation à Londres des plans présentés par les 30 banques concernées, l'Autorité bancaire européenne (EBA) a évalué que les propositions représentaient "un surplus global d'environ 26%" par rapport à ses exigences.