Des soldats mutinés ont annoncé jeudi avoir fermé toutes les frontières après avoir renversé le président malien Amadou Toumani Touré qui, selon son entourage, était dans un camp militaire à Bamako, avec des hommes d'élite de la garde présidentielle.
De nombreuses condamnations ont suivi le coup de force dans ce pays d'Afrique de l'Ouest vaste comme près de deux fois la France, qui devait organiser le 29 avril une élection présidentielle en dépit d'une rébellion touareg meurtrière déclenchée mi-janvier.
Un responsable militaire loyaliste a affirmé à l'AFP: "le président va bien, il est en lieu sûr" avec certains ministres, sans plus de détails.
"Régime incompétent", selon les mutins
Jeudi vers 04H00 (locales et GMT), des militaires en uniforme sont apparus à la télévision nationale qu'ils occupaient depuis mercredi, après une mutinerie partie de Kita, ville-garnison à 15 km de la capitale, qui a gagné Bamako, puis Koulouba (près de Bamako) où se trouve le siège du palais présidentiel. La révolte a gagné Gao, (nord-est), siège d'un commandement de l'armée contre la rébellion où des chefs militaires loyalistes étaient détenus.
Les soldats mutinés ont annoncé avoir "fin au régime incompétent" du président Touré, décrété la dissolution de "toutes les institutions" ainsi qu'un couvre-feu, pour une durée non précisée.
L'aéroport de Bamako a été fermé, et les vols sont annulés jusqu'à nouvel ordre, de source aéroportuaire.
Régime affaibli
Ce putsch intervient après plus de deux mois de guerre contre des rebelles touareg dans le nord du Mali, vaste zone déjà en proie aux activités de groupes islamistes armés incluant Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et de divers trafiquants.
Le régime de Touré a dû gérer ces dernières semaines la colère au front, de soldats sous-équipés face à des adversaires lourdement armés, appuyés par des islamistes, mais aussi au sein de leurs familles, qui critiquaient sa réaction molle et l'absence des nouvelles de leurs, dont certains ont été exécutés.
Le coup d'Etat militaire a mis fin à un processus électoral qui prévoyait la présidentielle, un référendum constitutionnel et des législatives. Amadou Toumani Touré - élu en 2000 et réélu en 2007 - devait céder son fauteuil, conformément à la Constitution qui lui autorisait au maximum deux mandats consécutifs de cinq ans.
agences/hof/mre
Nombreuses condamnations
L'annonce du renversement du pouvoir a suscité une vague de condamnations et d'appels au rétablissement de l'ordre constitutionnel à l'étranger: Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), Union africaine, France, Algérie, Etats-Unis, Union européenne (UE), ONU et Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Union africaine (UA), Afrique du Sud, Nigeria, organisation de la Conférence islamique (OCI), notamment.
La France a décidé de suspendre "toutes ses coopérations régaliennes avec le Mali", a demandé le respect de l'intégrité physique du président Touré et la libération des personnes détenues. Son ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, a souhaité des élections "le plus vite possible".
Pour Jean Ping, président de la Commission de l'UA, le putsch "constitue un sérieux recul pour le Mali et pour les processus démocratiques en cours sur le continent". Le chef de l'OCI s'en est dit "profondément choqué". Le président nigérien Goodluck Jonathan a parlé d'"un revers" pour la démocratie en Afrique. L'Algérie a exprimé sa "grande préoccupation", l'UE a réclamé le retour de l'ordre constitutionnel et le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a appelé à une résolution pacifique des "doléances".
Les Etats-Unis ont demandé "le retour immédiat de l'ordre constitutionnel au Mali, dont l'autorité pleine et entière du pouvoir civil sur les forces armées, et au respect des institutions et traditions démocratiques du pays".