Une fusée lancée par la Corée du Nord a explosé en plein vol, un sérieux embarras pour Pyongyang désireux de montrer sa technologie à la communauté internationale qui a dénoncé une "provocation". Une réunion d'urgence du Conseil de Sécurité de l'ONU a été convoquée (lire ci-dessous).
La Suisse a condamné le lancement de la fusée par la Corée du Nord vendredi matin. Elle "appelle l'ensemble des protagonistes à s'abstenir de toute action susceptible d'aggraver la situation", a fait savoir vendredi le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE).
La Confédération "encourage" toutes les parties à "favoriser le dialogue et la modération". Elle demande à Pyongyang de suspendre immédiatement toutes les activités liées à son programme de missiles balistiques et de renoncer complètement à "toutes les armes nucléaires et à tous les programmes nucléaires militaires existants".
Les Etats-Unis
ont immédiatement réagi suite au lancement raté en estimant que ce tir devait être considéré comme un acte de "provocation" qui menace la sécurité régionale, viole les lois internationales et contredit les récents engagements de la Corée du Nord.
Le Japon, qui a également dénoncé une "provocation extrême" pour sa sécurité nationale, a fait savoir qu'il envisageait désormais des sanctions économiques contre la République populaire de Corée suivant la réponse qu'apportera la communauté internationale.
Les pays du G8 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Italie, Japon, Russie) dénonçait l'action de Pyongyang et appelait à une réponse "appropriée" de l'ONU.
La chef de la diplomatie de l'Union européenne, Catherine Ashton, a pointé de son côté une "violation claire" de la résolution 1874 du Conseil de sécurité de l'ONU, qui interdit à la Corée du Nord de procéder à des essais nucléaires ou balistiques.
La Chine, principale alliée de la Corée du Nord, mais aussi la Russie et l'Inde ont pour leur part appelé au calme. "Nous sommes convaincus qu'il faut réagir à ces défis uniquement par des moyens politico-diplomatiques", a déclaré le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.
Le tir d'une fusée par la Corée du Nord constitue une "violation" d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, a affirmé vendredi à Genève le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon. Un haut responsable de l'ONU a dit craindre que "le pire ne soit à venir", en référence aux rumeurs de préparatif d'un nouvel essai nucléaire.
Kim Jong-Un à la tête de la défense nationale
Le nouveau dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un a été nommé premier président de la puissante Commission de défense nationale, le plus haut organe de décision du régime communiste, a annoncé vendredi l'agence d'Etat nord-coréenne KCNA.
Kim Jong-Un a aussi présidé vendredi à une cérémonie d'hommage à ses défunts prédécesseurs, quelques heures après le lancement de la fusée.
La télévision d'Etat sud-coréenne a diffusé des images de Kim Jong-Un saluant les dizaines de milliers de Nord-Coréens massés dans le centre de la capitale Pyongyang pour honorer les nouvelles statues géantes de Kim Il-Sung et Kim Jong-Il.
agences/pbug
Lancement raté
Le lancement de la fusée, qui a eu lieu à 07h39 (00h39 heure suisse), a enfreint les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. Deux minutes après son décollage, la fusée s'est désintégrée et abîmée en mer. Des navires des marines russe, chinoise, américaine et sud-coréenne ont été dépêchés sur zone pour tenter de récupérer ces débris, selon Séoul.
Le ministère sud-coréen de la Défense a clairement mis en garde contre de possibles "nouveaux actes provocateurs comme des tests de missile et un essai nucléaire" de la part de son voisin du Nord, soulignant que l'armée nord-coréenne avait d'ores et déjà été placée "en vigilance accrue".
Fait inhabituel, le pouvoir nord-coréen a officiellement confirmé le revers de cette tentative par la voix de l'agence de presse gouvernementale KCNA. "Scientifiques, techniciens et experts vérifient actuellement la cause de cet échec", a écrit l'agence.
L'arsenal de missiles nord-coréens
La Corée du Nord cherche depuis des décennies à affiner sa technologie en matière de missiles. Mais ses essais se sont avérés peu concluants par le passé.
Le régime communiste a commencé à travailler à la fin des années 70 sur une dizaine de missiles soviétiques d'une portée allant jusqu'à 6700 km. Trois ont été expérimentés avec succès.
Un missile à longue portée testé pour la première fois en août 1998 avait survolé une partie du Japon avant de s'abîmer dans le Pacifique. Le 5 juillet 2006, Pyongyang avait effectué des tirs - ratés - de sept missiles, dont un censé pouvoir atteindre l'Alaska - qui avait explosé en vol après 40 secondes.
Le 5 avril 2009, Pyongyang lançait une fusée dans l'espoir de placer un satellite en orbite. Selon les experts, les deuxième et troisième étages se sont abîmés dans le Pacifique à 3200 km du pas de tir.
La Corée du Nord possède également 800 missiles mobiles parmi lesquels 600 Scud présentant un danger immédiat pour la Corée du Sud. Nombre d'experts estiment toutefois qu'elle ne dispose pas encore de la technologie suffisante pour nucléariser un missile.
Le Conseil de sécurité de l'ONU déplore le lancement de la fusée mais ne le sanctionne pas
Les 15 pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont "déploré" vendredi le lancement d'une fusée par la Corée du Nord, sans évoquer d'éventuelles sanctions, une solution rejetée par plusieurs pays dont la Russie.
Dans une déclaration lue par l'ambassadrice américaine Susan Rice, le Conseil rappelle toutefois que ce lancement manqué intervient "en violation de résolutions du Conseil de sécurité" qui interdisent à Pyongyang toute activité nucléaire et balistique.
La résolution 1874 du Conseil de sécurité adoptée en 2009, après le dernier essai nucléaire mené par Pyongyang, interdit entre autres à la Corée du Nord de procéder à des essais nucléaires ou balistiques.
Le Conseil va "poursuivre ses consultations sur une réponse appropriée (..) en raison de l'urgence" de la situation, a ajouté Susan Rice, dont le pays préside le Conseil en avril.
Cette prise de position est très en-deçà des réactions de nombreux pays, dont ceux du G8 qui avaient condamné l'initiative de Pyongyang avec des termes nettement plus fermes, plusieurs évoquant même une "provocation", à l'instar des Etats-Unis, de la Corée du Sud ou du Japon.