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Le débat télévisé entre Hollande et Sarkozy, un duel très encadré

François Hollande et Nicolas Sarkozy sont-ils eurocompatibles? [Claude Paris]
Le débat entre François Hollande et Nicolas Sarkozy devrait durer plus de deux heures. - [Claude Paris]
Ce mercredi soir, les prétendants à la présidence française Nicolas Sarkozy et François Hollande s'affronteront lors d'un face-à-face télévisé. Les conditions du débat ont été négociées de manière très serrée par les équipes des deux candidats.

Le débat télévisé organisé à l’occasion du deuxième tour de la présidentielle est une véritable institution en France. Organisé à chaque élection depuis 1974 - hormis en 2002, quand le président Jacques Chirac avait refusé de débattre avec l’ex-leader du Front national Jean-Marie Le Pen - ce face-à-face fait l’objet de règles très strictes en matière de réalisation.

Par conséquent, le face-à-face entre le socialiste François Hollande et le président sortant Nicolas Sarkozy, qui se tiendra en direct mercredi à partir de 21h00, n’échappe pas à ces règles. Les différents points de la "charte de réalisation" du débat ont ainsi été négociés âprement entre les responsables de campagne des deux candidats.

LES PRINCIPALES RÈGLES DU DÉBAT

Le décor: Le choix du décor, comme celui du décorateur, n'a pas suscité de grandes discussions entre les équipes des deux candidats. Le décor, à dominance noire, sera sobre et classique. L’arrière-plan représentera le palais de l’Elysée, la résidence du président de la République à Paris.

Le mobilier: Les deux candidats - François Hollande à gauche, Nicolas Sarkozy à droite - seront disposés dans des alvéoles découpées aux deux extrémités d’une table en verre de 2,50 mètres de long (contre 2,20 mètres en 2007). Ils disposeront de chaises à hauteur ajustable ainsi que d’un climatiseur personnel pour pouvoir régler la température à leur convenance.

- En 2007, rapporte Le Monde, Nicolas Sarkozy, qui transpire facilement, voulait que la température du studio soit baissée à 19° C. Ségolène Royal avait refusé. Au final, le débat s'était tenu dans une atmosphère maintenue à 20,5° C. Cette année, les deux équipes se sont accordées pour fixer le thermostat à 19° C.

Le réalisateur: Jérôme Revon, un réalisateur chevronné qui était déjà aux manettes lors du débat Royal - Sarkozy en 2007, a été choisi par TF1 et France 2. Selon certains médias, le Parti socialiste lui aurait préféré Renaud Le Van Kim, le réalisateur du Grand Journal de Canal+. Après discussions, l'équipe de François Hollande a finalement accepté ce choix. Jérôme Revon dirigera une centaine de techniciens.

Le contrôle: Jérôme Revon sera "assisté" par deux réalisateurs représentant chacun l'un des candidats. Pour François Hollande, ce sera Tristan Carné ("Mots Croisés", "The Voice"), tandis que Yves Barbara ("Thalassa") a été désigné par l'équipe de Nicolas Sarkozy. Ceux-ci auront pour tâche de contrôler les choix du réalisateur et pourront demander des plans plus larges ou plus serrés de leur candidat.

- Selon certains médias hexagonaux, Nicolas Sarkozy, en 2007, avait été cadré de manière plus serrée car sa montre, trop voyante, attirait le regard.

Le cadrage: Depuis 1981, les gros plans sur l'un des deux candidats lorsque l'autre s'exprime sont prohibés. Ces plans de coupe, suivant la réaction de l'homme politique qui est filmé, peuvent en effet être fort dommageables. Le Monde indique par ailleurs que, cette année, Yves Barbara a exigé que Nicolas Sarkozy ne soit pas montré de profil. Tristan Carné aurait quant à lui demandé de faire en sorte que les lunettes de François Hollande ne fassent pas de reflets.

Les intervieweurs: Le débat sera mené par Laurence Ferrari (TF1) et David Pujadas (France 2). Ce choix n’a pas été contesté. Les deux journalistes auront pour tâche d’introduire les thèmes de débat et de rappeler le temps de parole de chacun des candidats. Ils ne pourront pas relancer les prétendants.

Les caméras: Le réalisateur disposera de 20 caméras pour filmer le débat. Une grue permettra de diffuser des plans larges du plateau, tandis qu’une caméra placée au-dessus de la table proposera une vue plongeante, à la verticale, du débat. En cas de panne, une régie de secours avec cinq caméras supplémentaires sera prête à prendre le relais.

Les micros: Un micro sera placé sur la table devant chacun des candidats. François Hollande et Nicolas Sarkozy porteront en outre des micros cravate.

Le temps de parole: Chaque candidat aura bien évidemment droit au même temps de parole. Le décompte sera tenu à jour en direct sur un compteur, que les téléspectateurs et les candidats pourront consulter à tout moment. L'équité du temps de parole sera contrôlée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), l'organe de régulation du paysage audiovisuel français.

Les thèmes: Le face-à-face sera orchestré autour de quatre thèmes: économie-social, société, institutions et politique étrangère.

L'ordre des interventions: La question a été tranchée par tirage au sort. Selon Europe 1, François Hollande aura l’honneur de prendre la parole en premier alors que Nicolas Sarkozy pourra conclure le débat.

La durée: Les équipes des deux candidats se sont mis d’accord pour que le débat dure "au moins deux heures". Celui-ci devrait, au final, durer environ deux heures et demie. Pour rappel, le débat entre Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy en 2007 avait duré 2h38.

La diffusion: Le débat sera diffusé sur les deux plus grandes chaînes de télévision de l'Hexagone, TF1 et France 2, qui organisent conjointement ce face-à-face. Il sera également retransmis par les canaux d'information BFM TV, iTélé, LCI et France 24. Il sera également radiodiffusé sur plusieurs grandes chaînes de radio (RTL, France Inter, France Info, RMC et Europe 1). En audience cumulée, plus de 20 millions de téléspectateurs devraient assister à ce débat.

Didier Kottelat

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Une pratique devenue jurisprudence

La prise en main du politique sur le débat remonte à la présidentielle de 1981.

Le socialiste François Mitterrand, qui n’avait pas fait bonne figure lors de la rencontre face à son rival Valéry Giscard d’Estaing en 1974, présente sept ans plus tard une liste de 21 conditions, acceptées par le président sortant.

"La pratique a ensuite fait jurisprudence", note le journaliste Serge Moati dans Le nouvel Observateur. Tous les débats présidentiels organisés en France depuis 1981 respectent ainsi des règles très strictes, tant au niveau du décor que des choix de cadrage.

La principale mesure instaurée en 1981 et toujours en vigueur concerne l'interdiction des gros plans sur l'un des deux candidats lorsque l'autre s'exprime.