Le pouvoir actuel
Depuis la démission de Hosni Moubarak en février 2011, c'est le Conseil suprême des forces armées (CSFA) qui dirige l'Egypte. Durant cette année de transition mouvementée jalonnée de manifestations parfois violentes, l'armée a souvent été accusée de vouloir maintenir l'appareil répressif du passé ou de s'accrocher à ses privilèges. Plus globalement, l'armée constitue l'épine dorsale du système égyptien depuis la chute de la monarchie en 1952, et l'institution a depuis donné au pays tous ses présidents. Elle détient un vaste et opaque empire économique, qui comprend d'innombrables sociétés dans les domaines les plus divers (construction, hôtellerie, ciment,...).
Une Constitution absente
La Constitution en vigueur sous Hosni Moubarak a été suspendue et la prochaine, sensée être en cours de rédaction, est au point mort. Le processus est en panne faute de consensus sur la composition de la commission constituante. L'absence de Constitution implique que les pouvoirs du prochain président, élu pour quatre ans, restent imprécis.
Les frères musulmans
La présidentielle est un défi coriace pour les Frères musulmans, même s'ils constituent la première force du pays et ont remporté haut la main les dernières législatives. Ces derniers mois, les Frères ont accumulé les faux pas et autres revirements. Ils ont d'abord promis de ne pas présenter de candidat à la présidentielle, avant de se raviser. Leur candidat désigné, Khaïrat al-Chater, n'a pas pu se présenter en raison d'une ancienne condamnation. Il a été remplacé au pied levé par Mohammed Morsi, un ingénieur de 60 ans surnommé la "roue de secours". Les Frères sont aussi critiqués pour leurs rapports ambivalents avec l'armée et la faiblesse du Parlement qu'ils dirigent.
Les quatre favoris
Quatre personnalités sont données favorites, deux issues du règne Moubarak et deux autres issues de la mouvance islamiste. D'un côté, on trouve Amr Moussa, ancien chef de la Ligue arabe et ex-ministre des Affaires étrangères de Hosni Moubarak et Ahmad Shafiq, ultime Premier ministre du raïs. Les deux hommes tentent de se démarquer de Moubarak et axent leur campagne sur la stabilité. Dans le second groupe, on trouve l'islamiste indépendant Abdel Moneim Aboul Fotouh et le candidat des Frères musulmans Mohammed Morsi. Ce dernier bénéfice du solide soutien des Frères, tandis que son rival, un ancien cadre dirigeant des Frères exclu l'an passé, promet un islamisme modéré.
Les outsiders
D'autres candidats disposant de beaucoup moins de moyens espèrent faire un score honorable. C'est le cas de Hamdine Sabahi (gauche nassérienne), de l'islamiste Selim al-Awa ou du jeune militant des droits sociaux Khaled Ali. La douzaine de candidats ne comprend ni femme, ni de représentant de la communauté chrétienne copte (6 à 10% de la population). La mouvance des "jeunes de la révolution", qui avaient initié la révolte anti-Moubarak, n'a pas de candidat et se disperse sur plusieurs noms.
Premier débat télévisé
Pour la première fois de l'histoire du pays, un débat télévisé a été organisé la semaine passé entre deux des principaux candidats, l'ex-ministre Amr Moussa et l'islamiste Abdel Moneim Aboul Foutouh. L'émission a été très suivie.
Une incertitude: l'attitude de l'armée
L'armée promet de rentrer dans ses casernes une fois élu le nouveau président, mais ce retrait pourrait bien n'être qu'un trompe-l'oeil en raison de son poids politique et économique considérable. Son rôle dépendra beaucoup du président qui sortira des urnes. S'il est issu de l'ancien régime (comme Amr Moussa ou Ahmad Chafiq), l'armée pourrait garder un rôle important. Si une autre personnalité est élue, elle devra rentrer dans ses casernes mais il faudra en définir les modalités.
Cécile Rais avec les agences
Présidentielle, mode d'emploi
Le premier tour de la présidentielle se tient sur deux jours, les 23 et 24 mai avec, si aucun candidat n'obtient la majorité absolue, un second tour les 16 et 17 juin.
Le suffrage est ouvert aux Egyptiens et Egyptiennes âgés de 18 ans et plus, soit près de 52 millions de personnes. Le vote des expatriés pour le premier tour s'est tenu du 11 au 17 mai dans les ambassades et consulats d'Egypte.
Les résultats du premier tour doivent être officiellement annoncés le 27 mai, ceux du second le 21 juin.
Douze candidats sont en lice, après que dix autres ont été éliminés en raison de dossiers irréguliers ou incomplets, ou pour inéligibilité résultant d'une condamnation ancienne. Un autre candidat s'est retiré de lui-même.
L'élection est placée sous la supervision d'une Haute commission électorale, composée de magistrats. Des observateurs nationaux et étrangers, notamment ceux du Carter Center américain dont l'accréditation avait un temps été refusée, ont été autorisés.