La justice égyptienne a reconnu samedi Hosni Moubarak complice des meurtres de près de 850 manifestants pendant le soulèvement populaire qui l'a renversé l'an dernier. L'ancien président égyptien, également poursuivi pour corruption, a été condamné à la prison à perpétuité. La peine capitale avait été requise contre lui. Premier dirigeant emporté par le Printemps arabe à comparaître en personne, il était jugé depuis le 3 août 2011 et plaidait non-coupable.
Le chef d'Etat déchu, âgé de 84 ans, était arrivé samedi matin en hélicoptère à l'école de police située en banlieue du Caire, où s'était installé le tribunal qui devait prononcer le verdict. Couché sur une civière, portant des lunettes noires, l'ancien chef d'Etat avait ensuite été transféré dans une ambulance et transporté à l'intérieur de la salle d'audience. Sa santé avait fait l'objet de nombreuses spéculations.
Après l'annonce de sa condamnation, Hosni Moubarak a été transféré dans l'aile médicalisée de la prison de Tora, dans la banlieue sud du Caire, où il purgera sa peine, a-t-on appris auprès des services de sécurité. L'un de ses avocats, Yasser Bahr, a annoncé que son client ferait appel, le verdict étant "plein de failles juridiques".
Peine similaire pour l'ex-ministre de l'Intérieur
Les fils d'Hosni Moubarak Alaa et Gamal, poursuivis pour corruption, ainsi que l'ancien ministre de l'Intérieur Habib el-Adli et six anciens hauts responsables des services de sécurité, eux aussi jugés pour leur implication présumée dans la mort des manifestants, étaient arrivés un peu plus tôt au tribunal.
Habid el-Adli a également été condamné à la prison à vie. Le juge a en revanche déclaré que les faits reprochés aux fils Moubarak étaient prescrits; les deux hommes ont été acquittés, tout comme les six ex-responsables des services de sécurité.
Audience sous haute sécurité
Bien que l'audience se soit tenue sous très haute sécurité, de brefs heurts ont éclaté dans la salle après l'annonce de la condamnation. "Nul et non avenu!", "le peuple veut la purge de la justice!", ont crié des avocats, furieux après l'acquittement des six responsables de la sécurité et des fils Moubarak.
Des centaines de policiers anti émeutes et des blindés de l'armée avaient encerclé le bâtiment pour prévenir les heurts qui se sont produits à plusieurs reprises devant le bâtiment entre pro et anti Moubarak. Devant le tribunal, une vingtaine de membres des familles de victimes, venus d'Alexandrie, brandissaient des portraits de leurs "martyrs". "Exécution pour le fils de chien!", "Trente ans de torture et de meurtre de la jeunesse, il faut que le déchu soit exécuté", scandaient-ils.
Ce verdict intervient entre les deux tours de l'élection présidentielle, la première depuis la chute de l'ancien dirigeant, qui s'est maintenu au pouvoir pendant trois décennies.
afp/ptur/vtom
Choc d'Hosni Moubarak
L'état d'Hosni Moubarak s'est dégradé lors de son arrivée samedi en prison, ont rapporté les médias officiels. Un masque à oxygène lui a été appliqué, selon des sources de sécurité.
Le président égyptien déchu a refusé en pleurant de quitter l'hélicoptère en arrivant à la prison du Tora, avait indiqué auparavant un responsable des services de sécurité.
"Il pleurait et ne voulait pas quitter l'hélicoptère. Des membres de la sécurité ont dû le convaincre de sortir", a assuré ce responsable.
Les acquittements provoquent des manifestations
A peine prononcé, le verdict du procès du président égyptien déchu Hosni Moubarak a provoqué samedi de nombreuses protestations, en raison notamment des acquittements de six anciens responsables de la police.
Près de 20'000 Egyptiens ont manifesté place Tahrir, dans le centre du Caire, et dans plusieurs autres villes d'Egypte.
Les manifestants ont scandé "A bas le pouvoir militaire" et "Soit nous obtenons justice pour nos martyrs, soit nous allons mourir comme eux".
Le candidat des Frères musulmans à l'élection présidentielle Mohammed Morsi a qualifié ce procès de "farce" et demandé un nouveau jugement.
Des candidats éliminés au premier tour de l'élection ont également dénoncé le résultat de ce procès, accusé de blanchir la haute hiérarchie policière.
"Nous n'allons pas trahir le sang des martyrs, nous ne permettrons pas une reproduction du régime de l'oppression, de la corruption et de la dictature" a réagi l'un d'eux, le nationaliste arabe Hamdeen Sabbahi.
Ahmad Chafiq, adversaire de Mohammed Morsi au second tour des présidentielles et dernier premier ministre de Hosni Moubarak, a à l'inverse souligné la nécessité "d'accepter toutes les décisions de justice".