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Les Frères musulmans, de l'illégalité à la prise du pouvoir

Mohamed Morsi est l'un des dirigeants des Frères musulmans.
Mohamed Morsi est l'un des dirigeants des Frères musulmans.
Les Frères musulmans ont remporté la présidentielle égyptienne, après avoir gagné le parlement, qui a depuis été dissous. Longtemps dans l'illégalité, la confrérie islamiste représente la force politique la mieux organisée d'Egypte.

Les Frères musulmans, dont un des dirigeants, Mohamed Morsi, a remporté l'élection présidentielle égyptienne, représentent la force politique la mieux organisée d'Egypte.

Il s'agit du plus ancien mouvement de l'islamisme sunnite. Leur doctrine s'organise autour du dogme du "tawhid" (unicité de Dieu), la fusion du religieux et du politique. Créée en 1928 par Hassan al-Banna, la confrérie a été interdite en 1954 mais dans les faits, elle bénéficiait d'une tolérance relative sous le régime de Hosni Moubarak. Ses membres faisaient néanmoins régulièrement l'objet de campagnes d'arrestations.

Des actes sanglants

Dans les années 1940, elle a perpétré des actes sanglants, dont l'assassinat du Premier ministre Mahmoud Fahmi al-Noqrachi en 1948. Ses membres subissent alors une répression brutale. Ses relations avec l'armée, épine dorsale du pouvoir depuis la chute de la monarchie en 1952, sont marquées par la rivalité, mais parfois aussi empreintes de connivence.

Le président Gamal Abdel Nasser leur porte ensuite des coups très durs entre 1954 et 1970, après une tentative d'assassinat contre sa personne imputée au mouvement. La confrérie est interdite. Ses membres sont arrêtés par milliers.

Amnistie générale de 1971

En 1971, Anouar el-Sadate, qui succède à Nasser, fait libérer les Frères musulmans et proclame une amnistie générale. Mais ils vivent très mal le revirement de Sadate et les accords de paix avec Israël.

En 1981, Sadate sera assassiné par d'anciens membres de la confrérie passés à l'extrémisme.

Percée aux législatives de 2005

Pendant l'ère Moubarak, la confrérie a présenté des candidats au Parlement sous l'étiquette d'indépendants. En 2005, ils ont réussi une percée aux législatives, en remportant près de 20% des sièges.

Fin 2010, les Frères musulmans étaient sortis bredouilles du premier tour des législatives et avaient décidé de boycotter le second tour, dénonçant des fraudes massives et violentes.

Discrétion pendant le printemps arabe

La révolte populaire contre le régime Moubarak, initiée par des mouvements de jeunes laïques en janvier 2011, semble prendre la confrérie par surprise. Seuls les jeunes Frères musulmans y prennent part au début, avant que le mouvement islamiste ne s'y rallie progressivement.

Après la chute de Hosni Moubarak le 11 février 2011, la confrérie islamiste a formé un parti politique légal pour pouvoir participer ouvertement aux élections. Ce nouveau parti, baptisé le "Parti de la liberté et de la justice" (PLJ), s'est défendu d'avoir une orientation "théocratique" et a assuré qu'il serait "indépendant" de la confrérie.

Confrontation et connivence avec l'armée

Tout au long de la transition politique, la confrérie donne le sentiment d'alterner confrontation et connivence avec le pouvoir militaire, ainsi qu'avec les partis et mouvements laïques, s'appuyant alternativement sur les uns ou les autres pour faire avancer ses intérêts. Elle revient en force au Parlement à l'hiver 2011/2012, où son parti, le PLJ, remporte presque la moitié des sièges de députés.

La dissolution mi-juin de l'Assemblée pour irrégularité dans le mode de scrutin la prive toutefois de son bastion parlementaire.

afp/bri

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Leur stratégie

La confrérie est particulièrement active dans les mosquées, où elle mène des actions d'aide aux plus démunis, dans les universités et au sein des syndicats.

Elle s'appuie sur un réseau de centaines de milliers de militants, rompus à l'action de terrain et dont l'organisation opaque reflète les années de clandestinité.

Au cours de son histoire, elle a oscillé entre l'opposition violente au pouvoir et la collaboration, entre plaidoyers pour un Etat islamique et assurances de respecter le jeu démocratique.

Ses intentions restent donc largement énigmatiques et suscitent la crainte de ceux qui redoutent l'instauration d'un régime islamique en Egypte.

Dès l'an dernier, les Etats-Unis comme de nombreux autres pays étrangers ont engagé ouvertement des contacts avec la confrérie, afin de tenir compte de la nouvelle donne politique égyptienne.