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Le président égyptien décapite l'armée et lui retire du pouvoir

En août 2012, il a mis au pas l'institution militaire qui avait placé son gouvernement sous tutelle, en envoyant à la retraite le puissant maréchal Hussein Tantaoui, chef du Conseil suprême des forces armées. [KEYSTONE - MOHAMED SMAHA/EGYPTIAN PRESIDENCY]
Le maréchal Tantaoui (à gauche) et le chef d'état-major de l'armée Sami Anan (à droite), ont été mis à la retraite par Mohamed Morsi (au centre). - [KEYSTONE - MOHAMED SMAHA/EGYPTIAN PRESIDENCY]
Le président égyptien Mohamed Morsi a créé la surprise dimanche en annonçant l'annulation d'une "déclaration constitutionnelle" accordant de larges pouvoirs à l'armée et la mise à la retraite du maréchal Hussein Tantaoui. Un vice-président a également été nommé.

"Le président a décidé d'annuler la déclaration constitutionnelle adoptée le 17 juin" par le Conseil suprême des forces armées (CSFA), qui dirigeait à l'époque le pays et dans laquelle les militaires s'arrogeaient notamment le pouvoir législatif, a annoncé le porte-parole du président égyptien à la télévision.

La "déclaration" avait été adoptée le jour de la fin du second tour de l'élection présidentielle et avait provoqué une crise politique entre l'armée et les islamistes. Avec le pouvoir législatif, les généraux gardaient un droit de veto sur toute nouvelle loi ou mesure budgétaire et se réservaient aussi un droit de regard sur la rédaction de la future Constitution.

Les Frères musulmans, dont est issu le président Morsi, avaient dénoncé cette "Déclaration constitutionnelle complémentaire" comme "un coup d'Etat institutionnel" du CSFA, dirigé par le maréchal Tantaoui, visant à limiter les prérogatives présidentielles. (Lire: Des milliers de manifestants protestent au Caire contre l'armée)

Mise à la retraite de responsables de l'armée

Mohamed Morsi a également décidé dimanche de mettre à la retraite le maréchal Tantaoui et l'a remplacé au ministère de la Défense par le général Abdel Fattah al-Sissi, le chef des renseignements militaires. Il n'était toutefois pas encore clair si le maréchal, ministre de la Défense de Hosni Moubarak pendant une vingtaine d'années, restait toujours chef du CSFA.

Le chef d'état-major de l'armée et numéro 2 du CSFA, Sami Anan, a également été mis à la retraite, et remplacé par le général Sedki Sobhi. Hussein Tantaoui et Sami Anan ont toutefois tous deux été nommés conseillers auprès du président Morsi, selon les médias officiels.

Mohamed Morsi a finalement également nommé un vice-président, le juge Mahmoud Mekki, qui sera seulement la deuxième personne à occuper ce poste en plus de 30 ans.

Mohamed Morsi, formellement investi le 30 juin, est le premier civil à accéder à la magistrature suprême, dans un pays où tous les présidents sont venus de l'armée depuis la chute de la monarchie en 1952. Depuis son accession au pouvoir, il a alterné compromis et bras de fer avec l'armée pour tenter de s'imposer.

agences/mre

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Un maréchal proche de Moubarak

Le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui fut un proche du président Hosni Moubarak avant de devenir, après sa chute, un homme-clé de la transition.

Ce septuagénaire fut ministre de la Défense d'Hosni Moubarak pendant vingt ans, de 1991 à la chute du raïs en 2011. Il a ensuite conservé ce poste durant la période de transition, avant d'y être reconduit début août lors de la formation du gouvernement du Premier ministre Hicham Qandil.

Mais c'est surtout en tant que chef du Conseil suprême des forces armées (CSFA) qu'il a assumé pendant l'année et demie écoulée une place de premier rang.

C'est au CSFA qu'Hosni Moubarak a remis tous ses pouvoirs en démissionnant le 11 février 2011, faisant du maréchal Tantaoui le chef d'Etat de facto en attendant un président élu.

Malgré l'élection en juin de Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, le maréchhal Tantaoui est resté un homme-clé du système, présent à la fois dans le gouvernement grâce au ministère de la Défense et à la tête du CSFA, une institution qui s'est arrogé le pouvoir législatif après la dissolution de l'Assemblée.

Joie sur la place Tahrir

La nouvelle du limogeage du maréchal Tantaoui a été accueillie avec joie par des milliers de sympathisants islamistes dimanche soir. Ils ont fêté l'événement sur l'emblématique place Tahrir au Caire.